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14/11/2014

La littérature est-elle la solution ? (I)

Je vous ai parlé de quelques réactions récentes sur l’acculturation supposée des élites et aussi du manifeste provocateur de F. Lucchini sur la littérature, source de redressement.

La littérature aujourd’hui est-elle la solution ou plus modestement a-t-elle encore une place dans notre société « numérisée » et « mondialisée » ?

Voici ce qu’en disait Antoine Compagnon dans sa leçon inaugurale au Collège de France (2006).

Le paysage s’est modifié en profondeur depuis vingt ans. Calvino parlait encore comme Proust dans Le Temps retrouvé : « La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent réellement vécue, c’est la littérature. » La réalisation de soi, jugeait Proust, a lieu non pas dans la vie mondaine, mais par la littérature, non seulement pour l’écrivain qui s’y voue en entier, mais aussi pour le lecteur qu’elle émeut le temps qu’il s’y adonne : « Par l’art seulement, poursuivait Proust, nous pouvons sortir de nous, savoir ce que voit un autre de cet univers qui n’est pas le même que le nôtre, et dont les paysages nous seraient restés aussi inconnus que ceux qu’il peut y avoir dans la lune. » Aux yeux de Calvino, la suprématie de la littérature ne faisait pas question. ...

Car le lieu de la littérature s’est amenuisé dans notre société depuis une génération : à l’école, où les textes documentaires mordent sur elle, ou même l’ont dévorée ; dans la presse, où les pages littéraires s’étiolent et qui traverse elle-même une crise peut-être funeste ; durant les loisirs, où l’accélération numérique morcelle le temps disponible pour les livres. Si bien que la transition n’est plus assurée entre la lecture enfantine – laquelle ne se porte pas mal, avec une littérature pour la jeunesse plus attrayante qu’auparavant – et la lecture adolescente, jugée ennuyeuse parce qu’elle requiert de longs moments de solitude immobile. Quand on les interroge sur le livre qu’ils aiment le moins, les lycéens répondent Madame Bovary, le seul qu’on les ait obligés à lire.

Du point de vue savant, la philologie faisait l’hypothèse, depuis le début du XIXè siècle, de l’unité constitutive d’une langue, d’une littérature et d’une culture – ou plutôt d’une civilisation, comme on disait alors –, ensemble organique identifié à l’esprit d’une nation, et ensemble dont la littérature, entre les racines linguistiques et les frondaisons culturelles, fournissait le noble tronc. D’où l’éminence prolongée des études littéraires, voie royale vers la compréhension d’une culture dans sa totalité. Or le modèle philologique a été ébranlé à la fin du XXè siècle. D’un côté, parce que d’autres représentations culturelles comme les images fixes et mobiles se sont imposées auprès de la littérature, et qu’elles n’ont plus été jugées moins recevables ; de l’autre, parce que l’association de la culture et de la nation n’a plus été perçue en termes aussi étroits ni déterminants.

 

À suivre.

13/11/2014

Bibliothérapie

Abnousse Shalmani avait raison (voir mon billet du 1er septembre 2014) : on peut soigner avec les livres !

Et on le fait !

À Londres, la School of Life a été ouverte par le philosophe suisse Alain de Botton ; un bibliothérapeute établit pour chaque patient, un diagnostic à partir d’un questionnaire sur ses goûts de lecteur et ses états d’âme. Une ordonnance est alors prescrite, comportant une liste d’une dizaine d’ouvrages.

Pour l’endeuillé, les « Métamorphoses » d’Ovide ou « Rien à craindre » de Julian Barnes ; pour le jeune père épuisé par les nuits blanches, une Jonathan Coe, « La Maison du sommeil » ; pour le chômeur, la nouvelle grinçante de Melville, « Bartleby »…

« Entrer dans la psyché d’un autre (le héros d’un livre par exemple) peut servir de catharsis » explique Ella Berthoud, bibliothérapeute. Nous prescrivons des fictions car nous pensons qu’un grand roman peut changer votre approche de la vie.

Une consultation coûte 80 €.

(source Marianne du 17 octobre 2014, article sur les thérapies alternatives).

12/11/2014

Renaudot écrit, Renaudot parlé

Vous allez dire que je ne supporte pas les prix littéraires et que je ne passe rien à leurs lauréats… par jalousie sans doute !

Possible.

Léo Ferré disait que les critiques « sont des ratés sympathiques » et, en plus, je ne peux même pas me prétendre critique…

Bref, venons-en au fait.

J’ai écouté sur France Inter, le 9 novembre dernier, le Renaudot 2014, à savoir David Foenkinos, parler de son livre « Charlotte », enfin primé après avoir été annoncé comme l’un des favoris du Goncourt.

Bon, je passe sur le sujet du livre, l’histoire pathétique de Charlotte Salomon, peintre allemand réfugié dans le sud de la France, dénoncée, puis exterminée par les Nazis. L’auteur s’en est épris, à ses dires mêmes.

Mais comment en parle-t-il, à une heure de grande écoute ?

« je suis stupéfait de… », « elle est en capacité de… », « pour moi, c’est une grande stupéfaction… » et des « voilà » toutes les trois phrases, selon la mode parisienne et journalistique…

Sans doute le trac a-t-il joué, pour un écrivain peu habitué aux micros… Mais quelle langue pauvre et incorrecte donne-t-il à entendre à la jeunesse, lui qui devrait être un modèle, l’écrivain contemporain de langue française !

Que peut-on en déduire de la langue écrite par cet auteur, que du coup, je n’ai pas envie de découvrir ?

Rien sans doute…