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09/03/2017

Racines rurales

L'autre matin, je sortais de la Gare Saint Lazare aux aurores... Une ribambelle de jeunes distribuaient un nouveau magazine ; je me suis retrouvé avec un exemplaire dans la main, que j'ai feuilleté dans le métro.

En couverture, il y avait une jeune femme en pantalon devant une meule de foin, avec un bonnet sur la tête et un animal de basse-cour dans les bras, et sur sa hanche, un grand titre en lettres blanches : PAYSANNE ET FIÈRE DE L'ÊTRE.

Vous allez me dire : "en plein salon de l'agriculture, quoi d'étonnant ; et quel rapport avec le bien écrire ?".

Le rapport, c'est que, pour parler du monde rural et de l'agriculture dans la France du XXIème siècle, il semble qu'il faille parler franglais. En effet, quel est donc le nom de cette nouvelle publication ? life and farms ! Et quel est son slogan ? "LE PREMIER MAGAZINE 100 % LIFESTYLE AUX RACINES RURALES" ! Et quels sont les accroches des principaux articles en première de couverture ? "VIVEZ LE TRIP AGRICOLE LIFESTYLE", "Êtes-vous adeptes de la philosophie agricole Lifestyle ?", "Roadshow : sur la route de la cerise turque". Le sommaire arbore fièrement les titres suivants : "SO CHIC", "STORY AGRICOLE LIFESTYLE", "COVER", "LA CONSO TROP COOL", WELL BEING DANS LES CHAMPS"...

Leur idée : "faire un journal sur ce nouveau feeling qui passe entre agriculteurs et citadins". Leur premier thème : les femmes à la ferme...

C'est saugrenu, sympathique, naïf, opportuniste, ridicule... à chacun de se faire un avis (très vite, avant que le journal ne s'arrête après le troisième numéro).

Mais où vont-ils chercher tout cela ?

Et pourquoi le franglais ?

 

04/03/2017

Décevante fréquentation

Février 2017 a porté un rude coup à l’irrésistible augmentation du nombre de visites, ce que j’appelle « la fréquentation de mon blogue » par « mon lectorat ».

Cette belle série chronologique, pour employer le vocabulaire des statisticiens et des économistes, qui montrait une pente ascendante continue depuis août 2016, s’est fracassée sur le mur de neige des vacances de Mardi gras (que les bienveillants ont rebaptisées « vacances d’hiver »). Du moins est-ce ainsi que j’interprète cette baisse de 36 % de la fréquentation… je préfère ne pas incriminer Hugo, dont j’ai beaucoup commenté « Les Misérables » ce mois-ci, non plus que les « Irritations linguistiques » qui sont à l’origine de la création de ce blogue. 

Tiens, vous en voulez encore ? Celles-ci datent du 7/9 de Patrick Cohen sur France Inter le mercredi 1er mars 2017. Son invité est Jérôme Chartier :

  • « oui, ce sont les indécis, définitivement » (franglicisme dû au faux-ami definitely, au lieu de « assurément ») (J. Chartier) ;
  • « j’ai peur que le fact checking, comme on dit en bon français, ne soit pas en votre faveur » (P. Cohen) ;
  • « vouloir augmenter, de façon déconsidérée, le nombre de fonctionnaires… » (au lieu de « inconsidérée », évidemment).

Comme dirait l’Autre, il y a eu inversion de la courbe. On retombe à un cumul de 449 visiteurs uniques, ce qui nous ramène un peu au-dessus du niveau d’août 2016.

À toute chose malheur est bon ; en contrepartie de ce recul, deux éléments :

  • L’Afrique (à 6,1 %, + 1,2 points) et surtout l’Amérique du Nord 6,9 %, + 3,6 points), qui ne devaient pas être au ski à cette époque, récupèrent ce que la France a abandonné (provisoirement, j’espère), les autres continents étant stables ;
  • Le temps moyen de chaque visite augmente notablement à 4 min 20 (+ 167 %), ainsi que le temps moyen passé sur chaque page (1 min 40, +186 %).

On se console comme on peut.

27/02/2017

Irritations linguistiques XLIV : les trois catégories

C’est comme si ça s’accélérait… il en pleut maintenant tous les jours ou presque (des franglicismes, des néologismes personnels hasardeux, des incorrections linguistiques, des tics langagiers).

Commençons par les tics : depuis pas mal de temps l’inévitable « voilà » ponctuait tous les discours des politiques comme des journalistes, une sorte de « respiration » pour signifier à la fois que la cause était entendue, qu’on était à bout d’arguments et que d’ailleurs ça tombait sous le sens. Il me semble qu’un autre tic est en train de s’implanter : « du coup ». Il sert de conjonction pour insister sur un lien de cause à effet, sur une conséquence manifeste, irrémédiable, indiscutable.

Plus compliqué et plus intellectuel, il y a le verbe « essentialiser » qui a envahi le discours des experts en sociologie, un peu derrière le fameux « briser les codes ».

Même si un journaliste du Figaro s’est fait une spécialité de dénoncer régulièrement dans sa rubrique « Langue » ces petits travers du francophone métropolitain de base, je considère qu’à côté du reste (ce qui va suivre », ce n’est que roupies de sansonnet, en un mot, c’est parfois énervant mais globalement amusant.

En écrivant cette dernière phrase et plus précisément en faisant allusion au « francophone métropolitain de base », j’ai pensé à une mise au point que je voulais faire (que j’aurais dû faire) depuis longtemps, destinée à mes lecteurs francophones qui ne sont pas « métro » justement : mes lecteurs inconnus du Québec, d’Afrique du Nord et sub-saharienne, d’Asie et d’Amérique latine, et aussi bien sûr à mes lecteurs français des cinq continents (Martinique, Guadeloupe, Réunion, Guyane et les autres). Sans doute mes billets sont-ils « franco-métro-français », trop peut-être ! Passe encore pour mes comptes rendus de lectures ; mais quid de la série « Irritations linguistiques » ? Rencontre-t-elle un écho outre-mer ? Irrite-t-elle ? Suscite-t-elle un intérêt documentaire, un intérêt ethnologique ou social ? Manque-t-elle d’ouverture et de largeur de vue, sachant que le français, malgré l’Académie, est tout de même très varié d’une contrée à l’autre ? Les « commentaires » du blogue sont là pour cela ! Donnez votre avis !

Bon je reviens à mes Irritations de la semaine.

Après les tics, les franglicismes, certains volontaires (snobisme ou paresse), d’autres non (ignorance).

Voici donc « définitivement », employé comme le serait en anglais definitely, qui malheureusement pour les ignorants signifie « assurément », « certainement » et non pas « définitivement ».

Voici « candidater », qui n’existe pas, à la place de « postuler ».

Voici les chatbots du 13 heures de France Inter le 24 février 2017, pour désigner ces « robots » (en fait des logiciels) qui répondent sans aide humaine aux questions récurrentes des internautes. Voici l’action de « redirecting vers les salariés », allez savoir ce que cela désigne… Voici enfin la playlist de France Inter…

Et les consultants qui adorent marteler que les entreprises doivent « adresser » plusieurs problèmes en même temps.

Et Stéphane Le Foll, sur BFM-TV le 19 février 2017, qui, comble de la snobitude et du cosmopolitisme le plus distingué, affecte de croire que l’adjectif « divers » est invariable et affirme que « le monde agricole est très diverse ».

BFM-TV, encore, donnait un reportage sur Emmanuel Macron le 20 février 2017. On y parlait des helpers, ces jeunes gens qui l’aident, bénévolement, à marcher sur l’eau et des start-upers qui arrivent, nous dit-on au bord de l’extase, « en direct de la Silicon valley ». J’ai entendu aussi évoquer le coaching des femmes, qui nouvelles en politique auraient besoin d’être déniaisées… Les féministes apprécieront. 

Autre catégorie, celle de la « bravitude de Chine » : les néologismes personnels. M. Gilbert Collard sur BFM-TV le 24 février 2017 parle ainsi de la « tardivité » d’une décision (sur le modèle de « brièveté » et de « précocité » sans doute).