17/01/2015
Les filles de rêve sont décevantes
Non, je ne veux pas vous parler de Léa ou d'Audrey… à supposer que le titre de ce billet vous évoque l'une de ces jeunes femmes.
Je voulais vous parler du livre d'Alain Corbin "Les filles de rêve" (Fayard, 2014).
Et commencer par confesser un "état d'âme" : je ne suis pas critique littéraire et pire que cela, je n'ai pas fait "lettres modernes" ni aucune étude littéraire ; personne n'est parfait.
Donc, tant qu'il s'agit de dire du bien d'un livre ou d'un écrivain, même à tort, même à contre-courant, même pour de mauvaises raisons, pas de problème. Le seul risque est d'inciter quelques lecteurs à s'y intéresser et que, peut-être, ils soient déçus. Mais quand vient le moment de dire tout le mal que l'on pense d'un ouvrage, en profitant de la liberté d'expression, c'est une autre affaire : a-t-on le droit de détourner d'un livre des lecteurs potentiels ? Sachant que, d'une part, tous les goûts sont dans la nature et que, d'autre part, on peut s'être trompé, être passé à côté du sujet, avoir fait un contresens, voire manquer du "niveau" nécessaire pour apprécier l'œuvre en question et par conséquent nuire gravement à l'auteur.
Vous me direz : "Bon, eh bien, vous n'avez qu'à dire de quoi ça parle, et rien de plus !". C'est une piste… mais alors à quoi servirai-je ? à faire le magnétophone des notices-éditeurs ? De là à recopier carrément ces notices, il n'y aurait qu'un pas… Et même dans cette hypothèse, ce serait rendre un mauvais service aux amateurs de littérature car les notices sont souvent soit exagérément enthousiastes, soit floues, soit erronées quant au vrai sujet du livre.
Après cet exorde de pure rhétorique, je me lance. Donc, les filles de rêve…
L'éditeur prétend que "ce voyage à travers l'amour pur est une délicieuse invitation au fantasme". Voyons voir, comme on dit. Alain Corbin consacre dix-neuf chapitres, courts et essentiellement descriptifs, aux jeunes filles pures et jalouses de leur pureté, qui sont censées avoir ébloui les hommes des siècles passés ; leur figure tutélaire est Diane (Artémis), souvent appelée Diane chasseresse ; et on découvre (ou redécouvre) successivement Ariane ("ne coupez pas… !"), Iseult, Béatrice, Laure… jusqu'à Yvonne de Galais.
Alain Corbin, que je ne connaissais pas, est historien mais plutôt historien "transversal" ou "thématique", doublé d'un sociologue et d'un psychologue. Il a publié une vingtaine d'ouvrages aux titres explicites : misère sexuelle et prostitution au XIXè siècle, l'odorat et l'imaginaire social, l'Occident et le désir du rivage, l'homme dans le paysage, histoire du corps, jusqu'à une histoire de la virilité.
Ses filles de rêve, emmenées par Diane, s'opposent aux filles moins farouches, et jusqu'aux filles de joie, représentées par Vénus. Une bonne dichotomie pour faire du classement, ce n'est jamais mauvais mais de là à en faire une thèse et un livre… On ne voit pas très bien où il veut en venir.
La transition n'est pas son fort, la répétition si. Il s'agit probablement d'un travail universitaire à peine retouché.
J'ai noté pour vous, à l'appui de ma déception, quelques passages marquants :
"… deux des plus beaux vers de la langue française :
Ariane, ma sœur, de quel amour blessée
Vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée (Racine, Phèdre)…"
Deux des plus beaux, vraiment ?
"Il se réfère, par conséquent, au monde disparu qui constitue notre objet". Débrouillez-vous avec cette phrase.
"Puis commence l'ascension paradisiaque qui est vol surnaturel, à grande vitesse, dans l'espace cosmique, à destination du centre très lumineux : Dieu". "Béatrice est une créature céleste, non totalement décorporéisé". "L'échange des regards est en ce temps, perçu comme un tact".
D'une certaine façon, la thèse du livre est résumée par cette phrase du chapitre "Pamela" : "Cette insistance, qui organise tout le discours sur la vertu de Diane, que l'on perçoit intensément menacée fait que, selon moi, la figure de la fille de rêve se joue face à celle de la fille impatiente ou fragile non seulement incapable de se garder intacte, mais parfois avide d'initiation".
Le plus intéressant en fin de compte, ce n'est pas la thèse ou la quête, mais les rappels historiques : qui était Béatrice, qui était Laure ? qui ont-elles inspiré et torturé (puisque c'étaient des filles de rêve, vous avez compris le truc ?) ?
Et d'apprendre qui était Dulcinée, synonyme pour nous aujourd'hui de "sa chérie", "sa petite amie" ; Dulcinée était laide comme un poux et faisait rêver Don Quichotte !
PS. c'était le deux-centième billet de ce blogue.
19:15 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0)
16/01/2015
Les lunettes d'Audrey Pulvar
Le point faible d’Audrey Pulvar, ce sont ses lunettes, je trouve. Et ce qui est sûr, c’est qu’elles ne deviendront pas Président de la République…
Sinon, Audrey est une francophone vigilante et efficace. Je l’ai déjà signalé dans un de mes premiers billets. Hier, elle a parlé de mot-dièse sans avoir l’air de rien, naturellement, quand tant de ses collègues se gargarisent de hashtag.(voir mon billet du 8 septembre 2014 sur le sujet).
Plus une émission sans que l’on parle de Tweeter ou de Facebook ou des deux. Et quand on échappe aux messages Tweeter en bas de l’écran, à lire pendant qu’on écoute le journaliste, on a de la chance. Aucun doute, deux heures à cette dose-là nous abrutissent. Sans compter que le français des messages en question, c’est souvent tout et n’importe quoi. Un blogue spécialisé n’y suffirait pas.
Une fois de plus, ces deux outils qui se sont imposés, en partant de rien, sur une bonne partie de la planète, sont américains ; les Chinois, qui en ont les moyens, la langue commune de grande diffusion et qui veulent préserver leur indépendance et la maîtrise de leurs outils de communication, créent les leurs. Peut-être qu’un jour, nous les utiliserons, et les Américains aussi.
L’effet réseau joue pour eux désormais : il y a tellement d’abonnés que celui qui ne veut pas les utiliser, reste également en-dehors de l’actualité (immédiate). J’ai été frappé que ce soit sur Tweeter que David Cameron ait annoncé son intention de participer au rassemblement de Paris le 11 janvier 2015…
Mais ce qui est dramatique, c’est que les bons côtés de ces nouveaux médias innovants et utiles, ont été immédiatement détournés à des fins criminelles ; les terroristes les utilisent pour préparer et surtout pour médiatiser leurs méfaits. Monde effrayant…
Le débat suite aux attentats a migré vers l’éducation (nationale) et le défaut d’intégration. Et j’ai entendu un enseignant d’histoire-géographie expliquer, à propos de l’obstruction qui a été faite à la minute de silence, que beaucoup de ses élèves, en fin de troisième, ne disposent que de cinq cents mots et que, du coup, ils ne comprennent pas quantité de choses écrites ou dites ici ou là. Un autre a rappelé que le manque de moyens pour « verbaliser » conduit à la violence (physique).
Face à cela, mon pauvre blogue est bien démuni…
Il va continuer néanmoins en dénonçant le franglais, comme par exemple le summer jobbing, à promouvoir une langue « bien balancée » ou « bien tempérée » comme aurait dit Jean-Sébastien et à citer de temps à autre tel ou tel de nos plus grands écrivains et poètes.
Justement, je suis en train de lire un livre récent, décevant. Je vous en parlerai la prochaine fois.
10:56 Publié dans Actualité et langue française | Lien permanent | Commentaires (0)
15/01/2015
Manifestations consacrées à la langue française
Il y a chaque jour, dans la rue et dans les médias, des formules incorrectes, des mots impropres, des journalistes qui sauraient les éviter (sans doute) mais qui préfèrent « faire moderne » et des gens qui s’en fichent ou parfois ne savent pas ce qui est correct, et qui seraient bien étonnés que l’on s’intéresse au français « correct » comme dans ce blogue. D’autres enfin qui considèrent que c’est un débat « de classe », voire une « lutte de classe »…
J’ai noté par exemple (Léa Salamé, le 13 janvier 2015, 7 h 50, France Inter) : « Pourquoi ils ont réussi ? ». Et son interlocuteur lui répond, croyant bien faire : « Pourquoi est-ce qu’ils ont réussi ? »…
On pourrait croire la cause perdue.
Mais, à côté de cela, il y a des émissions culturelles comme « La grande librairie » à des heures de grande écoute, après tant « d’Apostrophes », de « Bouillon de culture » et de « Grand échiquier » ! On n’y corrige pas le français mais on y admire et on y promeut la littérature, ce qui revient à peu près au même. Combien de pays à travers le monde font de même ?
Il y a des chroniques dans de nombreux journaux qui sont consacrées à la belle langue (je ne dis pas « qui sont dédiées » car l’Académie le déconseille).
Il y a des livres de recommandations ou d’humeur ; en plus de ceux que j’ai déjà cités, en voici encore un : « Petit traité de la langue française » d’Alain Bladuche-Delage (Bartillat, 2007), état des lieux d’une langue en pleine mutation. Et un autre : « Le carnet du savoir-vivre au bureau » (Laurence Caracalla, Flammarion-Le Figaro, 2009), qui recense les tics de langage : « J’ai envie de dire » (eh bien, dis-le !), « Y a pas de souci » (apprécié des vendeuses de fringues), « Tout à fait », « C’est clair », « À très vite »…
Il y a des stages de formation pour élèves des Grandes écoles trop polarisés sur les maths et qui écrivent comme des cochons.
Il y a des clubs d’orthographe – mais oui – !
Mieux que cela ! Il y a des manifestations autour du français, et je ne parle pas ici des salons du livre (il y en a un par exemple à Égliseneuve d’Entraigues dans le Puy de Dôme, chaque année fin juillet) !
En voici quelques-unes. Je serai reconnaissant aux lecteurs qui m’en signaleront d’autres.
En premier lieu les dictées ; celle de Bernard Pivot bien sûr mais aussi la Dictée des Amériques qui est organisée par nos cousins québécois et diffusée sur TV5. Et aussi les Timbrés de l’orthographe (Le Figaro-La Poste).
Et enfin, venons-en au fait, je voulais signaler les Journées consacrées ici et là à la langue ou aux langues : le Festival européen latin-grec de Nantes, le Festival du mot à La Charité sur Loire (fin mai), la Semaine de la langue française et de la francophonie (fin mars).
De même que les golfeurs organisent leur année et leurs voyages pour assouvir leur passion (d’un parcours à l’autre), de même que les amateurs de musique classique ou de jazz peuvent programmer leur été au gré des festivals, de même les passionnés de mots et de syntaxe peuvent quasiment y consacrer leur temps libre, d’un bout de la France à l’autre.
Je n’ai pas parlé des voyages virtuels, des « sites » et des blogues sur le réseau international (internet). Ils sont innombrables et feront l’objet d’un prochain billet.
10:22 Publié dans Actualité et langue française | Lien permanent | Commentaires (0)


