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18/10/2015

Langue française, diplomatie et politique

Lu dans l'article "Quand Bonaparte faisait la paix" de la revue "Valeurs actuelles" du 8 octobre 2015 :

"Pour la première fois aussi, les parties signataires ratifient une version anglaise (alors que le français, succédant au latin, était jusqu'ici la langue exclusive des actes diplomatiques) ; enfin et surtout, le traité d'Amiens ne renvoie nulle part aux clauses des traités de Westphalie qui, depuis 1648 (NDLR : sous Louis XIII…) étaient la grammaire du continent européen...

Une grammaire largement française, puisque majoritairement élaborée par Richelieu, puis Mazarin, pour organiser l'atomisation de l'ensemble allemand… Et par conséquent, la prééminence française sur le continent !".

Traité d'Amiens.jpg

Incidemment, c'est au travers de ce traité que la France a pu récupérer de l'Angleterre, la Guyane, la Martinique et la Guadeloupe. Ouf ! Où irions-nous en vacances sinon ?

Les temps ont bien changé : il est même très difficile de maintenir la langue française comme langue officielle dans les derniers bastions où l'histoire l'avait installée (les Jeux olympiques…). En Europe, à Bruxelles, c'est déjà foutu depuis longtemps (son statut de langue officielle de l'Union permet en théorie qu'elle soit langue de travail, par exemple dans les projets européens de R&D, au choix des participants ; mais ce n'est jamais le cas : si un projet rassemble des partenaires français, italiens et espagnols, c'est en anglais qu'ils vont se parler et travailler...

Aujourd'hui comme hier, la puissance économique, militaire, démographique… induit la prééminence de la langue du pays qui domine : l'anglais des États-Unis (en attendant le chinois ?).

Il se dit que l'utilisation de l'anglais en lieu et place du français, bien plus précis, dans certains traités internationaux, comme ceux qui ont défini les frontières au Moyen-Orient, aurait sa part de responsabilité dans les conflits qui sont apparus depuis les années 30...

Quoiqu'il en soit, nous sommes bien loin de la situation du 25 mars 1802 ; l'Allemagne, unifiée malgré Richelieu, mène la danse, et le Président de la République française approuve docilement les décisions allemandes.

17/10/2015

Désolé, Aël...

Hier, je dissertais sur la trouvaille de Philippe Bartelet, à propos d'une technique de reprise sauvage d'entreprise en difficulté.

Je ne me doutais pas que sa francisation de l'acronyme anglais, AEL, désignait aussi, et avec l'antériorité, l'Avenir électrique de Limoges, un fabricant de cartes électroniques...

Et aussi le logiciel de saisie en ligne des congés par les salariés de Sciences Po Paris (Absence En Ligne)…Également l'AE lock des appareils photos (automatic exposer lock)...

Et enfin, et surtout un prénom mixte : Aël, apparu à la fin des années 90  !

Dérivé de "Ange", il vient du grec "agellos", qui signifie "messager" et se fête le 5 mai.

Né à Jérusalem en 1185, Ange prend l'habit religieux chez les Carmes à dix-huit ans. Après des études à Rome, il va en Sicile prêcher contre les Cathares. C'est là, pendant son sermon, dans l'église Saint Jean de Licara, qu'il tombe mortellement blessé, le 5 mai 1220, atteint cinq fois par l'épée d'un seigneur incestueux dont il avait converti la fille. Réjouissant...

Clin d'œil : Ael est le pseudonyme que s'est choisi Léa Deleau qui chante en anglais. C'est l'anagramme de son prénom !

Allez, on n'abuse jamais des belles choses (façon de parler, naturellement). Je vous remets une photo de la Belle.Léa Deleau (Ael).jpg

 

16/10/2015

Achat à effet de levier (AEL)

Philippe Barthelet, que mes lecteurs connaissent comme chroniqueur du bien parler, a écrit dans le "Valeurs actuelles" du 8 octobre 2015 (rubrique "L'esprit des mots") un petit billet révélateur de ce qu'il faudrait faire tous les jours pour enrayer la progression du franglais.

C'était à propos du mot "Repreneur"...

Passons sur les variations autour de l'idée que l'on ne peut reprendre que ce qui nous appartenait...

P. Barthelet ironise sur "les courageux qui s'endettent doublement, et à l'égard du vendeur, et à celui de la banque prêteuse, dans les cas de LBO (leverage buy-out)". Cette pratique d'ingénierie financière, qui a fait florès et dont l'étoile pâlit depuis quelques années, consistait à emprunter pour acheter une société et à rembourser l'emprunt en dépeçant habilement la proie...

Foin d'économie-Rapetout ! Intéressons-nous à l'aspect linguistique de la chose.

Chanteuse Aël.jpg

 

P. Barthelet ajoute "que nous nous bornerons à traduire par AEL, Achat à effet de levier, ce qui revient, nous l'avouons sans peine, à franciser notre ignorance".

Ces deux remarques sont intéressantes :

  • d'une part il y a le réflexe et l'effort de traduire le terme anglais, et c'est fait là de belle manière puisque le résultat est compréhensible et se condense en plus en un acronyme qui ne le cède en rien à son cousin anglais !
  • d'autre part, P. Barthelet est bien trop modeste ! Il n'a pas "francisé son ignorance", sinon comment aurait-il été capable de traduire aussi intelligemment l'horrible expression anglo-saxonne ? Au contraire, il s'est fait expliqué le dispositif suffisamment pour être capable de lui donner un nom simple et conforme à notre langue.

 

C'est bien ainsi qu'il faudrait procéder, sachant que la plupart des nouveaux concepts et des nouveaux appareils nous viennent d'outre-Atlantique :

  • d'abord comprendre de quoi il retourne ;
  • ensuite trouver une dénomination française, pertinente et suffisamment simple (si les Américains, ce qui arrive souvent, ont trouvé un nom de baptême amusant, particulièrement concis ou évocateur, essayer de faire pareil) ;
  • et enfin, le plus difficile, diffuser très rapidement l'innovation, avant que le terme anglais ne soit adopté, afin qu'il soit utilisé largement (il y a un "nombre critique" de locuteurs, et avant tout dans les médias si snobs et si pressés, qui fait qu'en-dessous, le terme ne s'impose pas).

N'est-ce pas là la mission essentielle de l'Académie française ?

Nos hommes en vert, bien logés, bien chauffés, bien payés, si attachés à leur gloire et à leur confort, n'ont-ils pas tout le temps nécessaire pour plancher chaque mois sur les néologismes, et l'autorité suffisante pour diffuser leurs trouvailles ?

Mais à leur âge, peuvent-ils encore aller vite ?