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05/12/2014

Dis pas ci, dis pas ça (II)

Bon, allons-y !

Je vais faire une sélection des entrées du livre qui recoupent le plus les thèmes de ce blogue ou qui, a contrario, font débat, sachant que la rubrique DIRE, NE PAS DIRE est accessible in extenso sur le site de l’Académie.

Bicyclette.jpgIl y a d’abord les grands classiques, ceux que nous ont répétés nos professeurs de lycée : on roule à bicyclette et on va en voiture car personne n’est jamais entré dans une bicyclette, sauf des chauffards justement. Et idem pour à cheval, à skis, en train, en bateau. On apporte un gâteau et on amène un enfant à l’école. Mais l’eau est amenée par des conduites car il y a l’idée de « conduire », de « transporter une chose en un lieu ». La demoiselle habite chez ses parents (oh… !), on va chez Désérable et fils, au Bon marché, à la Samaritaine, chez Toyota, chez Leclerc ou à Leclerc, voire au Leclerc ; bref, pas beaucoup de règles intangibles. « Après que » est suivi de l’indicatif car l’issue en est connue, contrairement à « avant que », qui implique une éventualité. On dit « finalement », tout bêtement et non pas « au final ». « Baser sur », transposition de l’anglais based on, ne doit s’employer que dans le domaine militaire (« Des troupes ont été basées sur la frontière entre la Russie et l’Ukraine »). Sinon, on écrit : « une théorie établie sur des faits incontestables », « une prospérité fondée sur l’industrie et l’agriculture ». On postule, on ne candidate pas !

Tout cela, c’est le hors d’œuvre, c’est bonnard.

02/12/2014

Écrire et relire

On n'en finirait pas de s'agacer...

Je sais bien que je peux lasser mes lecteurs à la fois avertis du problème et indemnes du défaut ; mais tant pis, je râle encore une fois.

On lit de plus en plus de textes truffés de fautes d'orthographe et de grammaire, ou plutôt - ne soyons pas méprisants - de coquilles. Quand il s'agit de journalistes, d'écrivains, de personnes diplômées, en effet, on n'imagine pas qu'ils aient oublié les règles, encore moins qu'ils ne les aient jamais apprises. Non, ce sont des coquilles (à propos, savez-vous que ce terme est fort ancien ? et pour trouver son origine, enlevez donc une consonne au milieu…).

Et les coquilles arrivent à tout le monde, simplement les gens ne relisent plus leur texte. Vite, aller toujours plus vite !

 

Premier exemple: le bouquin "Jours de collège" de Louise Cuneo et Sophie Delcourt (Bartillat, 2014). C'est le journal, reformulé par une journaliste, d'une prof. d'histoire débutante, Normalienne de formation, lors de sa première année dans un collège de banlieue parisienne en ZEP. Bien que toutes les difficultés racontées soient connues et aient fait l'objet de pas mal de livres déjà, c'est intéressant et déprimant ; quelle jeunesse ! et quelle misère sociale ! l'un expliquant sans doute l'autre.

Mais côté français, aïe, aïe, aïe : une coquille toutes les cinq pages, au moins ; articles ou conjonctions oubliés, "s" oubliés, phrases bancales...

Où est le temps où c'étaient des Normaliens, justement, qui corrigeaient la prose de leurs contemporains chez les éditeurs avant publication ?

Second exemple, pour ne pas être trop long : un éditorial en forme de réponse à un lecteur dans le journal d'un Comité d'entreprise envoyé aux salariés et retraités, appelés "bénéficiaires".

Rien de sert de paraphraser ni de geindre, je vous livre les phrases telles quelles.

"il m'arrive quelques fois d'y répondre" ; "tout juste un légitime devoir de réponse" ; "vous informant sur les activités" ; "en faveurs des bénéficiaires" ; "existe dans le sommaire quelques informations" ; "la décision d'être en capacité de communiquer" ; "mon incapacité grandi au fur et à mesure" ; "j'ai bonne mémoire contrairement à vos propos" ; "mon aptitude mémorielle personnelle" ; "quand à la sempiternelle lutte des classes" ; "en imposant un concept de désuétude de cette réalité" ; "voilà ce qui a desservie la conscience de classe" ; "de surcroit" ; "sachez que jamais je ne cesserais d'exhorter les valeurs qui sont miennes" ; "je suis perfectible comme tout à chacun" ; "par causalité, voilà pourquoi je fais référence…" ; "j'affectionne leurs citations" ; "qui a en charge de gérer vos activités" ; "des défauts que vous me permettrez de tenir secret" ; "je travaille à leurs extinction" ; "vous faites part, je vous cite…" ; "Et Alors ?" ; "les salariés n'on pas droit à offrir... ?" ; "est-il honteux de vendre Français ?" ; "votre emportement à vouloir virer…" ; "qui rêve lui a n'en pas douter" ; "m'insulter qu'en à la valeur de mon engagement" ; "mon parcours aux seins des entreprises" ; "les mandats tenus atteste" ; "je vous feras grâce des actions menées" ; "j'en arrêterais là de ma réponse" ; "tout à chacun puisse juger" ; "ce type d'échange ne fais en rien évoluer la problématique" ; "oublier toutes formes de politesses" ; "un Collègue, moi-même, qui a fait le choix" ; "je conclurais par ces propos"...

Certains ont dit qu'à 5-0, la Deutsche Mannschaft aurait dû lever le pied en demi-finale et éviter à la Selecaõ l'humiliation. De même, à un tel niveau d'accumulation de fautes (de coquilles) ce serait peut-être de la charité chrétienne de passer outre et de parler d'autre chose...

On a dit aussi que certains responsables syndicaux faisaient "exprès" de mal parler pour faire peuple. À l'opposé, on pourrait penser que notre éditorialiste a essayé de "faire intellectuel" et s'est mélangé les pinceaux...

Mais gardons l'idée que c'est de la précipitation, de la distraction, que ce sont des coquilles.

Quelle est donc la morale de cette histoire ?

D'abord qu'il faut relire après avoir écrit ; c'est une question de respect des futurs lecteurs ; cela permet aussi parfois de s'apercevoir que certaines idées ont été mal présentées et qu'il faut récrire certains passages.

Ensuite que la probabilité de laisser des coquilles augmente avec la longueur des phrases et la longueur du texte ; donc, être concis et faire des phrases courtes.

Pour moi, la sanction va être immédiate : comme j'étais en retard pour ce billet, je n'ai guère relu… à vos commentaires !

 

16/11/2014

États Dame (II)

Avec « Le bien écrire », j’ai voulu augmenter mon lectorat, avec les mêmes objectifs :

§  Documenter, analyser et argumenter mon irritation face à la dégradation de la langue ;

§  Rappeler les grandes règles de l’orthographe et de la grammaire que nous avons oubliées ;

§  Fournir des éléments aux non-littéraires pour écrire de façon lisible, agréable à lire et facile à mémoriser ;

§  Utiliser et rediffuser la documentation amassée en deux décennies ;

§  Amuser, distraire, intéresser…

Faisant cela, j’avais – et j’ai toujours l’espoir – que mes lecteurs s’approprient ce combat pour un français pas trop défiguré (par exemple, employer de temps à autre une expression comme last but not least ne prête pas à conséquence, bien sûr ; on peut même parfois laisser échapper un « j’fais ça pour le fun » ou « j’la kiffe » mais avec modération, comme l’alcool…), châtient leur propre façon de s’exprimer et fassent école – auprès des enfants, des jeunes, des enseignants, des collègues, de l’Administration, etc. – en un mot qu’ils résistent eux aussi.

On peut faire modifier des annonces officielles (je l’ai fait…), on peut faire remarquer quand trop c’est trop, on peut contribuer au Journal des lecteurs des organes de presse, on peut écrire au Bureau de vérification de la publicité, etc.

Et on peut rugir ou ricaner, en famille, quand Bruno Jeudy, photogénique intervenant de l’émission « C dans l’air », déclare, au beau milieu d’une tirade d’excellente facture (car il parle très bien), que François Hollande aurait « embedded » les deux journalistes du Monde (12 novembre 2014, 22 h 55). Avait-il peur d’être trop clair, et donc de passer pour un plouc, avec rien que du français dans son discours ?

Un commentaire m’a reproché (si je l’ai bien compris) de remettre sur la table, les règles honnies par certains, du français. Ce n’est jamais par prétention, pédantisme, rigorisme, moquerie ni encore moins mépris ! J’apprends moi aussi – ou je réapprends – en me replongeant dans le Bescherelle ou les dictionnaires ou Wikipedia, et je synthétise pour mes lecteurs.

Ainsi, ICB, après avoir donné ses réponses à l’exercice du projet Voltaire, m’a écrit son incompréhension du corrigé de la question 10, qui valide « finît » (imparfait du subjonctif), alors qu’elle aurait dit « finisse » (subjonctif présent). Je lui ai donné par retour la raison suivante : « concordance des modes et des temps », et je me suis aperçu que c’était un peu court ! J’ai donc consulté le Bescherelle : quand la principale est au conditionnel (présent), à savoir « il serait plutôt étonnant », tout dépend de l’antériorité ou non de l’action de la subordonnée. Si la subordonnée est antérieure, on la met au plus-que-parfait du subjonctif. En revanche si elle est simultanée ou postérieure, alors on la met à l’imparfait du subjonctif, à savoir « finît », sachant que le présent (finisse) est toléré quand elle est postérieure, ce qui est le cas. Tout le monde a raison. Bravo donc ICB !