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07/05/2015

Irritations XIII : Kouchner, RFM… pas Dac !

Le 20 mars 2015, Bernard Kouchner commentait l'actualité sur France Inter dans la Matinale. Pour parler de la nécessité pour les pays émergents de se construire, il a employé le terme "nation building"… Pourquoi ? Sans doute pour paraphraser le fameux "team building" des managers à la mode… Pour l'un des créateurs des french doctors et du droit d'ingérence humanitaire, c'est ridicule.

Hier matin, 7 mai 2015, je crois que c'était sur RFM, on proposait aux auditeurs d'envoyer leur playlist, c'est-à-dire leur liste de chansons, leur programmation, qui passeraient ainsi telle quelle à l'antenne. Dans un autre registre, on sollicitait aussi leur "météo locale" de façon à établir des bulletins météo "réels". À cela deux commentaires : sur le fond, si les bulletins météo consistent désormais à lire aux auditeurs les températures qu'ils ont eux-mêmes relevées sur le balcon, quel intérêt ? Où sont donc la prévision et l'anticipation ? Sur la forme, ce dont on parle, ce n'est pas de la "météo" mais tout simplement du temps qu'il fait ! La météo, c'est une discipline scientifique et non pas la couleur du ciel ou le vent qui souffle. Voir mon billet Dis pas ci, dis pas ça sur le sujet (la lettre M).

Pierre Dac.jpgDans le Marianne du 6 février 2015, Alexis Lacroix consacrait sa chronique à l'irrésistible et regretté Pierre Dac, immortel créateur, avec Francis Blanche, de Furax, et grand humoriste loufoque et pataphysicien. Il décrivait ainsi le génie de Pierre Dac, sans doute par référence à des contre-exemples contemporains : "une absence de recours à la méchanceté gratuite, un mépris assumé des grincements du bashing ou des grégarités du conformisme". Outre la lourdeur et la pédanterie de ce commentaire, on peut noter l'utilisation du mot à la mode "bashing", inconnu à l'époque de gloire de Pierre Dac (les années 50-60), introduisant ainsi un anachronisme ridicule.

Pierre Dac, auteur de discours délirants (même dans "le Petit Baigneur" de Louis de Funès) et même d'un programme permettant de les produire automatiquement, aurait bien ri de cet hommage ampoulé…, lui qui avait dit, entre autres : "Il est démocratiquement impensable qu'en république, il y ait encore trop de gens qui se foutent royalement de tout".

Et "Il faut qu'une porte soit ouverte... ou d'une autre couleur".

06/05/2015

Angine

Gaz de France SUEZ.jpgMon fidèle lecteur FPY s'étonne que je n'ai pas encore réagi au nouveau nom de GDF Suez, géant de l'énergie qui devient ENGIE.

C'est vrai. D'une part je ne l'ai appris que récemment, d'autre part je suis fataliste (eh oui…) sur cette affaire des noms de marque, achetés à prix d'or aux agences de comm. et devenus une sorte de point de passage obligé pour les dirigeants de multinationales qui veulent faire parler d'eux, paraître moderne ou peut-être cacher quelques turpitudes.

Parlons-en donc, puisque FPY le demande !

 

 

Dès la fusion voulue par Dominique de Villepin et réalisée très laborieusement en 2005, GDF Suez n'était plus ni une entreprise publique ni une entreprise française. Dès lors pourquoi s'étonner ou s'inquiéter qu'elle choisisse un nom plus ou moins français ou plus ou moins anglo-saxon ?

Gaz de France.png

Le sigle GDF n'était pas utilisé par Gaz de France à l'époque parce que cette marque était déposée (par quelqu'un d'autre). C'est pour cela que l'on parlait d'EDF et Gaz de France, au temps de l'héritage de la Libération et des grandes lois de 1946.

 

 

 

Tout cela a été balayé par l'absorption de Gaz de France par SUEZ, conglomérat belgo-français incluant déjà Electrabel en Belgique et maintenant une filiale en Grande Bretagne ; rien que du meccano industriello-politique habituel, mais dont l'originalité était que Nicolas Sarkozy avait juré ses grands Dieux (lesquels ?) que Gaz de France ne serait jamais privatisée, avec sa célèbre formule : "C'est clair, net et précis"… 

GDF pas privatisée.jpg

SUEZ, c'est une histoire industrielle et financière plus que centenaire puisqu'elle remonte au canal de Suez. Un journal avait ainsi pu titrer "les sept vies de SUEZ".

Bref, si l'on réfléchit un peu : que faire de GDF dont on veut se débarrasser depuis le début ? que faire de SUEZ qui des Pyramides à l'eau, en passant par les travaux publics, ne veut plus rien dire ? que faire de ce sigle hétéroclite et imprononçable ? En changer, tout simplement !

Le nouveau sigle est-il à consonance anglaise ? Sans doute mais pas plus que de nombreux autres. Pour moi, c'est un enfumage de plus, un enterrement de première classe pour les deux entreprises ; on rebat les cartes et on passe à autre chose.

On ne sait pas comment le prononcer, dit-on… C'est vrai mais pas plus que Avoriaz ou Cassis.

Moi, ça m'évoque les Rolling Stones, avec leur scie commerciale et pleurnicharde. Et c'est là que le coup de M. Mestrallet trouve ses limites, lui qui voit dans le sigle "Un nom simple et fort, qui évoque l’énergie pour tous et dans toutes les cultures". Il est bien le seul.

Joueuse Gaz de France.jpg

FPY me fait remarquer que le site "Boulevard Voltaire" m'a brûlé la politesse sur ce coup-là. Je l'admets volontiers et suis allé y voir. Ce qui m'a surtout intéressé dans l'article, c'est qu'ils évoquent mon autre dada : les petites phrases qui accompagnent les sigles, que le journaliste-pourfendeur de franglais appelle les punchlines.

Voici ce qui est écrit à propos de celle de ENGIE :

Bon, le plus beau vient après. Avec le slogan idoine, la punch line adéquate : « By people for people », ce qui ne veut à peu près rien dire, mais qui en jette. Ça aussi est censé être compréhensible par le commun des petits Terriens : « Par le peuple et pour le peuple », ou un truc approchant. Oui, il paraît que l’heure est à la mondialisation, ce qui n’est pas fondamentalement faux. Mais dans cette mondialisation, on avait cru comprendre que la « marque France » était aussi un atout de première ampleur. Il est à craindre que non. Alors, pourquoi le faire en « english » ; pardon, en « globish », puisque c’est de ce sabir n’entretenant que de lointains rapports avec la langue de Conan Doyle qu’il s’agit désormais ? Good question. Pareillement, il sera tout aussi licite de se poser la question qui suit : why toutes ces sociétés censées porter le savoir-faire français de par le vaste monde communiquent-elles toutes in english ? Citroën ?« Creative technologie »… Peugeot ? « Motion and Emotion ». Lacoste ? « Life is a beautiful sport »

On en apprend tous les jours, c'est ça qui est bien avec la pub.

À propos de pub, vous avez vu que Renault, dont le président s'augmente dans des proportions indécentes, sans contre-pouvoir, a osé faire diffuser une pub entièrement en anglais, sous-titrée ?

05/05/2015

Passion arabe, chronique des années 2011-2013

Gilles Kepel est connu par ses interventions à la télévision en tant qu'expert de la géopolitique des pays arabes, du Maghreb au Moyen-Orient.

De 2011 à 2013, à partir des "révolutions" populaires que l'on a appelées le "Printemps arabe", il a multiplié les visites dans les pays concernés : Égypte, Tunisie, Libye, mais aussi Israël et l'Arabie Saoudite, et d'autres.

Arabophone, comprenant apparemment certains dialectes, il a rencontré nombre de responsables, politiques, associatifs ou religieux.

Gilles Kepel.jpgCela a fourni la matière de son livre "Passion arabe", dont je vous ai donné plusieurs extraits dans des billets précédents.

Son Journal est passionnant d'abord parce qu'il éclaire l'actualité récente, vue des acteurs et spectateurs et non plus des Occidentaux que nous sommes ; on apprend beaucoup de choses sur l'envers des événements que la télévision nous a montrés : la chute de Kadhafi, l'ascension d'Ennahrdha, les Frères musulmans, l'influence des Saoudiens...

Également parce que Gilles Kepel ne juge pas, ne prend pas parti, tout en retranscrivant des propos que manifestement il n'approuve pas.

Et enfin parce que les questions de langue l'intéressent et qu'il y voit la manifestation des évolutions du pouvoir et des peuples : l'arabe bien sûr, avec ses différentes variantes régionales, mais aussi le français, qui perdure malgré l'arabisation, et le berbère, antérieur aux deux précédentes.

Pour qui s'intéresse au destin du Maghreb et du Moyen-Orient, qui s'interroge le développement du salafisme, qui veut comprendre les différences de conviction ou de stratégie entre les mouvements islamistes, et qui, in fine, craint l'importation de ces conflits dans les démocraties occidentales, ce livre bien écrit (malgré quelques formules syntaxiques étranges et un vocabulaire qui demande parfois le recours au dictionnaire) est à lire. Et il se lit bien.

Il est accompagné de deux volumes beaucoup moins épais : "Passion française" (enquête dans les banlieues) et "Passion en Kabylie", le tout chez Gallimard, en 2013.

Voici ce que dit de lui Wikipedia :

Il est diplômé d'arabe et de philosophie, il a deux doctorats, en sociologie et en science politique. Il a aussi enseigné à la New York University en 1994, à l'université Columbia, également à New York, en 1995 et 1996, et comme titulaire de la chaire Philippe Roman (professor of History and International Relations) à la London School of Economics en 2009-2010.

Auteur de nombreux ouvrages, depuis son premier livre Le Prophète et Pharaon : les mouvements islamistes dans l'Égypte contemporaine, paru en 1984, ses publications sont traduites dans le monde entier.

Dans son ouvrage Jihad (2000), il étudie le développement de l'islam politique, et considère que sa radicalisation est un signe de déclin plutôt que de montée en puissance. Il maintient sa thèse dans la mise à jour après les attentats du 11 septembre 2001, et la poursuit en 2004 avec Fitna, dans lequel il présente l'islamisme comme une forme de guerre civile au cœur de l'islam.

Il collabore régulièrement au Monde, au New York Times, à La RepubblicaEl País et à plusieurs médias arabes.

Depuis janvier 2012, Gilles Kepel tient une chronique le jeudi matin sur la radio France Culture intitulée Le monde selon Gilles Kepel consacrée au monde arabe contemporain après les révolutions et bouleversements de l'année 2011.

Il est membre du haut conseil de l'Institut du monde arabe et directeur des études au programme sur le Koweït (Kuwait Program) à l'IEP.

 

En mars 2012, il est nommé pour deux ans au Conseil économique, social et environnemental dans la section du travail et de l'emploi en qualité de personnalité associée.