12/12/2015
Parler des livres
Comment parler des livres (que l’on a aimés) ? C’est l’une des questions abordées dans ce blogue et qui intéressent les écrivains eux-mêmes. Du moins certains d’entre eux comme Alessandro Baricco.
Cet écrivain italien, que je ne connais pas, vient de publier « Une certaine vision du monde » chez Gallimard.
Si j’en crois Pierre-Édouard Peillon dans le Marianne du 13 novembre 2015, la thèse de cet ouvrage est qu’on n’écrit pas « pour refléter quelque réalité locale » (comme par exemple Balzac avec le Paris du XIXè siècle ou Philip Roth avec New-York au XXè…) mais pour présenter aux lecteurs une « certaine vision du monde ». Les livres ne seraient donc pas, comme on l’entend ici et là, « des lucarnes sur la réalité » et n’auraient pas de valeur documentaire particulière (NDLR : en l’occurrence, c’est quand même le cas de Balzac selon moi mais évidemment pas celui de Garcia-Marquez…).
P.É. Peillon ajoute que « parler des livres qu’on aime, c’est toujours badigeonner un autoportrait par-dessus les pages qui nous ont marqués », puisque c’est montrer comment ils ont modifié notre vision du monde.
Alessandro Baricco a écrit 50 chroniques ou comptes rendus subjectifs sur les livres qu’il aime : c’est une invitation ou un partage mais jamais une évaluation à travers des notes. Ce n’est pas le premier écrivain à se livrer à cet exercice (et à se livrer à nous, du même coup) : Alain Finkielkraut l’avait fait il y a un an ou deux, par exemple. Et aussi Cécile Ladjali, en nous faisant pénétrer dans sa bibliothèque (voir mes billets à son sujet).
De fait, le critique introduit un écran entre les livres et nous ; il peut nous donner envie de les lire ou au contraire nous en décourager… Faut-il dès lors accepter cette médiation ou bien se laisser guider par le hasard, par des rencontres ou par sa logique personnelle de cheminement dans la littérature, et se forger sa propre opinion ?
Le fait que le critique soit lui-même un écrivain ajoute une équation au problème ; après tout, on pourrait se contenter de « Lire » (le magazine) comme fil d’Ariane ! Mais c’est l’occasion de découvrir une autre facette d’un écrivain que l’on apprécie, à côté de ses propres ouvrages.
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03/12/2015
Natacha est de retour !
À l'occasion de la sortie de son nouveau livre, Natacha Polony a été invitée à débattre avec Alain Minc dans le "Marianne" du 27 novembre 2015.
Voici ce qu'il dit :
"… Nous héritons d'un merveilleux instrument que vous n'avez pas évoqué, notre langue française, moins rationnelle que l'allemand, moins romantique que le russe, mais beaucoup plus subtile que la plupart des autres".
Et voici ce qu'elle lui répond, à propos des langues, à la fin de l'entretien :
"Vous n'arrêtez pas de louer la langue française pour ses performances et ses bons chiffres de diffusion.
Ma position est plutôt que toutes les langues méritent identiquement d'être défendues car elles participent de la diversité humaine. Si je souhaite préserver le français, c'est par attachement à la vision du monde dont il est le vecteur.
De même, je ne souhaite pas défendre la France pour ses résultats économiques ou son degré d'adaptation à la mondialisation mais parce qu'elle représente un moment essentiel de la conscience humaine.
…
Je ne plaide pas pour un réenracinement ou un retour en arrière ; je m'appuie sur les conceptions universalistes qui sont celles de la France. Ce n'est pas à l'ouverture que je m'oppose mais à la globalisation et à l'uniformisation.
Dans le monde contemporain, le diversité des peuples et des climats s'efface derrière le culte stérile de la performance".
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30/11/2015
Chateaubriand et Bossuet
Ce n'est pas si souvent qu'on peut lire de nos jours, dans un texte public, une référence à Chateaubriand et Bossuet à la fois !
Eh bien, c'est le cas dans un appel récent de Malik Bezoun à ses coreligionnaires français, suite aux massacres de Paris.
"Or le sentiment patriotique doit l'emporter sur toutes autres considérations comme le rappelait naguère Chateaubriand qui invitait chaque partie à «[…] (abandonner) quelque chose de ses prétentions pour concourir à la gloire de la patrie » en proie à de graves troubles et divisions. Me faisant, sans prétention aucune, le continuateur de l'illustre écrivain, j'invite mes frères et sœurs, Français de confession ou de culture musulmane, à rejeter le point de vue consistant à dire qu'il appartient aux Français, anciens ou de souche, de faire la part des choses en séparant le bon grain de l'ivraie, si je puis dire. Hélas, on peut attendre longtemps. Car la peur, engourdissant la raison, et la prégnance de certains préjugés, réactivés par une actualité décrivant un monde arabo-musulman violent et sanguinaire, sont autant de freins à une évolution plus positive de la perception de l'arabo-islamité dans la société française. Aussi n'attendons plus !
...
Le temps presse. Les extrémistes, de tous bords, sont aux aguets et souhaitent, en silence, que la peur fasse son œuvre dans l'espoir de jouer leur sinistre partition. Pour l'amour de la France, sa sauvegarde, son salut, ne leur en donnons pas l'occasion. Soyons des bâtisseurs. Soyons des patriotes prosélytes. Endossons ce rôle, un rien ingrat, consistant à faire la preuve de notre attachement, sans borne, au pays à chaque fois qu'un soubresaut intégriste l'ensanglante et le tétanise, en nous démarquant, de façon plus que visible, de ceux qui en sont à l'origine.
...
Aussi, n'ayons aucun état d'âme et crions en chœur notre amour du pays de Bossuet. Il en va de l'unité de la nation française qui exige que l'on brise, sans plus tarder, les barreaux de cette prison victimaire dans laquelle on s'est enfermé depuis bien trop longtemps, à la grande joie des communautaires professionnels et des identitaires radicaux. Nos enfants, demain, nous en remercierons.
À la francité, notre bien commun sacré".
Physicien de formation, Malik Bezouh est un spécialiste de la question de l'islam de France. Il est l'auteur de France-islam: le choc des préjugés
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