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29/12/2014

Dis pas ci, dis pas ça (XI)

Par manque d’anticipation, j’ai loupé la publication du billet quotidien le dimanche 28 décembre 2014… ce qui est rassurant et très satisfaisant, c’est que votre fidélité, Public, n’en pas été affectée, puisque vous avez été 59, exactement comme la veille, à consulter le blogue ; certains d’entre vous en ont peut-être profité pour rattraper leur retard en lisant d’anciens billets qu’ils n’avaient pas vu… Tant mieux.

Mais il est temps de reprendre les choses en main.

Voici donc le I d’Océan atlantique, ou plutôt la suite du I, en tant que billet du 28.

 

Commençons par « improbable », qui signifie « qui a peu de chances de se produire ». L’Académie, tout en citant Michelet « ville improbable » et Maigret « adresses improbables », s’insurge gentiment contre le tic de langage qui met cet adjectif à toutes les sauces (personnage improbable, dénouement improbable…). Les journalistes en sont friands. L’argument des Immortels est intéressant : « Les mots meurent de n’être pas employés mais s’ils le sont à mauvais escient, ils perdent saveur et vigueur ». Seul hic : comment demander à 150 millions de francophones de ne pas « abuser » d’une formule que Michelet et Simenon ont employée et qui est correcte ? Si tout le monde usait et abusait des tics de Bach ou de K. Jarret, faudrait-il confisquer les pianos ?

 

Patrick Cohen.jpgBien plus gênant, à mon avis, est la construction interrogative indirecte incorrecte. Mais là encore, l’Académie se trompe de débat : elle pointe du doigt des phrases comme « Dites-nous quand reviendrez-vous » (il faut dire « Dites-nous quand vous reviendrez »… phrases que je n’ai jamais entendues. Alors qu’à longueur d’antenne (si l’on peut dire…), on entend la faute inverse, à savoir : « Ce rôle vous a appris quelque chose ? » (au lieu de « Ce rôle vous a-t-il appris quelque chose ? ». Le champion de ce type d’incorrection, dans ceux que j’écoute : David Pujadas, sans doute ; ceux qui parlent bien : Patrick Cohen, Laurent Delahousse. Entendu à la radio le Président de la République (François Hollande) dire "Pourquoi la Gauche ne la voterait pas ?", au lieu de "Pourquoi la Gauche ne la voterait-elle pas ?" (France Inter, la matinale, 5 janvier 2015)

 

Je passe sur l'imitation de l’anglais « to introduce someone to someone else » à la place de « présenter quelqu’un à quelqu’un d’autre », c’est du franglais snob de bas étage.

 

Bien plus sérieux est l’emploi du verbe « être » à la place du verbe « aller » dans des constructions comme : « Il a été à Paris » au lieu de « Il est allé à Paris ». Il y a plus subtil : « Ce rôle lui aurait bien été », au lieu de « Ce rôle lui serait bien allé ». « Il est mieux », au lieu de « Il va mieux ». Au restaurant, le serveur demande « Ça a été ? », au lieu de « Ça vous a plu ? » ou mieux « Cela vous a-t-il plu ? ».

 

Billet amendé le 5 janvier 2015, 12 h 30

27/12/2014

Dis pas ci, dis pas ça (X)

Si je me limitais au « G » aujourd’hui, je n’aurais que deux mots à vous signaler…

D’abord gérer, qui est devenu un mot passe-partout : à la fois ça fait bien (moderne) de « gérer », et ça dispense de chercher le mot juste, pour aller vite (encore une fois, moins on cherche le mot juste, plus on perd l’habitude de le trouver !). On peut naturellement « gérer ses affaires », on peut gérer tout ce qui est matériel, dans le sens de « administrer », « veiller à la bonne marche de ». Mais évitons d’utiliser « gérer » pour son divorce (là, il y a une solution : ne pas divorcer…), pour ses échecs, ses doutes et, pis encore, ses enfants (là aussi, il y a une solution mais ce serait dommage de ne pas en avoir). Pire que tout, l’ellipse « je gère »…

 

Ensuite, « gré » : on sait gré à quelqu’un de…, on saurait gré, on saura gré et non pas « on sait gré » ! « Gré » s’emploie avec le verbe « savoir » et non pas avec l’auxiliaire « être ».

 

Du coup, j’enchaîne avec le « h ».

Je commence avec les liaisons dangereuses : il y a des « h » d’origine germanique qui sont aspirés et des « h » d’origine gréco-latine qui ne le sont pas. Le « h » de « haricot », comme celui de « handicap », est aspiré, il interdit donc la liaison, au singulier comme au pluriel, et cela a des conséquences sur la graphie aussi bien que sur la prononciation : on écrira « le haricot » et « un beau haricot » (et non pas « l’haricot » et « le bel haricot »).

 

« Impacter » est encore une forme inspirée de l’anglais ; ne l’employons pas à la place de « affecter » ou « modifier ».

25/12/2014

Dis pas ci, dis pas ça (IX)

Traîneau du Père Noël.jpgÀ la lettre N, l’Académie ne parle pas de Noël… Elle ne dit pas grand-chose d’ailleurs ; ça tombe bien, vous avez mal à la tête, le billet sera court.

Pas, point, guère, jamais… ne sont pas vraiment des marques de négation (pas plus que goutte, mie, etc. que l’on utilisait auparavant). La vraie marque de négation, c’est « ne », qui s’emploie en association avec l’un des mots précédents. « Je ne veux pas », « Je ne sais pas », et non pas « Je veux pas », « Je sais pas » comme on l’entend souvent. L’Académie, qui est souvent bonne fille, parle ici de « véritable faute ». À bon entendeur…

Je vous fais grâce de l’accord par syllepse… Vous savez, la question de savoir si on dit « Une quinzaine d’euros suffiront » ou bien « Une quinzaine d’euros suffira ». Retenez que, en pratique, on fait ce qu’on veut.

Contrairement à ce que l’on dit souvent, « aller en Avignon » n’est pas une forme recommandée mais une survivance du provençal, qui distinguait, comme le latin et l’allemand, « être à » et « aller à » et remplaçait le « a » du deuxième cas par un « an » euphonique. Il n’est donc pas question de généraliser cette forme à Amiens ni Arras.

Enfin, l’Académie recommande de ne pas abuser des constructions américaines avec « non » pour créer des mots nouveaux : oublions « non-profit », « non-événement » et autres « non-match ». Remarquons qu’un tiret relie les deux mots. Personnellement, quand « non » précède un adjectif (« une algèbre non commutative »), je ne mets pas de tiret.