03/10/2014
Vous reprendrez bien un peu de Paul Reboux (I)
Vous vous souvenez de Paul Reboux :

de son vrai nom André Amillet (1877-1963), il a été célèbre pour son recueil de pastiches "À la manière de…", dont il a tiré une méthode. Mais il a été aussi critique (littéraire, gastronomique), romancier, et il a écrit des livres d'histoire naturelle, des biographies, des récits de voyage, des livres pour enfants...
(d’après Wikipedia)
Dans son « Savoir causer », voici ce qu’il écrit des « mots périlleux » :
« Quand on croit être capable de parler correctement le français, encore faut-il savoir, par exemple, ceci…
… Dentition désigne la période où les dents poussent et que denture signifie l’ensemble de ces dents, une fois qu’elles ont atteint leur dimension normale.
… Tendresse s’emploie pour les choses du cœur et tendreté pour celles de la table.
Les pédants vous diront que le mot antan signifie « de l’an dernier » et que l’on commet une faute en employant ce terme dans le sens de « autrefois ». Ce sont eux qui se trompent… Antan signifie, non pas « de l’année d’avant », mais bien « d’avant l’année actuelle ». L’Académie et Littré commettent une erreur (sic !) en restreignant le sens de cette expression. La structure du mot s’oppose aux explications données par les lexicographes (sic !). La linguistique comparée remet les choses au point (sic !). Et Villon avait raison quand, évoquant des héroïnes, il les jugeait oubliées, comme les neiges, non de l’hiver précédent, mais des hivers antérieurs.
Prenez garde au mot « vous »… Quand (il) n’est que complément indirect, quand il signifie « à vous » ou « avec vous », il a une fâcheuse tendance à perdre son « à »… C’est ainsi que les speakers de radio disent : "Monsieur Samson François va vous interpréter deux valses de Chopin", alors que ce sont des valses de Chopin qui sont interprétées, non ce « vous » !
On devrait dire « … va interpréter pour vous ».
Parler ainsi, en un tel cas, c’est gagner du temps, certes. Mais toutes les abréviations ne sont pas bonnes. On ne raccourcit pas sans risque.
La guillotine en fait la preuve. »
08:00 Publié dans Règles du français et de l'écriture | Tags : vocabulaire, français, faux amis | Lien permanent | Commentaires (0)
02/10/2014
Le français vivant
Il y a des mots que l’on découvre, soit qu’ils soient vraiment nouveaux, soit qu’on ne les connût pas auparavant.
Certains sont amusants, inventifs, poétiques…
J’en note ici, à la volée, quelques-uns. Ce billet a vocation à être complété, contribuez-y et revenez-y !
Douance : le fait d’être (sur)doué (lu dans la critique du livre « Surdoués normaux » paru début 2014).
Porte-parolat (Laureline Dupont dans « Marianne » du 22 au 28 août 2014) : mission consistant à être porte-parole (d’un homme politique par exemple).
Envole-moi (Jean-Jacques Goldmann)
On nous Claudia Schiffer (Alain Souchon, dans Foule sentimentale)
Bravitude (Ségolène Royal, sur la muraille de Chine, avant l’élection présidentielle de 2007)
Observance : l’action d’observer, de respecter… une recommandation, une consigne, une ordonnance
Jardinerie : magasin qui vend tout ce qui est lié au jardin : plantes, arbres, outils, documentation… Le cas de ce mot est très intéressant car les médias avaient d’abord introduit le mot garden center. Que le grand public (et les professionnels) lui aient préféré « jardinerie » reste pour moi un mystère réjouissant…
Hypocoristique : caressant... (Dan Franck, La séparation, 1991
Calamiteux : à propos de la gestion de son prédécesseur (Alain Juppé, 1995)
Ressourcerie : créé le 26 septembre 2000, le Réseau des Ressourceries a pour objet le regroupement, la synergie des compétences et des moyens, la professionnalisation, le développement, la représentation, la défense des intérêts de ses adhérents, la promotion d'initiatives, la formation, la sensibilisation à l’environnement du public, dans les quatre domaines suivants :
COLLECTER
Pour collecter vos objets inutilisés, la Ressourcerie met en place un système de collecte des objets encombrants...
VALORISER
Pour donner une seconde vie aux objets inutilisés que vous avez déposés, la Ressourcerie met en place un système de valorisation des objets encombrants ...
REDISTRIBUER
Pour redistribuer des objets de seconde main écologiques et équitables, la Ressourcerie vend les objets qu'elle a collectés et valorisés....
SENSIBILISER
Pour sensibiliser à la réduction des déchets, votre Ressourcerie met en place, en fonction de ses compétences, des actions spécifiques...
C’est le français qui vit et prospère…
08:00 Publié dans Vocabulaire, néologismes, langues minoritaires | Tags : néologismes, vocabulaire | Lien permanent | Commentaires (0)
01/10/2014
L'unification linguistique de la France
La revue de l’INED « Population et sociétés » a publié dans son numéro 285 de décembre 1993 (je sais, ça fait vingt ans, mais cette revue n’existant plus, je serais bien en peine de trouver une mise à jour de l’étude…) un panorama très intéressant de la situation du français dans l’Hexagone, en ces temps d’immigration porteuse de langues diverses et de tentatives de relance des langues régionales.
Selon l’enquête, les deux tiers des parents à qui on parlait une langue régionale ou étrangère quand ils étaient enfants, ne la parlent plus ordinairement à leurs propres enfants. Dans 95 % des familles françaises, c’est dans la langue nationale que les parents s’adressent habituellement à leurs enfants. Cela donne raison à Claude Hagège qui a écrit « Les langues minoritaires ne constituent pas un danger pour le français » (Le français et les siècles, 1987).
L’arabe est la première langue étrangère parlée en France (NDLR : à mon avis, c’est plutôt le franglais…) mais il concerne moins de 2 % des familles. Il est délaissé par la moitié des parents arabophones en une seule génération.
Le portuguais est en voie de réduction rapide (1 % des familles).
L’alsacien et le mosellan ensuite (0,6 %). Ils ont une sorte de sursis quant à leur abandon à cause de la proximité géographique du monde rhénan. Le corse, éloigné de la péninsule italique, est beaucoup moins parlé dans les familles ; il pourrait être devancé à terme par l’arabe et l’italien. Quant au breton, une étude de l’INSEE confirme sa quasi-disparition chez les moins de trente ans.
Le turc (communauté récente, faible numériquement mais qui se transmet encore à un niveau élevé) : 0,4 %.
Et enfin l’espagnol : 0,2 %.
Les femmes, contrairement à ce que l’on pourrait penser, se convertissent au français plus vite que les hommes ; de ce fait, la langue maternelle d’origine devint plutôt une langue « paternelle » !
Dans un même groupe linguistique, ce sont les plus démunis qui transmettent le plus. L’INED écrit : « Le trésor linguistique dont ils sont dépositaires est bien une richesse mais c’est souvent la richesse du pauvre ».
Les lois qui autorisent l’enseignement des langues régionales (loi Deixonne en 1951, circulaire Savary en 1982…) ne semblent pas avoir eu beaucoup d’impact sur leur disparition progressive. « Une langue même langue d’école, cesse d’être familière si elle n’est plus familiale ».
Enfin, point qui intéressera les pourfendeurs de franglais que nous sommes, une langue peut s’altérer même si elle est retransmise par une partie des familles. L’alsacien d’aujourd’hui est truffé de périphrases calquées du français et d’emprunts directs ; les jeunes locuteurs ne cessent de zapper entre les deux langues, comme ils le font entre télévision française et télévision allemande. On constate la même hybridation dans le corse et l’arabe dialectal.
08:00 Publié dans Données chiffrées sur le français | Tags : français, langues minoritaires | Lien permanent | Commentaires (0)


