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21/09/2017

Irritations linguistiques LIV : voilà... je vous laisse !

L’été qui se termine ne nous a pas épargné les irritants linguistiques ! 

Ainsi Isabelle Barth, professeur des universités et chercheur en management a-t-elle publié dans LinkedIn, le 21 août 2017, un article « très mode » intitulé « Sortir de sa zone de confort reloaded ». En voici l’accroche : « Il y a des phrases magiques en management qui semblent organiser un consensus et une adhésion immédiate autour d’elles : Sortir de sa zone de confort en est une. Ces formules sont en général précédées de : Il faut !... Il faut savoir sortir de sa zone de confort ! ». Je vous fais grâce de la suite. Ce qui est drôle c’est que reloaded ne figure que dans le titre et n’apparaît plus dans le corps de l’article ! Donc c’est purement accrocheur, pour faire moderne ! 

Il y a des constantes, des tics de langage à longue durée de vie. J’en ai trois en tête. Il y a d’abord le fameux « voilà », en perte de vitesse cependant, qui est proféré d’un air décidé, quand le locuteur ne sait plus quoi ajouter, tout en laissant entendre qu’il s’est suffisamment fait comprendre et que donc ses auditeurs peuvent parfaitement boucher les trous eux-mêmes.

Et il y a l’horrible « Merci d’avoir été notre invité ! » des journalistes de radio et de télévision. La formule en soi est aberrante : l’invité en question l’a été par le journaliste et il pourrait à la limite le remercier de l’avoir été. Le journaliste de son côté pourrait remercier son invité d’avoir accepté l’invitation. Mais le remercier du fait qu’on l’a invité, cela n’a pas de sens ! 

Et il y a l’horripilant « Je vous laisse… » : « Je vous laisse vous asseoir », « Je vous laisse enlever votre veste », « Je vous laisse sortir votre Carte bancaire », etc. (propos que l’on entend aussi bien chez le médecin, le podologue, le dentiste qu’au guichet de la banque – sauf peut-être pour la veste). 

Il paraît que l’un des dadas de « La république en marche » et de l’actuel Président de la République est d’appliquer les méthodes de l’Entreprise pour gérer les hommes et les choses, ce que l’on appelle le management, et partant d’utiliser le vocabulaire lié à ces pratiques, à savoir le franglais (qu'ils croient sans doute être de l’anglais). D’où le teambuilding, le coworking et autres horreurs. Marc Endeweld le souligne dans son article de Marianne le 25 août 2017 : « C’était l’une de ses promesses de campagne : la constitution d’une task force – une force opérationnelle en français – contre le terrorisme (…). La communauté du renseignement se demandait encore à quoi pouvait bien correspondre cet anglicisme dont raffolent les équipes Macron ». 

Je constate aussi que des mots inutiles comme « le store » se répandent à grande vitesse. 

Et j’en suis à me demander comment et pourquoi un terme comme « liseuse » a pu se diffuser aussi rapidement… 

La situation ne s’améliore pas non plus côté typographie ; dans ma commune, des panneaux « Axe Partagé » ont fleuri, avec un p majuscule (pourquoi donc ?), pour indiquer aux cyclistes qu’ils ont le droit de se faire klaxonner et bousculer par les voitures dans les rues concernées. Dans la gazette municipale, on lit : « Virginie D., maire-adjoint en charge de la Vie scolaire, etc. »… (pourquoi pas « chargée de… » ?). Remercions le Ciel d’avoir échappé à « maire-adjointe » ; ça viendra, malheureusement (voir mon billet sur l’orthographe féministe). Bien sûr, tout ce qui doit faire un peu « moderne » dans cette cité est affublé d’un nom en anglais : « OPÉRATION JOB DATING », « KEEP COOL, LE SPORT BONHEUR », « ACROBAT’CLUB », « SO SWING », « SELF DÉFENSE » ( !). Mais le même organe de l’édile utilise par ailleurs à la perfection les majuscules accentuées et les Ç ; donc tout n’est pas perdu.

31/08/2017

Irritations linguistiques LIII : Pâques

Chers lecteurs, cela faisait longtemps que je ne vous avais pas fait part de mes « Irritations linguistiques » (déjà une trentaine ont été publiés), rubrique fondatrice de ce blogue avec celle consacrée aux règles oubliées de notre belle langue…

Voici donc une nouvelle série d’irritations.

À tout seigneur tout honneur : France Inter, abandonné par son animateur vedette Patrick Cohen (la fameuse matinale, le 7-9), nous informait le 28 août 2017 que 501 nouveaux livres seraient publiés à la rentrée (nombre qui donne le tournis et nous fait verser une larme de crocodile sur le sort de ces innombrables auteurs qui ne seront pas lus et dont l’opus terminera au pilon – et ce, sans compter les autres innombrables qui ont essuyé un refus et qui ne seront pas publiés et donc pas lus non plus évidemment). On pouvait penser que le chroniqueur de service n’avait que l’embarras du choix pour en distinguer un et le faire sortir du lot… Eh bien non ! Il n’a rien trouvé de mieux que de consacrer son temps de parole à faire le panégyrique d’un roman américain sur l’esclavage ! Désamour de soi, quand tu nous tiens… 

Parmi les innombrables tics de langage et aberrations du français moderne censé être « branché », il y a « Mais pas que ». Oh que c’est horripilant ! Votre interlocuteur (mais c’est souvent un journaliste) vous cite quelques qualités ou défauts, quelques avantages ou inconvénients… et pour exprimer qu’il y en a d’autres, que la liste est longue, qu’il pourrait multiplier les exemples, il brise là en concluant « Mais pas que » (sous-entendu : mais il n’y a pas que cela). Imaginons les Tontons flingueurs en train de déguster leur tord-boyaux ; Jean Lefèvre « y-trouve un goût de pomme » et Bernard Blier aurait répondu « y-en a mais pas que » ? Bien sûr que non ! Michel Audiard parlait bien mieux que cela ! Il lui a fait dire : « Y-a pas qu’ça mais y-en a ». 

Il y a déjà quelque temps, SG m’a fait suivre un article du blogue des correcteurs du journal « Le Monde » (daté du 13 octobre 2015) consacré aux pléonasmes les plus en vogue dans la presse, qu’ils attribuent à raison à « l’usure des mots mais aussi à la méconnaissance de leur sens ». J’ajouterai le manque criant de bon sens et le snobisme.

Le premier pléonasme m’a amusé car il m’en a rappelé un autre fort en vogue dans le milieu scientifique et technique (et même dans le bâtiment) : le « taux d’alcoolémie » est une expression aberrante puisque l’alcoolémie elle-même est déjà un taux (d’alcool dans le sang), tout comme « évaluer la volumétrie d’une pièce » puisque la volumétrie est la mesure (le mesurage disent les spécialistes) du volume.

« Le Monde » pointe aussi le « tri sélectif », le « principal protagoniste », le « tollé général », le « etc. suivi de trois points » et l’expression « opposer son veto ». Mais, bon prince, il épargne les pléonasmes consacrés par l’usage ou par la littérature : « au fur et à mesure », « le gîte et le couvert », le « pauvre hère » et le « frêle esquif »…

Le record semble détenu par le détestable « au jour d’aujourd’hui » qui serait une façon de dire trois fois la même chose.

03/07/2017

Irritations linguistiques LII : Québec !

Le Marianne du 12 février 2011 (oui, 2011, pendant l’antépénultième quinquennat !) raconte que, lors d’une conférence de presse commune avec Barack Obama, le Premier Ministre canadien, Stephen Harper (oui, celui avant le jeune Trudeau, apôtre des accommodements raisonnables) a fait sa déclaration officielle en français, comme il en a l’habitude (depuis, on a connu un candidat à l’élection présidentielle française qui la faisait, lui, en anglais à Berlin…). En guise de représailles, la chaîne américaine Fox a coupé la retransmission pour ne la reprendre qu’au moment où le président américain s’est exprimé. Pensée unique, langue unique, même combat. 

Montréal rue.jpgPlus récemment, voici ce que M. Mathieu Bock-Côté, philosophe et sociologue québécois, déclarait : « La langue française n’est pas ici une langue sur deux mais la langue de référence, de convergence (…). La ville (Montréal) s’anglicise sous la pression de l’immigration et de la mondialisation (…). Les Québécois tiennent à leur identité linguistique et redoutent le jour où leur langue ne sera plus celle de leur métropole » (Marianne du 31 mars 2017).

 

 

Le 17 avril 2017, vers 22 heures, je suis tombé sur un reportage de L’Équipe TV baptisé : « Le running, un business ». Comme condensé de franglais, on peut difficilement faire plus court ! « Se coucher tard, nuit »…