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29/05/2017

"Pourquoi je préfère rester chez moi" (Benoît Duteurtre) : critique II (les yéyés)

Le chapitre 4 du livre de Benoît Duteurtre, « Pourquoi je préfère rester chez moi », s’intitule « Les yéyés de la politique » et cache bien son jeu.

Ça commence comme au premier chapitre « On aura moins entendu souligner (NDLR : à l’occasion des Primaires de la Droite de 2016) que le progrès en question consistait, comme tant d’autres, à importer un usage des États-Unis. Ce n’est pas un choix, c’est un phénomène historique. Tout ce qui a commencé là-bas doit continuer ici, sous les applaudissements, comme un grand bon en avant. Cela concerne aussi bien les zones fumeurs, les lignes de confidentialité à ne pas franchir dans les administrations, les rubans de plastique rouge qu’on déploie sur les lieux des accidents, les plaintes pour harcèlement sexuel, la monnaie barrée de deux traits, la généralisation des autocars dans le transport urbain, le port de tennis et de survêtements en ville, les frigos à boissons fraîches dans les magasins, les sirènes de recul sur les poids lourds, le remplacement des képis par des casquettes sur le crâne des policiers (…). On ne dit jamais toutefois que c’est américain, mais seulement que c’est moderne » (page 44). 

Johnny 1.jpg

Avouez que c’est bien vu (je n’avais pas en tête l’exemple de la monnaie : €…). Avouons-nous que les Américains inventent toutes sortes de choses astucieuses ou d’évolutions souhaitables ; pas question à mon sens de les refuser en France (comme si on le pouvait…) au motif qu’elles seraient américaines ; mais je me suis toujours étonné qu’on ne négocie jamais rien en échange, à savoir leurs trouvailles contre les nôtres (Michel Jobert, reviens !). Par exemple, qu’est-ce qu’on attend pour exiger des Américains qu’ils adoptent le système métrique, deux siècles après notre Révolution ?

Et Benoît Duteurtre d’ajouter à propos des primaires : « (Quelques observateurs animés de sens critique) se seront inquiétés de voir appliquer aux élections les lois de la consommation, invitant les électeurs à faire leur marché parmi un éventail de personnalités plus ou moins aguichantes… pour finalement retrouver la réalité immuable du néo-libéralisme. Encore une étape et la gauche n’aurait plus qu’à se rebaptiser démocrate, tout comme la droite venait de se rebaptiser républicaine » (page 45). 

Son analyse de la fameuse « recomposition politique » me semble pertinente, de même que celle de la construction européenne depuis De Gaulle, de même que l’accélération de l’emprise du soft power dans notre pays permise par internet, Facebook, Twitter and co. « Ainsi se généralise une vision du monde à deux vitesses : une culture internationale produite aux États-Unis et une actualité locale qui réduit chaque pays au rang de province » (page 49). Et il cite Michel Lancelot, fan à la fois de l’Amérique et de la chanson française, qui constatait que l’Europe suivait systématiquement ce qui se passait là-bas, à vingt ans de distance. Cet écart s’est sans aucun doute réduit. Mais qui sait si d’autres forces tout aussi redoutables ne sont pas en train de transformer la France de façon moins visible et peut-être moins sympathique (l’influence chinoise, nouveau géant, ou l’influence de l’Islam) ?

Johnny à moto.jpgPuis Benoît Duteurtre aborde un sujet très différent et en apparence moins sérieux mais qui lui tient à cœur, à lui comme à nous : la chanson française. « Johnny, contrairement à Piaf, Chevalier (NDLR : bof…) ou Trenet, n’a pas apporté à la chanson française un rayonnement mondial. Quasi inconnu au-delà des frontières, il impressionne par son engagement physique et peut ensorceler par sa voix… mais il suscite le sourire pour cette vie entière consacrée à l’imitation du rock’n’roll (…). La chanson française, pourtant, continuait son cheminement poétique. En ces mêmes années 60, Brassens, Brel ou Adamo (NDLR : bof…) connaissaient d’immenses succès populaires, en Italie, en Allemagne ou au Japon » (pages 50 et 51). On ne saurait mieux dire. Et pour lui, nos hommes politiques sont comme des yéyés de droite et de gauche, des imitateurs fascinés de l’Amérique des cow-boys.

Tout cela continue de plus belle… 

Encore récemment (le 17 mai 2017 matin pour être précis), France Inter nous chantait le couplet, habituel à pareille époque, sur le Festival de Cannes, la montée des marches et l’importance culturelle de cette événement sur la Croisette. Et bien plus car cette année, c’est le 74ème anniversaire du « plus grand festival de cinéma du monde » et on va faire une photo historique avec tous ses acteurs les plus marquants… Vous vous prenez à rêver ; on va réunir Sophia Loren, Luchino Visconti, Ettore Scola, Jean-Louis Trintignant, Sergio Leone, les lauréats de la Palme d’Or et les Présidents du Jury danois, polonais, suédois, etc. Et peut-être même qu’on verra sur la photo Monica Bellucci et Sophie Marceau ! Eh bien non ! Mille fois non ! Dans son reportage enamouré, la journaliste ne nous nommera que des représentants du cinéma américain, du modèle américain et donc mondial, de la culture (!) dominante ! Oui, rien que des Américains !

27/05/2017

Devinette XIX : Christine

Dans le billet du 25 mai 2017, on trouve cette phrase : « À moins de rappeler Christine… ? ». De qui s’agit-il ? Pourquoi ?

Quel est le point commun entre les deux personnes évoquées dans les devinettes XVIII et XIX, que rien ne rapproche sinon ?

07:30 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0)

25/05/2017

La langue de la campagne II

J’ai vu (deux fois), à la télévision, M. Macron à son bureau, lors de la campagne présidentielle, recevant un appel de l’ancien Président des États-Unis d’Amérique, Barak Obama, ex-idole des « progressistes » français. Coup de chance pour le reportage hagiographique, M. Obama parlait un anglais châtié, clair, énoncé lentement (ayant fait des études supérieures, il sait que la France existe et que tout le monde n’y comprend pas l’anglais) ; en conséquence de quoi M. Macron (et nous-mêmes) le comprenions parfaitement.

Maintenant regardons bien : la posture du candidat, flatté de l’appel, bon élève à l’écoute du maître, attentif, intimidé, illustre parfaitement l’argumentation de Benoît Duteurtre (nous vivons dans une colonie et nous faisons de notre mieux pour être « à l’image du modèle », cf. mon billet du 15 mai 2017).

Et écoutons aussi : M. Macron est comme nous dans l’exercice difficile du téléphone en langue étrangère ; il acquiesce, il approuve par monosyllabes, il construit peu de phrases, il n’échange pas vraiment, il ne peut pas vraiment dialoguer et même, sauf erreur de ma part, il loupe un bel anglicisme à la fin, disant quelque chose comme « thank you to call » au lieu de « thank you for calling ».

Le changement, c’est maintenant ! C’est mieux que M. Hollande, c’est même mieux, soit dit en passant que M. Hérault qui était présenté comme germanophone et qu’on n’a jamais entendu vraiment parler allemand…

Mais comment M. Macron va-t-il pouvoir négocier en anglais ?

À moins de rappeler Christine… ? 

Lors du débat avant le premier tour, un journaliste a demandé aux candidats s’ils étaient à l’aise avec l’anglais. Comme réponses, on n’a entendu que des borborygmes (peut-être un vague « Yes » par-ci par-là, même pas « Yes I am » ou « Yes I do »). Les autres candidats n’étaient donc sûrement pas meilleurs que M. Macron dans ce domaine. Mais pourquoi une telle question, dont les journalistes n’attendent même pas une vraie réponse ? Ou bien l’anglais de la vache espagnole suffit et alors la question n’a pas lieu d’être. Ou bien l’anglais courant ou fluide est une condition sine qua non à l’accès à la fonction suprême et alors il faut procéder comme dans les entretiens d’embauche sérieux : l’interrogateur – lui-même parfait polyglotte – passe sans crier gare à l’anglais et l’entretien se poursuit dans cette langue. Mais un seul de ces journalistes était-il capable de faire cela ?