01/09/2015
Devinette XI
Dans le billet "Le bon chasseur, bon, y tire... (mes lectures de l'été 2015) (II)" du 1er septembre 2015, j'utilise comme transition "Autre séquence, autre scène"...
Pouvez-vous me dire de quel texte sont tirés ces mots ?
Et de quel auteur ?
PS. ICB est priée de ne pas utiliser la recherche aveugle par internet… Merci d'avance.
10:24 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (3)
Mes lectures de l'été 2015 (II) : Numéro zéro
Revenons donc à la question : un auteur qui a indiscutablement de la maîtrise et du style, est-il un "bon" écrivain ?
J'ai lu ensuite ("sans transition" selon la formule consacrée) le "Petit éloge des vacances" de Frédéric Martinez, dont j'ai donné de larges extraits dans plusieurs billets récents. Dans un genre complètement différent de celui de M. Belezy, il y a là aussi de la maîtrise et "un sujet". Sur le thème fort peu original du jeune homme étourdi par les affriolantes jeunes beautés qui passent devant ses yeux dans les rues de Paris, il réussit à concocter un mélange enivrant d'impressions sensuelles et de souvenirs tendres, que l'on dévore d'un coup. Bien sûr, là encore, il faudrait lire un autre livre du même auteur, et il n'y a que l'embarras du choix car il a déjà beaucoup écrit.
"Autre séquence, autre scène", je pars à l'abordage du dernier opus d'Umberto Eco, le sémiologue, historien et professeur italien, célèbre pour son "Nom de la Rose". Il s'agit de "Numéro zéro" (Grasset, 2015). L'exorde est plutôt fade : un homme s'inquiète de ce qu'il n'y a plus d'eau au robinet dans son appartement… et rapidement, U. Eco nous entraîne dans son récit à cent à l'heure : sous couvert d'une histoire d'espionnage classique, il règle quelques comptes avec l'université et surtout, il nous livre ses réflexions sur le journalisme, sur le vrai et le faux et sur les mœurs politiques de l'Italie de 1992 et d'ailleurs.
Par exemple, il fait expliquer par son narrateur la façon de procéder des grands journaux anglo-saxons : "Une fois les guillemets mis (NDLR : pour citer un témoin d'un événement déniché dans la rue), ces affirmations deviennent des faits car c'est un fait qu'Untel a exprimé telle opinion… L'astuce, c'est de mettre entre guillemets d'abord une opinion banale, puis une autre opinion, plus raisonnée, qui reflète celle du journalisme… Le problème, ce sont les guillemets - où et quand les mettre". À la suite de quoi, U. Eco fait faire des "exercices" à ses journalistes, à partir d'événements inventés. C'est édifiant...
Dans Numéro zéro, il y a un peu de 1984 (les manipulations) et un peu de Jean-Christophe Grangé aussi (les Loups gris de Turquie) mais avec l'érudition d'U. Eco (voir le chapitre "Mercredi 15 avril" dans lequel il brode avec brio sur les "chevaliers de Malte", les faux et les vrais, à tel point qu'on ne sait plus si c'est de l'histoire ou de l'imagination). On pense aussi, dans le genre "faux documentaire" et "description d'une machination", à Tunc et à Nunquam de Laurence Durrell.
Il y a aussi pas mal d'humour (les petites annonces que préparent les journalistes du Numéro zéro sont désopilantes) et une histoire d'amour en fond sonore.
Au total, un livre qui se lit agréablement mais qui me paraît tout de même "alimentaire" pour Eco.
07:00 Publié dans Eco Umberto, Écrivains, Littérature, Livre, Martinez Frédéric, Roman | Lien permanent | Commentaires (0)
31/08/2015
Mes lectures de l'été 2015 (I) : "C'était notre terre" (Mathieu Belezi)
Depuis le fabuleux sketch des Inconnus "Les chasseurs" et leur incursion dans le Bouchonnois (Pithibouviers et autres lieux fameux), on sait ce que c'est qu'un bon chasseur...
Mais qu'est-ce qu'un bon écrivain ?
J'ai pensé à cette question en ouvrant "C'était notre terre" de Mathieu Belezi (Albin Michel, 2008). Ce livre raconte le choc, psychologique (la perte) et physique (les exécutions sommaires et les crimes ignobles) des dernières années de la colonisation en Algérie, vu essentiellement du côté des colons. Il est construit sur une suite de monologues des principaux personnages du roman, chacun d'eux donnant sa propre version et surtout sa propre vision des événements. Dès les premières pages, je me suis donc dit "quelle maestria ! quelle habileté pour enclencher le récit illico presto" et, partant, "quel écrivain !".
Pour être plus précis, je me suis même demandé : "quels ingrédients", "quelles caractéristiques" font-ils qu'un livre vous "cueille" dès les premières pages ? Est-ce uniquement la fameuse "première phrase" ("Longtemps je me suis couché de bonne heure…") ? Sûrement pas.
Qu'est-ce qui fait qu'on est "embarqué" dans l'enthousiasme par "La promesse de l'aube" et qu'on avance à reculons dans, par exemple, "Je vous écris d'Italie" ?
Autant vous dire qu'à cette heure, tout cela me reste mystérieux. Il y a une alchimie, et même sans aller jusqu'aux paradoxes à la Cécile Ladjali selon laquelle "un livre nous lit autant qu'on le lit".
Bref, ce livre qu'une amie avait adoré et qu'elle m'a conseillé, m'a pris dans son tourbillon dramatique. Sur le fond, même s'il donne l'impression de plaindre ces colons qui sont chassés un beau matin de "leurs" terres, il les dépeint tellement arrogants et tyranniques, que l'on en vient à comprendre l'origine de la révolte des opprimés. Les exactions de part et d'autre sont relatées de façon équilibrée, et c'est l'horreur qui s'en dégage, toutes communautés confondues. Au total, le livre - on ose à peine parler de roman - donne certainement une bonne idée de ce qui s'est passé. Seul le titre demeure ambigu : ironique, nostalgique, provocateur ?
Sur la forme, j'ai déjà parlé de la construction du livre ; il m'a semblé que l'auteur en usait et abusait. Au milieu du gué, on en est un peu las, d'autant qu'il manie la répétition et les "formules" sans modération. Mais le dernier tiers du livre - prenant - nous fait dévorer les dernières pages. J'aurais apprécié pour ma part quelques descriptions supplémentaires du cadre de vie et des paysages, plus de pittoresque des situations… mais l'objectif de l'auteur n'était manifestement pas là.
Au total, un bon livre, et qui frôle le "documentaire" ou même l'essai militant sur la question.
07:00 Publié dans Belezi Mathieu, Écrivains, Littérature, Livre, Roman | Lien permanent | Commentaires (1)