19/10/2017
"Lire et faire lire", association de bénévoles pour développer la lecture
C’est dans Les Échos du 13 octobre 2017 que j’ai découvert l’association « Lire et faire lire » fondée par l’écrivain « vibrionnant » Alexandre Jardin (fils et neveu de Pascal Jardin et Gabriel Jardin) en 1999.
Il s’agit d’un réseau de bénévoles qui se rendent dans les écoles – à partir de la crèche et de la maternelle ! – pour lire des histoires aux enfants, avec l’objectif de leur faire aimer la lecture et de les inciter à lire eux-mêmes. Elle touche 40 % des écoles en région parisienne mais beaucoup moins dans le reste de la France.
En effet l’heure est grave…
L’article de Marie-Estelle Pech rappelle que « près de 10 % des jeunes âgés de 16 à 25 ans ont de très faibles capacités de lecture, voire sont en situation d’illettrisme, selon les évaluations effectuées lors de la Journée Défense et citoyenneté ».
Et selon une étude de l’OCDE, « 30 minutes de lecture quotidienne permettent des progrès significatifs en français » (et dans tout autre langue, j’imagine !).
Un message récent de l’excellent M. Blanquer, ministre de l’Éducation nationale, va dans ce sens : « L’ensemble de la nation doit s’engager pour développer le lecture chez les jeunes » (discours prononcé à l’Institut de France, le 12 octobre 2017). Ouf ! La nation existe toujours…
« La grammaire, la syntaxe, les exercices d’écriture, ne sont pas des exercices conservateurs ».
Chaque élève recevra un livre à chaque fin d’année scolaire (j’ai encore les livres reçus à l’école primaire en récompense de mes résultats…). Bien plus, « À chacune des petites vacances, (il) souhaite que les enseignants demandent à leurs élèves de lire un à deux livres ».
Et Mme Carrère d’Encausse a salué son programme en soulignant : « La France est un pays d’écrivains, un pays littéraire. Pourtant toute une génération a des difficultés avec la lecture ».
07:30 Publié dans Actualité et langue française, Données chiffrées sur le français | Lien permanent | Commentaires (0)
16/10/2017
Irritations linguistiques LV : flagrant délit
Le jargon juridico-administratif s’est enrichi d’une nouvelle expression, dont les journalistes, bien sûr, font leur miel : la flagrance. « Le parquet a ouvert une enquête en flagrance du chef de tentative de destruction par incendie » (Journal 20 minutes du 5 octobre 2017). Je suppose que ce substantif se réfère à l’expression « flagrant délit »… Et il me semble refléter notre époque de bien-pensance exacerbée, celle qui parle de « techniciens de surface » et de « quartiers difficiles », sous couvert, il est vrai, de précision et d’exhaustivité (tous les malvoyants ne sont pas aveugles, tous les malentendants ne sont pas sourds, Dieu soit loué). Mais ce raccourci et cette substantivation veulent sans doute éliminer l’affreux mot « délit » qui figure dans l’expression originelle et qui signifiait que, dès le constat, on considérait que l’acte était délictueux. Or, halte à la précipitation ! Il faut voir ! D’abord a-t-on bien vu ? Le mal absolu serait la stigmatisation ! Donc c’est flagrant, à n’en pas douter mais flagrant de quoi ? D’où le substantif.
Passons sur l’accumulation de compléments du mot « flagrance » : du chef de tentative de destruction, accumulation bannie par le premier cours d’expression écrite venu.
À part cela, la franglisation de notre langue (moi aussi je suis capable d’inventer des substantifs…) continue son petit bonhomme de chemin (faudra-t-il écrire un jour : son.a petit.e bonne-homme.femme de chemin, pour contenter les féministes ultras ?).
Jugez vous-même…
Dans un article comparant M. Macron à M. Sarkozy dans leur façon d’exercer la présidence, le journal Marianne du 22 septembre 2017 écrit : « Autre pratique prisée du copy-cat Macron, la méthode dite du carpet bombing, c’est-à-dire l’annonce en rafale de réformes censées laisser groggy des opposants qui ne savent plus où donner de la tête ». Mais à quoi sert donc cet avalanche de termes américains, tous plus incompréhensibles les uns que les autres ?
Il paraît que le même M. Macron ne voit plus la société française qu’à travers la dialectique des insiders et des outsiders… Pauvre France !
Claude Askolovitch, dans sa revue de presse du 28 septembre 2017 sur France Inter, parlait de deal et de cover (pour désigner la première page d’un magazine…). Et les médias nous ont bassinés un temps avec la fashion week, pour désigner une semaine de la mode, dont Paris est pourtant censée être la capitale mondiale !
PS. Le site ooreka définit la flagrance comme suit :
Est flagrant ce qui est constaté sur le coup, sur le fait. En procédure pénale, le terme flagrance renvoie à la notion de flagrant délit. L'article 53 du Code de procédure pénale définit deux types d'infraction flagrante :
- Est qualifié flagrant le crime ou délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre.
- Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l'action, la personne est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d'objets, ou présente des traces ou indices laissant penser qu'elle a participé au crime ou au délit.
07:30 Publié dans Actualité et langue française, Franglais et incorrections diverses | Lien permanent | Commentaires (0)
12/10/2017
Langues africaines et francophonie II
J’en étais là de mes réflexions sur les langues africaines, suite à la lecture du livre de Camara Laye, « L’enfant noir », quand j’ai retrouvé un article de Marianne paru le 7 avril 2017 intitulé « La francophonie, un truc annexe » et constitué d’un entretien du journaliste Hubert Artus avec l’écrivain d’origine camerounaise, Léonora Miano.
Autant le dire tout de suite – car mon propos n’est pas là – ce titre est aberrant et ne traduit aucunement ni le contenu de l’article ni la pensée de l’écrivain ! Réglons cela tout de suite avant d’en venir au fond. Le journaliste lui fait remarquer que sa langue est française mais comporte beaucoup d’anglicismes. Léonora Miano répond : « Le Cameroun est un espace francophone particulier car les langues locales sont très nombreuses (NDLR : cette affirmation montre qu’elle ne connaît pas la Guinée-Conakry ! Cf. mon billet du 9 octobre 2017) : plus de 200, dont aucune n’est majoritaire. Au Sénégal, il y a une langue que tout le monde parle, même s’il y en a d’autres : c’est le wolof. Idem avec le lingala dans les deux Congo. Au Cameroun, rien de tel. De plus, le pays a été une colonie allemande, puis un protectorat franco-britannique. L’anglais et le français sont dans l’ADN de cette nation. J’ai ainsi appris l’anglais à la maternelle. Ados, on préférait les programmes de télé anglophones, parce que les présentateurs étaient plus pros ! (sic). Ma génération devait maîtriser le français comme l’anglais. La francophonie est donc un truc annexe, pour moi. Ça nous amène à envisager, aborder, toucher des choses, des influences qui échappent à d’autres, ou alors qui leur viendront sur le tard… et dans la langue française.
On lisait le Nigérian Chinua Achebe, le Sud-Africain Alan Paton et l’Américain Richard Wright directement dans le texte. Tout comme Molière et Aimé Césaire ».
Cette déclaration est très intéressante. On voit bien d’abord qu’elle ne condamne ni ne méprise la francophonie (ce que laissait entendre le titre) ; simplement, pour elle qui est bilingue (voire plus) depuis la prime enfance, c’est secondaire ou plutôt, ce n’est pas une cause pour laquelle elle pourrait militer.
07:34 Publié dans Actualité et langue française, Francophonie | Lien permanent | Commentaires (0)