17/11/2015
Jours de deuil national (III)
"Vos coups d'ongle rayant tous les sublimes livres,
Vos préjugés qui font vos yeux de brouillard ivres,
L'horreur de l'avenir, la haine du progrès ;
Et vous faites, sans peur, sans pitié, sans regrets,
À la jeunesse, aux cœurs vierges, à l'espérance,
Boire dans votre nuit ce vieil opium rance !
Ô fermoirs de la bible humaine ! sacristains
De l'art, de la science, et des maîtres lointains,
Et de la vérité que l'homme aux cieux épelle,
Vous changez ce grand temple en petite chapelle !
Guichetiers de l'esprit, faquins dont le goût sûr
Mène en laisse le beau ; porte-clefs de l'azur,
Vous prenez Théocrite, Eschyle aux sacrés voiles,
Tibulle plein d'amour, Virgile plein d'étoiles ;
Vous faites de l'enfer avec ces paradis !"
Victor Hugo
Les contemplations
Autrefois - Aurore
À propos d'Horace
07:30 Publié dans Actualité et langue française, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)
16/11/2015
Jours de deuil national (II)
"… Ainsi je vis ; ainsi
Paisible, heure par heure, à petit bruit, j'épanche
Mes jours, tout en songeant à vous, ma beauté blanche !
J'écoute les enfants jaser, et par moment,
Je vois en pleine mer, passer superbement,
Au-dessus des pignons du tranquille village,
Quelque navire ailé qui fait un long voyage,
Et fuit sur l'Océan, par tous les vents traqué,
Qui, naguère, dormait au port, le long du quai,
Et que n'ont retenu loin des vagues jalouses,
Ni les pleurs des parents, ni l'effroi des épouses,
Ni le sombre reflet des écueils dans les eaux,
Ni l'importunité des sinistres oiseaux."
Victor Hugo
Les contemplations
Autrefois - L'âme en fleur - Lettre
Près le Tréport, juin 18..
07:30 Publié dans Actualité et langue française, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)
15/11/2015
Jours de deuil national (I)
"Que le sort, quel qu'il soit, vous trouve toujours grande !
Que demain soit doux comme hier !
Qu'en vous, ô ma beauté, jamais ne se répande
Le découragement amer,
Ni le fiel ni l'ennui des cœurs qui se dénouent,
Ni cette cendre, hélas, que sur un front pâli,
dans l'ombre, à petit bruit secouent
Les froides ailes de l'oubli !
Laissez, laissez brûler pour vous, ô vous que j'aime
Mes chants dans mon âme allumés !
Vivez pour la nature, et le ciel, et moi-même !
Après avoir souffert, aimez !
Laissez entrer en vous, après nos deuils funèbres,
L'aube, fille des nuits, l'amour, fils des douleurs,
Tout ce qui luit dans les ténèbres,
Tout ce qui sourit dans les pleurs !"
Victor Hugo
Les contemplations
Autrefois, l'âme en fleur XXIV
10:21 Publié dans Actualité et langue française, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0)