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19/01/2015

Propos glanés ici et là

Ce ne sont ici que quelques mots qui ne feront pas le tour de ce personnage ni encore moins de son œuvre : Georges Simenon était né à Liège, l'a arpentée toute sa vie et en a fait le décor de ses romans mi-policiers, mi-psychologiques.

Simenon.jpgSimenon corrigeait peu et toujours dans le sens d'une simplification, voire d'une suppression (rappelons-nous : la perfection, c'est quand il n'y a plus rien à supprimer). Son obsession, c'était d'expliquer des idées avec des mots concrets et non pas avec des mots abstraits.

Le conservateur du musée Simenon raconte que, sur le point de commencer un nouveau roman, il notait sur ses fameuses "enveloppes jaunes" les premiers éléments qui lui venaient à l'esprit, sur les lieux, le contexte ou les personnages. Le sel de l'anecdote est que c'était pure manie d'écrivain: il n'y avait rien dans les enveloppes, qui d'ailleurs étaient orange ou couleur terre de sienne !

Simenon a été traduit et édité dans de nombreuses langues ; le conservateur nous dit : "Chaque semaine, je reçois des nouvelles éditions de Simenon". Aïe ! J'aurais préféré "de nouvelles éditions"...

Virginie Guilhaume.jpgChangeons de sujet : sur France 2, dans une émission de chansons françaises déjà citée dans ce blogue, j'ai entendu que, à sa belle époque, "Jacques Dutronc faisait les after avec ses amis" et que "Prochainement, il fêtera ses 70 ans en prime"...

Certains jours, tout simplement, il y a des claques qui se perdent. Ça suffirait.

18/01/2015

Des irs (Charles Aznavour)

Dans l’émission « Hier encore » de France 2, le 17 janvier 2015, Pierre Arditi a lu ce poème de Charles Aznavour, sorte d’ode aux verbes en –ir, ceux du deuxième groupe de notre enfance.

Les deux verbes qui le débutent et le terminent illustrent bizarrement, fortuitement, les événements tragiques de ces derniers jours…

Et ce bout rimé rappelle la créativité et la maîtrise de la langue de Charles Aznavour, 90 ans, natif d’Arménie, compositeur de centaines de chansons, défenseur infatigable de la chanson française et de l’esprit français, patriote qui n’oublie pas d’aider son pays d’origine quand la catastrophe le frappe.

Comme quoi...

Le rire est le propre de l'homme,

Hennir est celui du cheval

Pourrir est celui de la pomme,

Jouir, le devoir conjugal.

Nourrir est celui de la mère.

S'enfuir, celui du prisonnier.

Souffrir, la peur du pauvre hère.

Pétrir, celui du boulanger.

Trahir est le plaisir du traître.

Ouvrir, celui de l'huîtrier.

Bénir est le devoir du prêtre.

Noircir, la foi du charbonnier.

Jaillir est celui de la source.

Bondir, le ressort du ballon.

Ravir, celui de la Grande Ourse.

Courir, la foi de Marathon.

Unir est la fonction du maire.

Chérir, le bonheur des amants.

Fourbir celui du militaire.

Dormir, celui du fainéant.

Punir est le devoir du maître.

Bâtir, le bonheur du maçon.

Offrir, le plaisir de tout être.

Grandir, le but du petit con.

Rougir est celui de la vierge.

Haïr est celui du cocu.

Saillir, celui de la verge.

Surgir, celui de l'inconnu.

Blanchir, c'est le divin mystère.

Souffrir, c'est le mal des humains.

Vieillir, c'est notre lot sur Terre.

Finir, c'est le mot de la fin.

Et mourir, ça ne mène à rien.

17/01/2015

Les filles de rêve sont décevantes

Non, je ne veux pas vous parler de Léa ou d'Audrey… à supposer que le titre de ce billet vous évoque l'une de ces jeunes femmes.

Je voulais vous parler du livre d'Alain Corbin "Les filles de rêve" (Fayard, 2014).

Et commencer par confesser un "état d'âme" : je ne suis pas critique littéraire et pire que cela, je n'ai pas fait "lettres modernes" ni aucune étude littéraire ; personne n'est parfait.

Donc, tant qu'il s'agit de dire du bien d'un livre ou d'un écrivain, même à tort, même à contre-courant, même pour de mauvaises raisons, pas de problème. Le seul risque est d'inciter quelques lecteurs à s'y intéresser et que, peut-être, ils soient déçus. Mais quand vient le moment de dire tout le mal que l'on pense d'un ouvrage, en profitant de la liberté d'expression, c'est une autre affaire : a-t-on le droit de détourner d'un livre des lecteurs potentiels ? Sachant que, d'une part, tous les goûts sont dans la nature et que, d'autre part, on peut s'être trompé, être passé à côté du sujet, avoir fait un contresens, voire manquer du "niveau" nécessaire pour apprécier l'œuvre en question et par conséquent nuire gravement à l'auteur.

Vous me direz : "Bon, eh bien, vous n'avez qu'à dire de quoi ça parle, et rien de plus !". C'est une piste… mais alors à quoi servirai-je ? à faire le magnétophone des notices-éditeurs ? De là à recopier carrément ces notices, il n'y aurait qu'un pas… Et même dans cette hypothèse, ce serait rendre un mauvais service aux amateurs de littérature car les notices sont souvent soit exagérément enthousiastes, soit floues, soit erronées quant au vrai sujet du livre.

Après cet exorde de pure rhétorique, je me lance. Donc, les filles de rêve…

L'éditeur prétend que "ce voyage à travers l'amour pur est une délicieuse invitation au fantasme". Voyons voir, comme on dit. Alain Corbin consacre dix-neuf chapitres, courts et essentiellement descriptifs, aux jeunes filles pures et jalouses de leur pureté, qui sont censées avoir ébloui les hommes des siècles passés ; leur figure tutélaire est Diane (Artémis), souvent appelée Diane chasseresse ; et on découvre (ou redécouvre) successivement Ariane ("ne coupez pas… !"), Iseult, Béatrice, Laure… jusqu'à Yvonne de Galais.

Alain Corbin, que je ne connaissais pas, est historien mais plutôt historien "transversal" ou "thématique", doublé d'un sociologue et d'un psychologue. Il a publié une vingtaine d'ouvrages aux titres explicites : misère sexuelle et prostitution au XIXè siècle, l'odorat et l'imaginaire social, l'Occident et le désir du rivage, l'homme dans le paysage, histoire du corps, jusqu'à une histoire de la virilité.

Ses filles de rêve, emmenées par Diane, s'opposent aux filles moins farouches, et jusqu'aux filles de joie, représentées par Vénus. Une bonne dichotomie pour faire du classement, ce n'est jamais mauvais mais de là à en faire une thèse et un livre… On ne voit pas très bien où il veut en venir.

La transition n'est pas son fort, la répétition si. Il s'agit probablement d'un travail universitaire à peine retouché.

J'ai noté pour vous, à l'appui de ma déception, quelques passages marquants :

"… deux des plus beaux vers de la langue française :

Ariane, ma sœur, de quel amour blessée

Vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée (Racine, Phèdre)…"

Deux des plus beaux, vraiment ?

"Il se réfère, par conséquent, au monde disparu qui constitue notre objet". Débrouillez-vous avec cette phrase.

"Puis commence l'ascension paradisiaque qui est vol surnaturel, à grande vitesse, dans l'espace cosmique, à destination du centre très lumineux : Dieu". "Béatrice est une créature céleste, non totalement décorporéisé". "L'échange des regards est en ce temps, perçu comme un tact".

D'une certaine façon, la thèse du livre est résumée par cette phrase du chapitre "Pamela" : "Cette insistance, qui organise tout le discours sur la vertu de Diane, que l'on perçoit intensément menacée fait que, selon moi, la figure de la fille de rêve se joue face à celle de la fille impatiente ou fragile non seulement incapable de se garder intacte, mais parfois avide d'initiation".

Le plus intéressant en fin de compte, ce n'est pas la thèse ou la quête, mais les rappels historiques : qui était Béatrice, qui était Laure ? qui ont-elles inspiré et torturé (puisque c'étaient des filles de rêve, vous avez compris le truc ?) ?

Et d'apprendre qui était Dulcinée, synonyme pour nous aujourd'hui de "sa chérie", "sa petite amie" ; Dulcinée était laide comme un poux et faisait rêver Don Quichotte !

PS. c'était le deux-centième billet de ce blogue.