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24/12/2015

N'est pas digne neveu qui veut !

Désolé, public, mais c'est encore une histoire de l'homme qui a vu l'homme qui a vu l'homme… Comme c'est autant hilarant que désolant, je ne peux pas m'empêcher de relayer cet épisode politico-linguistique.

Il s'agit du "compte rendu" du séminaire gouvernemental consacré à la préparation du débat sur l'identité, organisé, comme chacun sait, pendant le quinquennat de Nicolas Sarkozy. On a peine à y croire, tant, sur un sujet pourtant on ne peut plus sérieux, des ministres aussi en vue que Frédéric Mitterrand, Bernard Kouchner et Nadine Morano, s'ingénient à accumuler lieux communs (dans le meilleur des cas), propositions sans intérêt, voire bêtises sans nom...

Je ne vais rapporter ici que ce qui concerne la langue, de près ou de loin.

Le "neveu de." a sans conteste la palme. Songeons qu'à l'époque, il est Ministre de la Culture...

Nadine Morano ayant déclaré : "… je voudrais rajouter My Way de Claude François à Douce France de Charles Trenet comme symbole de notre identité nationale", Frédéric Mitterrand continue comme suit : "Il faut aussi rappeler qu'être français, ce n'est pas forcément parler français (sic !). La France, ce n'est pas la langue française (re-sic !). Le monde entier connaît la France à travers les mots de French Doctors (NDLR : gentillesse à l'égard de Kouchner, on ne sait jamais). De même, nous avons oublié de parler de la télévision, et de la contribution de l'émission Star Academy à notre identité (re-re-sic !)".

Oui, vous avez bien lu : ces deux ministres de la République entendent illustrer l'identité française par des "faits culturels" en anglais ! L'une a l'air de croire que Claude François est un compositeur américain et l'autre ignore tout bonnement l'article 2 de la Constitution de 1958 ("La langue de la République est le français").

Pour le neveu de., la France, ce n'est pas la langue française, lui, le Ministre de la Culture ! Il semble donc croire que l'on peut être français et vivre en France, et parler une autre langue… (Il est vrai que des événements récents - les prêches en arabe dans certaines mosquées et le discours d'investiture d'un élu de la République prononcé en corse - semblent lui donner raison…). Le cher oncle doit se retourner dans sa tombe.

Ces notes de réunion difficiles à croire sont rapportées dans le livre "Au cœur du volcan" (Flammarion, 2014) de Maxime Tandonnet, conseiller pour la sécurité au cabinet de l'ancien Président, lui-même cité dans "La seule exactitude" d'Alain Finkielkraut (Stock, 2015). Alain Finkielkraut conclut, lui : "Ce que cachent les éléments de langage consciencieusement empilés à la télévision, ce n'est ni la grande politique ni la politique inavouable, c'est le vide".

Pas tous pourris mais tous nuls ?

Sapin de Noël.jpg

 

 

 

 

À part cela, joyeux Noël à tous !

 

 

 

 

 

PS. Claude François a co-composé la célèbre chanson "Comme d'habitude", suite à une rupture sentimentale. Elle fait partie du très petit nombre de chansons françaises, avec "La mer" et "Et maintenant" à être reprise par les grands de la chanson américaine, donc mondiale, comme Franck Sinatra, et à être devenue un standard.

21/12/2015

Au revoir, Princesse...

"J'attends un signe. Rien ne vient. Et c'est l'enfer sur terre. Je sors de chez moi. Le fond de l'air en est modifié. Au premier pas dans la rue, j'embrasse l'espace des yeux. Je cherche, je scrute. Débute alors la plus triste des parties de cache-cache. Je regarde vers la place de Breteuil, je fouille l'horizon dans l'axe du métro aérien. Derrière le lycée Buffon, dix façades hétéroclites se chevauchent, montent à l'assaut d'un brouillard carbonique. Rien.

C'est pourtant par là qu'elle arrivait lorsqu'elle venait me voir en trottinant dans ses boots en daim. Ou elle m'attendait sur le banc en face de l'immeuble, les jambes croisées, un châle de cachemire sur les épaules. Le banc est vide, trop vide, le vide n'existe pas, il n'est qu'un signe.

Je traverse la pelouse de l'esplanade de Breteuil. Le ciel est bas, spongieux. Le vertige me prend, je presse le pas, afin de retrouver un peu de droiture. Arrivé à la station Duroc, l'angoisse passe dans mes cheveux. Tout est grisaille, attente, asservissement au néant.

… Saint Sulpice.jpg

J'en suis revenu au point de départ, celui d'une autre vie, maintenant. Le Paris d'avant Ava, celui qui me préparait le terrain et dépliait ses rues pour que je la rencontre un jour a changé. Mais la rue de Rennes descend toujours en pente douce jusqu'à Saint Germain des Prés. Tourner à droite, vers l'église Saint Sulpice. Longer les grilles du jardin du Luxembourg, rue de Vaugirard. passer devant le Petit Suisse (Le Rostand, c'est un peu plus haut). Entrer à la Sorbonne.

...

 

Cette vie, c'est le passé. Nous passerons tous, bientôt. Bientôt, c'est-à-dire, à l'échelle de l'éternité, dans moins d'une seconde, tout de suite, hier déjà, et tous les jours d'avant. La vie, c'est du temps aboli.

Restent les facilités que nous nous sommes accordées pendant toutes ces années, Ava et moi. De nous être quittés, nous nous sommes toujours retrouvés. J'aimerais n'avoir aucun doute sur la question : nous remarcherons ensemble dans les rues du temps".

Jean-Marc Parisis

Les aimants

(Éditions Stock, 2009)

Eh oui, avec la Princesse, c'est fini...

 

17/12/2015

Père sévère

Décidément le blogue de Marie-Anne Chabin est une mine, et un régal !

Je viens de lire son billet "Persévérance" et je ne sais pas quoi louer...

Il y a d'abord cette facture très classique de ses billets, avec un titre, un début et une fin, très construits et en général avec un jeu de mots, un trait d'humour, une longue introduction sinueuse et pertinente pour en arriver au sujet, tout à fait dans ma manière à moi.

Mais je trouve que ses développements sont plus fouillés et plus aboutis que les miens : emprunt à plusieurs domaines de connaissance différents, étymologie, points de vue philosophique, historique… Elle doit y passer beaucoup de  temps et le résultat est souvent meilleur que le mien, et plus court, bien que moins "militant" et plus "fataliste" peut-être.

Elle a eu nombre d'idées amusantes ; par exemple, de faire des séries de billets avec un suffixe prédéterminé dans le titre (c'était -ule, c'est maintenant -ance, comme "Persévérance"). D'où des séries année après année, regroupées par suffixe du titre ("Texticules acidulés" pour l'année dernière…).

Mais, à vrai dire, si j'en parle et si je prends le risque de mettre en valeur la production d'une "concurrente", c'est pour ses états d'âme sur la pérennité de son travail d'écriture, tout à fait semblables aux miens.

Jugez-en, public !

Guillaume d'Orange.jpg"Car j’ai décidé de persévérer dans l’écriture de ce blogule et de me lancer dans une cinquième année, même si ma persévérance frise l’obstination. En effet, les blogs sont en train de passer de mode. Comme le souligne Loïc Le Meur, pionnier des blogs au tournant du siècle, les blogs comme outils de conversation sont obsolètes et l’échange, aujourd’hui, a migré vers les réseaux sociaux (voir l’article de Vincent Glad dans Libération du 8 septembre 2015).

Si le nombre de commentaires ou de likes est le seul critère de réussite, mon blog est sans doute un échec. Cependant, je veux espérer que la mesure de la réussite, pour les blogs comme en toutes choses, ne se cantonne pas à la quantité.

Pour ma part, me référant à Guillaume d’Orange plutôt qu’à un autre, la motivation de l’action (si on estime que ce que l’on fait sert à quelque chose) et la satisfaction d’avoir agi plutôt que de n’avoir rien fait sont mes critères de choix.

J’ai créé mon blog pour exprimer mes impressions personnelles et professionnelles face à la société de l’information, sans coller à une actualité trop éphémère, et en m’imposant une règle oulipienne d’écriture, en référence à Raymond Queneau. Or, la société de l’information est toujours critiquable et j’ai toujours plaisir à écrire ces texticules hebdomadaires.

Conclusion : je persévère.

Du reste, l’audience de mon blog, où des billets d’il y a plusieurs mois ou années sont régulièrement consultés, correspond à mon attente, sans parler de tout ce que cela m’apprend. Quant à parler ou non de réussite, il faudrait préciser les critères de jugement. Et s’il faut être jugé, il est préférable d’être jugé par ses pairs. Des pairs sévères, évidemment".

N'est-ce pas remarquable ?

Dernier point : elle vient de rempiler pour sa cinquième année (mais ses billets sont hebdomadaires)...