Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

22/05/2015

Cécile et le hamster

Mon billet "Cécile, ma sœur" a suscité deux commentaires, dont un seul a été rendu public.

FPY d'abord y a vu l'annonce d'une devinette à venir et y a d'ailleurs répondu in petto.

Impressionnant car quasiment non causal : l'effet précéderait donc parfois la cause ?

Ma réaction est évidemment "Chapeau" mais aussi "Pourquoi ne pas répondre d'abord à la devinette en cours, celle du hamster érudit ?".

De son côté ICB  a trouvé anormal que les extraits annoncés du livre de Mme Ladjali ne figurent pas dans le billet...

C'est parfaitement justifié ! Je fais amende honorable, j'ai été débordé par divers travaux non intellectuels.

Relisez le billet d'aujourd'hui ; je l'ai complété.

Et demain, d'autres extraits seront disponibles...

 

19:29 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (1)

Cécile, ma sœur (I)

Mettant en parenthèse provisoirement "Passion arabe", j'ai rouvert l'autre fois, pour t'en faire profiter, public, le livre de Cécile Ladjali astucieusement intitulé "Mauvaise langue". Il a été publié en 2007, l'année où la France a préféré Nicolas à Ségolène ; autant dire que ça ne date pas d'hier.

Or de quoi parlait donc cette enseignante de français dans un lycée de Seine-Saint Denis, agrégée de lettres modernes et par ailleurs auteur de romans ? De la langue française, et de ses difficultés à enseigner la littérature, elle qui ne jure que par les classiques. De ses initiatives et de ses succès aussi.

Et de culture, de théâtre, de poésie... le tout avec conviction, idéalisme, enthousiasme et même passion.

Il y a tellement de passages du livre qui résonnent avec les thèmes de ce blogue, que je me propose de vous en donner plusieurs extraits dans ce billet et les suivants.

Je commence.

"Tous les moyens de l'esprit sont enfermés dans le langage ; et qui n'a point réfléchi sur le langage n'a point réfléchi du tout". À suivre cette pensée du philosophe Alain, le maître des élèves et de leurs professeurs, l'homme se trouve fort démuni s'il n'a pas les mots. Car sans les mots il est impossible d'envisager un rapport serein au monde, aux autres et à soi-même. Sans les mots, l'existence est inhumaine. Le malaise de la jeunesse est qu'elle semble être de moins en moins en possession d'une syntaxe, d'un vocabulaire riche et varié. Aussi n'est elle plus dans la disposition de dire qui elle est ni ce qu'elle désire. Cette absence de parole signifiante, cette incapacité à formuler, est dramatique. Car la jeunesse étant ce que notre monde sera demain, il est inquiétant de penser que ce dernier risque de se construire sur du vide ou, pire encore, sur des paroles non prononcées.

C'est en quelque sorte la thèse du livre, bien exposée dès l'exorde. La suite n'est pas toujours du même tonneau (je parle de la forme) car Mme Ladjali s'exprime parfois de façon quasiment poétique et elliptique.

Son livre, j'allais oublier de le dire, avait reçu le prix du jury Fémina pour la défense de la langue française.

 

20/05/2015

Brazzaville-Los Angeles via Paris

Alain Mabanckou prix Renaudot 2006.jpgAlain Mabanckou, originaire du Congo-Brazzaville, est professeur de littérature française à l'Université de Californie à Los Angeles. Il a obtenu le prix Renaudot en 2006 pour ses "Mémoires de porc-épic".

Dans le Marianne du 17 avril 2015, il était invité à donner son point de vue sur le thème "Et si on aimait la France", thème choisi par l'hebdomadaire à l'occasion de la sortie du livre posthume du regretté Bernard Maris.

 

Et voici ce qu'écrit Alain Mabanckou sous le titre "L'illusion du prétendu déclin", qui frôle le pléonasme, soit dit en passant :

"Dans mon pays natal, c'est par le biais de la langue française que je me suis ouvert au monde...

J'ai donc embrassé la culture française, non pas avec mon arrivée en France à l'âge de 20 ans mais depuis ma terre natale où la langue française - qui est évidemment le moyen de locomotion de la culture française - est une langue qui se mêle aux congolaises au point que, dans notre esprit, elle a toujours été une langue africaine comme une autre...

Rien pour les Français n'est, par principe, exclu de la discussion et surtout de la contradiction? C'est ce côté parfois théorique et discursif qui m'enchante. C'est cette inclination pour la nuance et la contradiction qui m'émerveille.

Et puis, il y a surtout ce "génie français" qui se fonde sur des choses immatérielles, les idées, le néant, alors que ma culture d'origine privilégie le concret, l'image dans sa crudité et qui refuse de se couvrir du voile trop encombrant des "effets de langue".

Il n'y a pas - ou il y a peu - de synonymes dans la langue bembé, celle de ma mère. Parce que nous n'en avons pas besoin devant la profusion d'images que nous pouvons déployer afin de dire le monde...

C'est donc, au fond, la langue qui explique mon amour pour la France, parce qu'elle porte en elle ce que j'idéalise : la liberté de la pensée, le droit à la contradiction et la possibilité qu'elle a d'être compatible avec mon identité congolaise."

Alain Mabanckou.jpg

 

Avec de tels avocats, on est sûr qu'à la fin "c'est la France qui gagne".

Il n'y a rien à ajouter !