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22/11/2015

À propos de "De conséquence"

C'est vrai que c'est compliqué, le français...

Bernard Pivot, dans "Les mots de ma vie", consacre un article à la locution (adjectivale !) "de conséquence". Mais l'Académie, dans "Dire, ne pas dire", est plus diserte sur le sujet, tout en disant - ouf - la même chose. Je crois l'avoir déjà mentionné mais répéter n'est pas nuisible (et je n'ai pas le courage de fouiller dans les archives du blogue… Lequel de mes lecteurs trouvera le billet en question ?).

Bon, résumons.

"Conséquence" signifie : effet, contrecoup, résultat, ricochet, prolongement, etc.

"Conséquent" se dit de quelqu'un qui agit "avec esprit de suite" ou d'une chose qui est "dans la suite logique de". Jusqu'ici ça va...

On n'a pas le droit d'employer "conséquent" dans le sens de "important", "considérable". C'est un barbarisme dénoncé par Littré. Bon, d'accord.

Mais là où il faut rester calme, c'est quand on apprend que la locution "de conséquence" signifie "important", "considérable". Par exemple : "un homme de conséquence" est important.

B. Pivot cite Brassens, qui connaissait son français sur le bout des cordes de sa fameuse guitare, dans la "Supplique pour être enterré sur la plage de Sète" :

"Pauvres rois, pharaons ! Pauvre Napoléon !

Pauvres grands disparus gisant au Panthéon !

Pauvres cendres de conséquence !…"

Plage de Sète.jpg

Ni les uns ni les autres ne parlent de l'adverbe "conséquemment", que j'adore et qui signifie "de manière logique" et "par suite de"...

Il est vrai qu'il reste dans la ligne !

 

18/11/2015

Mes amis, que reste-t-i(l) à ce dauphin si genti(l) ?

Et ça continue comme ceci (chacun a chanté, étant enfant, le Carillon de Vendôme) :

"Orléans, Beaugency, Notre-Dame de Cléry…"

Vendôme.jpg

Tout cela pour se poser la question suivante. Faut-il dire et écrire, par exemple, "les étendues qu'il reste à découvrir" ou bien "les étendues qui restent à découvrir" ?

L'oreille ne fait guère la différence, c'est pour cela que la chanson utilise la rime en "i".

Cela m'intriguait depuis longtemps et je m'apprêtais à soumettre le point à l'Académie via son site internet (rubrique Dites-Ne dites pas) quand j'ai découvert la "solution" dans le "Valeurs actuelles" du 12 novembre 2015, sous la plume du grammairien Philippe Barthelet, que mes lecteurs connaissent. Voici ce qu'il en dit.

"Les deux, selon que l'on veut mettre l'accent sur les étendues elles-mêmes ou sur l'action de les découvrir".

Il a fait des recherches dans les dictionnaires : Littré donne "la chose qui reste à faire", l'Académie "voilà ce qui reste du dîner" et le célèbre Grévisse est d'avis que "avec rester, on emploie qu'il ou qui, à son choix". Mais Jules Renard écrit dans son Journal "Tous les livres qu'il me reste à lire", tandis qu'un professeur soupirera à propos "de toutes les copies qui me restent à corriger".

Faut-il dire "le temps qu'il me reste ?" ou bien "le temps qui me reste ?".

C'est incertain, même si, dans l'absolu, il faudrait se demander si le temps en question peut être compté ou non…, d'où l'emploi du "personnel" ou de "l'impersonnel".

Bref, chacun fera au mieux, selon sa sensibilité ou ses habitudes.

Mais savoir qu'on est libre, n'est-ce pas ce qui plaît le plus aux Français ?

 

 

 

11/11/2015

O comme Pivot, comme "mots", comme orthographe

Voici ce qu'écrit Bernard Pivot dans "Les mots de ma vie" (Albin Michel - Plon, 2011) à l'entrée "Orthographe" :

"… je suis ce ramoneur qui s'étonne que leurs rédacteurs fassent des fautes d'orthographe sur des enseignes, dans des publicités, sur la page d'accueil des sites internet, sur des cartes de restaurant, etc. Je m'indigne qu'elles y restent, soit parce que personne ne les a remarquées, soit parce qu'on n'a pas voulu rectifier, cela ayant été jugé sans importance".

Je pense à la jolie Loréna, qui disait "Il y a quand même des choses plus graves", à propos, non pas de l'orthographe, mais du franglais. Il y a toujours "plus grave" quand on ne s'intéresse pas à un sujet ou quand il ne nous touche pas.

Quand il étudiait au Centre de formation des journalistes, il y avait des exercices de détection et de correction de coquilles : "Un professeur distribuait à chaque élève la même page d'un journal. Le jeu consistant à déceler le plus vite possible la coquille, la faute d'orthographe ou de français contenue dans les surtitres, les titres, les sous-titres ou les intertitres". Je ne sais pas si cet exercice a perduré. Mais le fait qu'il ait existé prouve qu'à cette époque, il y avait déjà des coquilles dans les journaux, puisque les élèves en cherchaient et en trouvaient !

Pivot dit ensuite : "(La célèbre dictée) m'a valu la reconnaissance et même l'affection de beaucoup de professeurs de français des écoles et des collèges, et l'inimitié de certains pontes de l'Éducation nationale qui étaient hostiles à cet exercice jugé vieillot, incompatible avec un enseignement moderne dont ils s'efforçaient de l'expulser".

"Mais l'on est bien obligé de constater qu'elle (l'orthographe) ne jouit plus du prestige qui était le sien et qu'elle est tenue aujourd'hui par beaucoup de gens, surtout les jeunes, pour qualité négligeable, superflue. Autrefois, cinq fautes à la dictée vous privaient du certificat d'études, même si votre devoir de maths était parfait".

"Le malheur veut que, de l'orthographe valeur quasi sacrée, nous soyons passés en quelques décennies à l'orthographe considérée comme valeur facultative et ornementale. Nous avons versé d'un excès dans un autre".

Orthographe.jpg

C'est aussi mon avis. Les personnes auxquelles nous faisons remarquer une entorse à l'orthographe, si elles n'en conçoivent pas de la honte et de la rancune, nous reprochent de considérer comme primordiaux des détails sans importance. Elles se trompent car nous ne nous trompons pas dans la hiérarchie des valeurs : le fond est bien le plus important… mais la forme doit d'abord être correcte afin qu'on l'apprécie à sa juste valeur.