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22/08/2020

Les mots français à la mode XIV

En ce mois d’août, plus que jamais, les mots « confinement » (initialement réservé au Premier Ministre français) et « déconfinement » (initialement réservé au Président de la République française) sont sur toutes les lèvres. On peut y ajouter bien sûr « reconfinement ».

Il y a naturellement tous les mots liés à la pandémie : charge virale, foyer de contamination (les journalistes disent cluster), relocalisation (j’ai déjà dit ici ce que j’en pensais)…

Lu dans le courrier des lecteurs du site « Riposte laïque », ces dénonciations d’abus linguistiques : « cellezetceux », « résilience » (alors que la plupart du temps « résistance » suffirait) et « agenda » (dans le sens incorrect de « calendrier », « programme », « échéancier »), « challenge » à la place de « défi », « coach » à la place de « moniteur » ou « entraîneur », « atteignable » à la place d’ « accessible ».

Une dame conspue les films et séries dans lesquels des femmes déclarent « je me suis permise de… » ou « je me suis faite violer », alors qu’elles diront : « ça m’a surpris ». C’est cela sans doute le nouveau féminisme linguistique…

Revenons cinq minutes sur les tics des politiques : « Parisiennes,  Parisiens » (à rapprocher du « cellezetceux » macronien) et, depuis le 4 août 2020, « Les Libanais et les Libanaises » (député LAREM du Morbihan, arrivé à Beirouth dans les bagages du Président). Du même, après le discours présidentiel : « sur la table », « à ce stade », « pour autant »…

19/08/2020

Les mots français à la mode XIII

Samuel Piquet m’aide à compléter ma collection de mots à la mode dans le numéro du 17 janvier 2020 de Marianne : « briser un tabou », « libérer la parole », « casser les codes », « faire bouger les lignes » sont devenus des tics de langage des journalistes et s’ajoutent à « renverser la table » et à d’autres. Le problème n’est pas tant dans les expressions en tant que telles mais dans leur utilisation à longueur d’article et surtout, nous dit Samuel Piquet à propos du mot « tabou », dans le fait qu’il désigne un sujet qui n’en est plus un la plupart du temps et que souvent il est employé pour parler d’une attitude qui peut choquer (une minorité quelconque ?) et dont on hésite à débattre, sans s’occuper de la question de fond sous-jacente. La bien-pensance et l’hypocrisie généralisée, une fois de plus. Et notre spécialiste du jeu de mots et du calembour de conclure : « En réalité, on est très loin d’avoir réussi à mettre ce qu’il faut taire à terre. Plus dur sera le chut ! ».

L’autre chroniqueur, Benoît Duteurtre, m’aide bien également. Le 10 janvier 2020, il s’attaquait à l’insupportable « On est sur » (sans accent circonflexe). Voici le bulletin météo qui a déclenché sa chronique et son commentaire ironique sur l’empilement improbable de « on », de « phénomènes » et de « région PACA » : « On est sur une répétition de phénomènes sur la région PACA ». J’ai déjà parlé dans le blogue de cette manie d’utiliser « sur » à tout bout de champ au lieu de « à » (« Je rentre sur Paris »…). Mais ici cela va plus loin. Le dernier « sur » est l’objet de mon ire passée, le premier est encore pire : c’est l’utilisation de « on est sur », jadis la chasse gardée des sommeliers (« on est sur un Pinot noir avec des arômes de banane »), puis des restaurateurs (« on est sur un écrasé de pommes de terre ») et aujourd’hui la chasse de tout le monde (« on est sur du Sarkozy bas de gamme », Julien Bayou du parti EELV). « C’est ainsi que la langue s’alourdit, se complique et s’obscurcit » tandis qu’on utilise l’anglais (le franglais) au motif qu’il serait plus simple et plus rapide).

12/08/2020

La langue de chez eux

Il y a en France, une école qui s’appelle « Ipag Business School ». Pourquoi donc ? Si « école de commerce » semble daté et ne représente plus convenablement ce qu’il convient d’enseigner aujourd’hui (ces écoles se piquent de « management »…), pourquoi ne pas avoir choisi, par exemple, « école des affaires » ? J’ai ma petite idée : d’abord un nom anglais fait plus moderne et ensuite « des affaires » a en français une connotation péjorative (parce que notre culture est plus tournée vers la conception et la production que vers le mercantilisme et parce que les « affaires » défraient la chronique, sans parler de l’« affairisme »).

Ce n’est pas tout ; dans cette école, il y a un directeur de la chaire (tiens, un mot français ancien…) « French Savoir-faire » !

Donc, comme j’ai l’habitude de le dire : anglais à tous les étages.

Pourtant, dans le Marianne du 1ernovembre 2020, un entrepreneur français (Pierre Schmitt, de VELCOREX) confie : « On ne peut innover que dans la proximité, la culture d’entreprise. On ne peut pas trouver un langage commun en anglais avec des Chinois par mail ».

Qui se souviendra dans un an ou deux de la « start-up nation » rêvée par M. Macron ? C’est une mascarade disent l’ingénieur Benjamin Zimmer et le sociologue Nicolas Menet dans leur livre « Start-up : arrêtons la mascarade » (Dunod, février 2018).

Dans le même numéro de la revue, David Soulard, des meubles Gautier, défenseur de la production en France (en l’occurrence en Vendée) dit aux journalistes : « On a décidé d’intégrer vraiment le made in France, dans notre story-telling il y a quatre ans » (quatre mots anglais dans une phrase de douze). Pourquoi ?