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17/10/2015

Désolé, Aël...

Hier, je dissertais sur la trouvaille de Philippe Bartelet, à propos d'une technique de reprise sauvage d'entreprise en difficulté.

Je ne me doutais pas que sa francisation de l'acronyme anglais, AEL, désignait aussi, et avec l'antériorité, l'Avenir électrique de Limoges, un fabricant de cartes électroniques...

Et aussi le logiciel de saisie en ligne des congés par les salariés de Sciences Po Paris (Absence En Ligne)…Également l'AE lock des appareils photos (automatic exposer lock)...

Et enfin, et surtout un prénom mixte : Aël, apparu à la fin des années 90  !

Dérivé de "Ange", il vient du grec "agellos", qui signifie "messager" et se fête le 5 mai.

Né à Jérusalem en 1185, Ange prend l'habit religieux chez les Carmes à dix-huit ans. Après des études à Rome, il va en Sicile prêcher contre les Cathares. C'est là, pendant son sermon, dans l'église Saint Jean de Licara, qu'il tombe mortellement blessé, le 5 mai 1220, atteint cinq fois par l'épée d'un seigneur incestueux dont il avait converti la fille. Réjouissant...

Clin d'œil : Ael est le pseudonyme que s'est choisi Léa Deleau qui chante en anglais. C'est l'anagramme de son prénom !

Allez, on n'abuse jamais des belles choses (façon de parler, naturellement). Je vous remets une photo de la Belle.Léa Deleau (Ael).jpg

 

16/10/2015

Achat à effet de levier (AEL)

Philippe Barthelet, que mes lecteurs connaissent comme chroniqueur du bien parler, a écrit dans le "Valeurs actuelles" du 8 octobre 2015 (rubrique "L'esprit des mots") un petit billet révélateur de ce qu'il faudrait faire tous les jours pour enrayer la progression du franglais.

C'était à propos du mot "Repreneur"...

Passons sur les variations autour de l'idée que l'on ne peut reprendre que ce qui nous appartenait...

P. Barthelet ironise sur "les courageux qui s'endettent doublement, et à l'égard du vendeur, et à celui de la banque prêteuse, dans les cas de LBO (leverage buy-out)". Cette pratique d'ingénierie financière, qui a fait florès et dont l'étoile pâlit depuis quelques années, consistait à emprunter pour acheter une société et à rembourser l'emprunt en dépeçant habilement la proie...

Foin d'économie-Rapetout ! Intéressons-nous à l'aspect linguistique de la chose.

Chanteuse Aël.jpg

 

P. Barthelet ajoute "que nous nous bornerons à traduire par AEL, Achat à effet de levier, ce qui revient, nous l'avouons sans peine, à franciser notre ignorance".

Ces deux remarques sont intéressantes :

  • d'une part il y a le réflexe et l'effort de traduire le terme anglais, et c'est fait là de belle manière puisque le résultat est compréhensible et se condense en plus en un acronyme qui ne le cède en rien à son cousin anglais !
  • d'autre part, P. Barthelet est bien trop modeste ! Il n'a pas "francisé son ignorance", sinon comment aurait-il été capable de traduire aussi intelligemment l'horrible expression anglo-saxonne ? Au contraire, il s'est fait expliqué le dispositif suffisamment pour être capable de lui donner un nom simple et conforme à notre langue.

 

C'est bien ainsi qu'il faudrait procéder, sachant que la plupart des nouveaux concepts et des nouveaux appareils nous viennent d'outre-Atlantique :

  • d'abord comprendre de quoi il retourne ;
  • ensuite trouver une dénomination française, pertinente et suffisamment simple (si les Américains, ce qui arrive souvent, ont trouvé un nom de baptême amusant, particulièrement concis ou évocateur, essayer de faire pareil) ;
  • et enfin, le plus difficile, diffuser très rapidement l'innovation, avant que le terme anglais ne soit adopté, afin qu'il soit utilisé largement (il y a un "nombre critique" de locuteurs, et avant tout dans les médias si snobs et si pressés, qui fait qu'en-dessous, le terme ne s'impose pas).

N'est-ce pas là la mission essentielle de l'Académie française ?

Nos hommes en vert, bien logés, bien chauffés, bien payés, si attachés à leur gloire et à leur confort, n'ont-ils pas tout le temps nécessaire pour plancher chaque mois sur les néologismes, et l'autorité suffisante pour diffuser leurs trouvailles ?

Mais à leur âge, peuvent-ils encore aller vite ?

07/10/2015

Apocopes et aphérèses

Il n'y a pas que l'anglais qui abrège et fait court ; le français aussi aime couper les mots pour aller vite. Et il coupe la fin de façon privilégiée (rien à voir avec la Veuve de 1793 ni avec les sachets protéinés !) : c'est l'apocope, c'est-à-dire la suppression des dernières syllabes des mots.

Bernard Pivot en cite de nombreux exemples dans son livre "Les mots de ma vie" (Albin Michel, 2011) : prof, instit, interro, labo, gym, ordi, prépas, Sciences Po, petit-déj (voire p'tit déj), ciné, télé, etc.

C'est cohérent avec le fait qu'en français, le déterminé précède le déterminant (on ne pourrait pas procéder de cette manière en allemand, où c'est l'inverse).

B. Pivot y voit parfois une irrévérence envers des substantifs "bien installés" : cathos au lieu de catholiques, socialos au lieu de socialistes, écolos au lieu d'écologistes, etc.

Il s'amuse aussi que même des noms propres soient l'objet de telles dissections : tout le monde a en tête Ségo et Sarko. Moi, j'aime particulièrement Jean d'O. Il y a aussi Libé, L'Obs, Saint-Trop...

 

guillotine_bunny.jpg

 

Normalement, on devrait placer un point (".") après le début du mot, pour remplacer les syllabes manquantes. Mais tant qu'à aller vite...

Le contraire de l'apocope, c'est l'aphérèse. Elle est plus rare : bus au lieu d'autobus, Ricains au lieu d'Américains.