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18/11/2014

États Dame (IV)

Je vois deux questions supplémentaires à se poser, les deux ayant plus ou moins la même origine.

La crise déclenchée par l’irresponsabilité des banques américaines, la finance mondialisée, la cupidité des ultra-riches, les purges imposées par les gars de Chicago qui en profitent pour régler leur compte aux États-providence hérités de la Seconde guerre mondiale, tout cela continue ses ravages en Europe…

Les épidémies qui frôlent la pandémie tous les cinq ans et déciment les continents pauvres…

La misère et la faim qui perdurent…

Les calamités naturelles, fruits de la fuite en avant industrielle depuis un siècle…

La biodiversité menacée, les paysages défigurés par les spéculateurs et promoteurs de tout poil…

Les consommateurs bafoués, roulés dans la farine, réduits au silence…

Les tyrannies, les massacres, l’interdiction de s’exprimer, de circuler, de s’associer…

L’intransigeance et l’expansionnisme religieux…

Le terrorisme, les guerres, les attentats…

Sans compter la main mise des transnationales sur l’économie, sur la démocratie, sur la vie privée, sur les États eux-mêmes…

 

Tout cela n’est-il pas bien plus important que ce combat pour la langue française, qui peut paraître, selon la sensibilité de chacun, d’arrière-garde, passéiste, de droite, nationaliste, rétrograde, dérisoire, pointilliste, boutiquier… et j’en passe.

Sans doute !

Mais chacun mène les combats qu’il peut, selon ses capacités et là où il pense être utile ; et se taire ne changerait rien aux fléaux précités. Sinon, pourquoi ne pas arrêter aussi la recherche, les loisirs, les beaux-arts, le sport, les promenades et surtout l'Opéra ?

 

Par ailleurs, dans la foire d’empoigne que matérialise internet et dans l’inflation de la communication qui caractérise notre époque, faut-il ajouter notre voix, si fluette, au concert ?

Il y a des millions de sites, de forums et de blogues ; chaque rentrée littéraire, ne serait-ce qu’en France, voit la publication de centaines de « premiers romans »…

Comment espérer être entendu ? comment prétendre être plus intéressant que les autres ?

On écrit un peu pour soi, un peu pour son cercle de familiers, un peu pour diminuer localement l’entropie (oui, oui, malgré l’inflation des publications, synthétiser et remettre de l’ordre, diminue, par définition, l’entropie !), un peu pour être repris, cité, démultiplié (on peut rêver…), un peu parce que se taire, ne pas agir, ne changerait rien au concert (si le quatrième violon ne joue pas, cela ne neutralise pas l’orchestre mais est-ce que cela l’améliore ?).

 

Et puis ça fait du bien de râler !

Enfant, je vibrais quand la radio retransmettait les lancements de Cap Canaveral (rebaptisé Cap Kennedy) ; le compte à rebours et les commentaires étaient en américain ; normal, la conquête de l’espace était américaine et ils conquéraient pour nous tous.

Aujourd’hui, on nous refait le coup de la découverte de l’univers et on en profite pour nous vanter l’excellence européenne ; las ! les cris de victoire à Darmstadt sont en anglais, langue largement minoritaire en Europe (c’est l’allemand la langue maternelle la plus répandue et le français est compris par beaucoup). L’Europe parle globish, on enrage.

17/11/2014

États Dame (III)

Chemin faisant (comme aurait dit Jacques Lacarrière), j’ai moi-même pris goût à l’acte d’écrire chaque jour un texte plus ou moins long mais avec la très grande liberté de choisir le sujet, le ton, l’accroche, l’angle d’attaque et la péroraison. Ne sous-estimez pas le temps que j’y passe ; non seulement pour saisir les extraits parfois copieux que je recopie « en bleu et gras » mais surtout pour rassembler les éléments, construire l’argument et conclure. Les titres et les plaisanteries, eux, viennent tout seuls.

De fil en aiguille, je me suis laissé aller à vagabonder dans l’actualité (de la langue), dans une critique (amateur) des livres que j’ai lus, dans la réflexion sur l’objet et l’intérêt de la littérature… Je suppose que certains lecteurs l’ont apprécié mais je n’en ai aucun écho. La pente est facile car la langue et sa défense peuvent vite entraîner vers la critique sociale, politique, économique : d’où vient l’empressement de nos dirigeants à donner à l’anglais une place officielle dans l’enseignement à l’université ? d’où vient le souci de Bruxelles et de Strasbourg à donner un statut aux langues régionales ? d’où vient la servilité face aux Américains ? d’où vient l’engouement de notre jeunesse pour leurs séries et films fantastiques produits à la chaîne ? Etc.

 

Reste le lectorat ; des quelques premiers lecteurs de la première heure, je suis passé à une moyenne de 35 visiteurs uniques, avec un pic à 64 (c’était hier). Il y a certainement là un effet de la mise en réseau et des moteurs de recherche.  Dans mes lecteurs, il y avait deux parties : les anciens collègues et amis d’une part, les habitués de l’hébergeur hautETfort d’autre part. S’y ajoutent certainement de façon ponctuelle, ceux qu’une recherche sur un mot ou une expression orientent vers l’un de mes billets ; en effet, si je publie, le lendemain de l’attribution du prix Renaudot, un titre contenant ce nom propre, je ne peux pas m’étonner que la fréquentation atteigne 64, et même 2 puissance 6…

Faut-il pour autant truffer mes titres de cailloux pour le Petit Poucet et établir des liens avec les réseaux sociaux ? Pour l’instant, je n’y suis pas prêt et je reste artisan. On verra bien.

 

10/11/2014

Pédago d'accord mais pas plus !

Le français fait vendre !

Non seulement des cahiers spéciaux sur les facéties de l’orthographe comme ceux du Monde mais aussi la presse quotidienne ou les magazines.

Une fois on s’insurge contre les outrages dont notre langue est victime (voir mon billet du 14 octobre 2014 « Courage, on n’est pas seuls ») , une autre fois on s’insurge contre les censeurs qui nous rebattraient les oreilles avec leurs humeurs correctrices (voir par exemple le billet du 26 octobre 2014 sur Jacques Laurent et son livre « Le français en cage »)… Il faut bien vivre !

Mais cette ambivalence est, à la base, la nôtre : on peste contre les fautes des autres et on déteste les redresseurs de syntaxe.

L’hebdomadaire Marianne n’a pas résisté au plaisir du balancier : après la chronique de Jacques Dion le 14 octobre, confortée par le courrier de plusieurs lecteurs, il remet le couvert mais pour charger les défenseurs du français, qu’il classe en « prétentieux », « pédago », « emmerdeur » et « businessman ».

C’est l’heure pour l’animateur de ce blogue, de se remettre en question. Quel est-il ?

Plutôt que de demander à mes lecteurs de voter – ce qu’ils ne feront pas car ils sont pour la plupart anonymes, invisibles et muets – je préfère me classer moi-même dans la catégorie « pédago ».

Voici ce qu’en dit le journal :

« Les pléonasmes lui irritent l’oreille. Les participes dépassés lui piquent les yeux. Irréductible défenseur de la langue française, il souffre au plus profond de son âme lorsqu’on maltraite l’orthographe et la grammaire. Une faute, c’est une agression, confie l’un de ces amoureux de la langue, le lexicographe, ancien prof. d’anglais et musicien Jean Maillet, auteur du livre Langue française, arrêtez le massacre.

Souvent instit., prof. à la retraite, académicien, le pédago n’a qu’une patrie, la langue française, qu’un but, la protéger des assauts de plus en plus fréquents. Il boute les anglicismes hors du paysage orthographique, taille en pièces les expressions qui ne veulent rien dire, réhabilite les exceptions à la règle, sans violence aucune. Avec ce vrai passionné, pas de méchants traits de Bic rouge (encore que…), pas d’humiliation publique quand on prévoit à l’avance, on va mangé ou on acceuille un ami. Il décortique l’erreur, détaille le pourquoi du comment et donne les clés pour ne plus commettre le crime orthographique… En jouant ainsi avec les maux, le pédago délie la langue… ».

Je vous fais grâce de la description des autres catégories… entre autres parce que le découpage ne m’en semble pas très pertinent.

J’ai seulement relevé que, concernant le premier, « Personne n’ose le traiter de prétentieux de peur de se planter sur un accent » et qu’un tiers des recruteurs jetteraient les CV contenant plus de deux fautes d’orthographe. Ça m’a rappelé des choses…

Et je retiens surtout qu’il y a des affaires à faire autour du bien écrire et que cela n’a pas échappé à tout le monde (voir les stages, plateformes d’entraînement, certifications… déjà en place). Pour l’instant, mon blogue reste gratuit…