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10/11/2014

Pédago d'accord mais pas plus !

Le français fait vendre !

Non seulement des cahiers spéciaux sur les facéties de l’orthographe comme ceux du Monde mais aussi la presse quotidienne ou les magazines.

Une fois on s’insurge contre les outrages dont notre langue est victime (voir mon billet du 14 octobre 2014 « Courage, on n’est pas seuls ») , une autre fois on s’insurge contre les censeurs qui nous rebattraient les oreilles avec leurs humeurs correctrices (voir par exemple le billet du 26 octobre 2014 sur Jacques Laurent et son livre « Le français en cage »)… Il faut bien vivre !

Mais cette ambivalence est, à la base, la nôtre : on peste contre les fautes des autres et on déteste les redresseurs de syntaxe.

L’hebdomadaire Marianne n’a pas résisté au plaisir du balancier : après la chronique de Jacques Dion le 14 octobre, confortée par le courrier de plusieurs lecteurs, il remet le couvert mais pour charger les défenseurs du français, qu’il classe en « prétentieux », « pédago », « emmerdeur » et « businessman ».

C’est l’heure pour l’animateur de ce blogue, de se remettre en question. Quel est-il ?

Plutôt que de demander à mes lecteurs de voter – ce qu’ils ne feront pas car ils sont pour la plupart anonymes, invisibles et muets – je préfère me classer moi-même dans la catégorie « pédago ».

Voici ce qu’en dit le journal :

« Les pléonasmes lui irritent l’oreille. Les participes dépassés lui piquent les yeux. Irréductible défenseur de la langue française, il souffre au plus profond de son âme lorsqu’on maltraite l’orthographe et la grammaire. Une faute, c’est une agression, confie l’un de ces amoureux de la langue, le lexicographe, ancien prof. d’anglais et musicien Jean Maillet, auteur du livre Langue française, arrêtez le massacre.

Souvent instit., prof. à la retraite, académicien, le pédago n’a qu’une patrie, la langue française, qu’un but, la protéger des assauts de plus en plus fréquents. Il boute les anglicismes hors du paysage orthographique, taille en pièces les expressions qui ne veulent rien dire, réhabilite les exceptions à la règle, sans violence aucune. Avec ce vrai passionné, pas de méchants traits de Bic rouge (encore que…), pas d’humiliation publique quand on prévoit à l’avance, on va mangé ou on acceuille un ami. Il décortique l’erreur, détaille le pourquoi du comment et donne les clés pour ne plus commettre le crime orthographique… En jouant ainsi avec les maux, le pédago délie la langue… ».

Je vous fais grâce de la description des autres catégories… entre autres parce que le découpage ne m’en semble pas très pertinent.

J’ai seulement relevé que, concernant le premier, « Personne n’ose le traiter de prétentieux de peur de se planter sur un accent » et qu’un tiers des recruteurs jetteraient les CV contenant plus de deux fautes d’orthographe. Ça m’a rappelé des choses…

Et je retiens surtout qu’il y a des affaires à faire autour du bien écrire et que cela n’a pas échappé à tout le monde (voir les stages, plateformes d’entraînement, certifications… déjà en place). Pour l’instant, mon blogue reste gratuit…

09/11/2014

Si vous y tenez vraiment...

L’idéal serait que la France crée les concepts, les théories, les techniques et les objets, qu’elle les nomme de façon rationnelle, ou en tous cas conforme aux racines et à la syntaxe de sa langue, et qu’elle les vende donc sous ce nom partout dans le monde. Les pays acheteurs, selon leur attachement à leur propre langue, utiliseraient ces objets sous leur nom français ou sous un nom traduit…

C’est utopique dans l’état actuel des choses.

Une solution sous-optimale, comme on dit en automatique, consisterait à ne nommer les nouveaux concepts et objets que quand un nom « à la française » leur aurait été trouvé, soit par une commission ad’hoc, soit par la sagesse populaire, en respectant par exemple les recommandations de l’Académie contenues dans la loi de 1991, dont j’ai parlé dans un billet précédent…

C’est une utopie aussi.

Une solution acceptable est celle qui propose un nom français, même après-coup, et rappelle le nom anglais entre parenthèses. Par exemple : « L’intérêt croissant pour la nouvelle forme de capital-risque qu’est le financement participatif (crowdfunding) redonnera-t-il aux épargnants français le goût du risque ? » (Le Revenu, n°1298 du 17 octobre 2014).

 

Malheureusement, ce qu’on lit la plupart du temps, ce sont des choses comme ceci : « Cette page contient exclusivement des exercices de Ear Training (littéralement "entrainement de l'oreille") axés sur la reconnaissance des modes » (site de vulgarisation musicale sur internet).

Non seulement l’auteur propose le terme anglais en premier – c’est-à-dire celui qu’il faut retenir, sans italiques – mais il nous fait l’affront de le traduire comme si c’était un idiotisme rare. En passant, il oublie le « î » et utilise l’affreuse expression « axés sur »…

08/11/2014

Dialogues d'en France

Cela fait un bout de temps que je vous avais promis un échantillon de la langue parlée dans la France dite « d’en bas », illustrant ainsi ce qui a été dit depuis des lustres par de savants esprits sur la distinction entre langue écrite et langue parlée, entre langue du pouvoir et langue du peuple, etc.

C’était motivée par l’écoute d’une émission de France Inter « Carnets de campagne » courant septembre 2014.

J’avais entendu un reportage sur une « épicerie ambulante » à Bourdeilles (Dordogne), qui me semblait représentative de la langue parlée actuelle.

Las…

Malgré la profusion de séquences à réécouter sur le site de France Inter et sur le site de l’émission elle-même, je n’ai pas été fichu de retrouver cet entretien… j’ai quand même passé une heure et demie à balayer tous les Carnets de campagne de septembre et d’octobre 2014.

En vain ?

Pas tout à fait.

D’abord l’animateur – Philippe Bertrand – s’exprime très bien : ni franglais ni hésitation ni blabla, un pro.

Ensuite les personnes interrogées ne parlent pas si mal que cela, j’avais fait un procès d’intention, tant mieux.

Je ne suis pas revenu bredouille pour autant. Voici quelques formules attrapées par mes hameçons.

« Tout le monde travaille sur la ferme », « nous proposons un lieu de vie sur Bourdeilles ».

« nous produisons… tout ce qui est viande… ».

« être en autonomie au niveau du chauffage, de l’eau… ».

« ils viennent juste visiter la ferme ».

« pourquoi la Foncière se propose de racheter la ferme ? » (au lieu de « se propose-t-elle »).

« Merci, Sylvie…

Avec plaisir ! » (curieuse façon de prendre congé).

« un label attractif » (au lieu de « attrayant »).

« les produits qu’on amène » (au lieu de « qu’on apporte »).

« ça nous permet de pouvoir… » (au lieu de « ça nous permet de… »).

« Le 6è forum du télétravail du Pays de Murat devient également le forum du coworking et des startups » (sans commentaires).

Ajoutons à cela le « France Télévision replay » et le « France Inter podcast », et on pourra se dire « pas de quoi fouetter un chat » (métaphore à examiner dans le bouquin de M. Fumaroli).