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04/04/2020

Les mots du corona V

J’ai vu réapparaître – ou plutôt entendu – la curieuse expression « Ce serait raccord avec la nouvelle conception », mais ce n’était que dans la bouche du chroniqueur de France Inter, Thomas Legrand, le 2 avril 2020… Rien à voir avec le virus donc.

J’ai aussi entendu, le même jour, sur cette même radio, le représentant des Intermittents du spectacle déclarer : « C’est une réponse sur c’est quoi la politique publique », au lieu de « C’est une réponse à l’idée que l’on se fait de la politique publique », par exemple. Toujours pas de virus là-dessous… la (triste) réalité du langage bancal et insouciant manié par ceux qui causent dans le poste.

Ah mais oui, j’en tiens un des enfants lexicaux du COVID ! C’est le mot tracking, utilisé pour désigner une opération d’envergure qui consisterait à suivre les gens dans leurs déplacements ou leur confinement. Naturellement le mot français « suivi » ne sonnerait pas assez moderne, trop pépère sans doute. Quant à « surveillance », n’y songez pas, ce serait caractériser exactement ce qui se passerait en pratique !

Bon sang, mais c’est bien sûr, j’en tiens un autre : drive. Il s’agit là d’accoler à une tâche rébarbative et passive – prendre sa voiture pour aller récupérer un panier-repas dans un entrepôt (je caricature) – une image oh combien romantique : celle d’un Américain jeune, beau et amoureux, qui dans la voiture de ses parents regarde un film sur écran géant avec sa petite amie.

Comme je n’avais pas de papier sous la main, j’ai griffonné ces quelques découvertes linguistiques sur un vieux numéro de Les Échos Week-end qui traînait sur la table du salon. Je regarde la manchette, machinalement ; il est écrit en Une : « Les dernières fashion weeks ont placé la responsabilité environnementale au centre du propos et le secteur du luxe se met en ordre de marche »… Que c’est loin tout cela !

Aujourd’hui le secteur du luxe fabrique du gel hydro-alcoolique...

02/04/2020

Le franglais tel qu'on le parle

Lu dans LinkedIn, sous la plume de M. Morisson, ce chef d’œuvre de langue moderne : « Hier s'est tenu notre évènement autour de l'IA et du recrutement (...) Nous avons eu l'occasion d'aborder la question du matching Learning, de l'analyse des micro-expression (sic) du Language ou encore de la manière dont les entreprises pouvaient penser à leur organisation via le monitoring de compétences. Pour l'instant l'IA n'est pas parfaitement au points (sic) (comme le souligne Jean-Christophe, il n'y a qu'à observer les annonces que push Linkedin pour s'en apercevoir). Mais encore combien de temps avant que les choses évoluent ? Marianne soulignait à juste titre que la data avait bousculé la méthode de chasse de tête (sic). Désormais, plus de papier tout est sur internet. Jamais le personnel branding n'a été aussi important ».

No comment, guys.

28/03/2020

Les mots du corona IV

Si ce n’était pas si triste, on en rirait à gorge déployée !

Car l’épidémie de Covid-19 contamine le vocabulaire quotidien dans des proportions qui confinent (!) à l’absurde.

Il y a la langue embarrassée des politiques : Mme Ndiaye nous parle « en bon père de famille » (où est passée l’écriture inclusive ? Terrassée par le peu de gel hydro-alcoolique qui traîne ?). À propos d’écriture inclusive, voici une relance d’une Grande École parisienne à ses étudiants : « Message aux diplômé-e-s : vous avez été sollicité-e-s pour répondre à une enquête, etc. ». Le rédacteur englobe, non seulement le féminin et le masculin, mais aussi le singulier et le pluriel, puisque, s’adressant à chaque étudiant, il aurait pu se contenter d’écrire « vous avez été sollicité-e ».

M. Édouard Philippe a décidé que les marchés ouverts seront fermés… Et il use et abuse de l’expression « les Outremers ».

Dans la même veine, la piscine d’une ville de banlieue parisienne a affiché : « Fermée pour cause de fermeture » !

Un chroniqueur de Cnews, le 25 mars 2020, vers 19 h 40, a déclaré que les mesures avaient été prises « un peu hard ». Comme un confrère lui soufflait l’expression bien connue « à la hussarde », il a bredouillé « merci, je cherchais le mot ». Si c’est du snobisme, c’est ridicule (qu’il ne croie surtout pas que cela épate la France des ronds-points!), si c’est réel, alors c’est grave pour notre langue (et pour l’élite qui l’oublie). Quelques minutes plus tard, sur la même chaîne, quelqu’un soulignait la transition vers le sujet suivant en s’esclaffant : « quel teasing ! ».

Et c’est comme cela tous les jours que Dieu fait...