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23/07/2024

"Romain Rolland" (Stefan Zweig) : critique I

Romain Rolland (né à Clamecy le 29 janvier 1866 – mort à Vézelay le 30 décembre 1944) est un écrivain français aujourd’hui peu connu et très peu lu, qui a été surtout célèbre (et vilipendé) pour son pacifisme pendant la Grande Guerre et pour sa haute exigence morale. Très influencé par Léon Tolstoï, admirateur de Beethoven et de Michel-Ange, puis de Gandhi, musicien et musicologue, il a écrit entre autres le roman « Jean-Christophe » entre 1904 et 1912, et a reçu le Prix Nobel de littérature en 1915.

Il a été très ami avec Stefan Zweig, qui le considérait comme un maître et qui a écrit en 1921 une biographie qui est surtout une apologie…

Quelques mots sur Stefan Zweig : pour moi, c’est l’auteur d’un chef d’œuvre « Le monde d’hier », un novelliste très apprécié (j’ai lu sans passion « Amok », « Vingt-quatre heures de la vie d’une femme », « Lettre d’une inconnue »…) et un biographe donc.

Voulant rendre compte de cet ouvrage, « Romain Rolland : der Mann und das Werk », traduit par Odette Richez et révisé par Serge Niémetz (j’utilise la sixième édition du Livre de poche d’août 2023), je suis devant deux sujets différents : d’abord l’art de la biographie, dans lequel Zweig est connu pour exceller et ensuite la vie et l’œuvre de Rolland, telles que nous les présente Zweig.

En fait de biographie, je ne connais guère que celles consacrées par Dominique Bona (Académicienne depuis dix ans) à André Maurois, à Paul Valéry, à Romain Gary, à Berthe Morisot, à Camille et Paul Claudel. Ces livres m’ont enchanté, surtout le premier (« Il n’y a qu’un amour »), pour des raisons personnelles. Il est vrai que Mme Bona s’intéresse surtout aux événements sentimentaux qui ont émaillé la vie bien remplie de ces personnages célèbres, et particulièrement à la place des femmes ou au regard des femmes.

Rien de tel dans l’ouvrage de Stefan Zweig ! La biographie proprement dite n’occupe qu’une petite partie du texte (50 pages sur 340 !) ; et d’ailleurs, datant de 1921, elle n’embrasse qu’une petite partie de l’existence de son sujet, décédé en 1944 ; tout le reste, c’est une analyse approfondie – et parfois fastidieuse, disons-le – de l’œuvre littéraire et politique de Romain Rolland, présentée sous forme de courts chapitres thématiques : le cycle des drames inconnus (non publiés) (1890-1895), « les Tragédies de la foi » (publiées seulement en 1913, dix ans après leur écriture), « le Théâtre de la Révolution » (1896-1902), « Les vies des hommes illustres » (Beethoven, Michel-Ange, Tolstoï), « Jean-Christophe » (Zweig va jusqu’à consacrer de courtes monographies aux trois personnages principaux, ainsi qu’à l’image de la France, de l’Allemagne et de l’Italie dans le roman !), « Colas Breugnon », sa débauche d’efforts pour éviter la guerre, les Manifestes, « Au-dessus de la mêlée » (septembre 2014), la correspondance de Rolland, son rôle de conseiller, son Journal (celui tenu pendant l’Occupation deviendra célèbre…). Zweig entrecoupe le fil historique de l’analyse des ouvrages successifs, d’analyses transverses : l’époque et l’œuvre, aspiration à la grandeur morale, Jean-Christophe et les nations, Rolland prophète, etc.

Il suit en cela les recommandations de Goethe, rappelées en exergue : « Lorsque nous étudions une biographie, qui se développe sur plusieurs plans différents, nous nous trouvons obligés (…) de rapprocher tout ce qui peut constituer une suite logique ».
C’est donc un livre quelque peu encyclopédique (la table des matières est explicite), sans beaucoup d’objectivité probablement, une sorte de travail universitaire, au style neutre et sans éclat, instructif évidemment en tant qu’introduction à l’œuvre de Romain Rolland mais plutôt réservé, me semble-t-il, à ceux qui l’étudient.
Dans un billet à venir, prenant l’avis de Stefan Zweig pour argent comptant, nous examinerons ce qu’il nous apprend de son modèle moral : Romain Rolland.
Dans une courte préface, S. Zweig écrit : « avant tout (de) rendre témoignage à l’homme qui fut pour moi, et pour beaucoup d’autres, le plus grand événement moral de notre époque (…) Ce livre (…) a été dicté par un sentiment de reconnaissance pour avoir connu, au milieu de notre siècle égaré, le miracle d’une existence toute de pureté ».

 

05/07/2024

Toute ressemblance, etc. : réponses

(1) Quel écrivain a-t-il écrit ce texte ? Stefan Zweig

(2) De quel écrivain parle-t-il ? Romain Rolland (biographie publiée en 1921 à Francfort, sous le titre originel « Romain Rolland : der Mann und das Werk »)

(3) De quel livre parle-t-il ? « Danton », pièce écrite en 1900 par Romain Rolland, dans le cadre de son cycle dramatique « Le théâtre de la Révolution »

(4) De quelle période parle-t-il ? La Révolution française, et la lutte entre Danton et Robespierre (page 135 de l’édition du Livre de poche).

Toute ressemblance avec la période contemporaine (Élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet 2024) ne serait évidemment que pure coïncidence...

01/07/2024

Toute ressemblance, etc.

« Quelques hommes, les chefs, exploitent maintenant égoïstement au profit de leurs idées ce que la masse créa en tant que force élémentaire. Tout mouvement spirituel, et en particulier toute réforme et toute révolution, connaît cet instant tragique de la victoire où la puissance déchoit aux mains des hommes, où l’unité morale est brisé par les ambitions politiques, où le peuple qui, en un sursaut, réalisa sa liberté, prête de nouveau l’oreille, sans s’en douter, aux intérêts particulier des démagogues, guides de cette liberté. C’est l’instant inévitable où tout mouvement spirituel triomphe en apparence, tandis que les hommes nobles, déçues, se retirent à l’écart ; les égoïstes et les impudents jouissent alors du succès, et les idéalistes s’isolent, silencieux (...).

Il fut alors en réalité avec les vaincus comme il est ici en imagination avec ceux pour lesquels l’idée fut tout et le sujet et le succès rien ; car il sait qu’une idée n’a de force qu’en ne se réalisant jamais (...).

À l’esprit de décision succèdent les dissensions ; dans l’ivresse du triomphe, dans les lourdes vapeurs de sang, un nouveau combat commence déjà entre les prétoriens qui se disputent le pays conquis : combat des idées, des personnalités, des tempéraments, des origines ; depuis que les alliés ne sont plus unis dans le danger, cette dure nécessité, ils se rendent compte de ce qui les sépare. C’est la crise qui éclate dans la minute même où la révolution triomphe. Les armées ennemies sont battues ; les royalistes, les Girondins écrasées, et maintenant les conventionnels se dressent les uns contre les autres ».

Questions pour les érudits :

  1. Quel écrivain a-t-il écrit ce texte ?
  2. De quel écrivain parle-t-il ?
  3. De quel livre parle-t-il ?
  4. De quelle période parle-t-il ?