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05/03/2015

Délivrez-nous du mal (financier)

Une association d’idées, très libre, me fait passer de Julien Green, évoqué dans le billet d’hier et obnubilé par la question du bien et du mal, à la finance…

On peut y voir une préoccupation morale, voire politique…

En l’occurrence, c’est encore une fois une question linguistique !

Les langages spécialisés (langue des métiers, des marins aux maçons, en passant par les ébénistes) ont leur légitimité et leur importance car des concepts et des gestes spécialisés réclament des mots spécialisés. Malheureusement, il n’y a même pas besoin que ces métiers s’étiolent pour que leur langue propre disparaisse ; on préfère généralement utiliser un vocabulaire impropre, imprécis, faute de connaître les mots justes.

Euros.jpgMais la finance, il me semble, s’est distinguée par la manie d’utiliser des mots impropres pour nommer des phénomènes somme toute assez banals, la plupart du temps pour « sonner » anglais et donc faire prétendument plus savant.

J’ai déjà parlé du verbe « anticiper » ; en français, il signifie « prendre les devants », « préparer une action en imaginant ce qui va se passer » ; or les analystes et journalistes financiers l’utilisent dans le sens de « s’attendre à », « être quasiment sûr que ». Sans raison valable, me semble-t-il.

Autre exemple, tout aussi énervant, et qui a fait florès dans les fameux projets européens (Eureka, BRITE and co) : « délivrer », calque de l’anglais « deliver ».

Dans un entretien, Olivier Baduel (Médi-action) parle ainsi de « délivrer une performance supérieure à notre indice de référence… ».

Dans les projets, on s’échine aussi fréquemment à ne pas rater l’échéance des fameux deliverables…, quitte à les appeler « délivrables ». Dans le meilleur des cas, on parle de « livrables », au moins c’est concis. Mais « livraisons » existe depuis toujours !

Et à propos de finances, une pensée amicale et solidaire pour les Grecs...

04/03/2015

Devinette (III) : réponses

Bien sûr, il y avait le calembour sur Line Renaud dans le titre… voilà pour la forme

Et, sur le fond, il était question de Renault autant que des Yvelines dans ce billet, en ce qui concernait leur attrait maniaque pour l'anglais, sauf que j'avais oublié d'inclure le paragraphe que voici :

"En son temps, chez Renault (encore Renault !), Louis Schweitzer avait imposé l'anglais dans son conseil d'administration, sans même arguer du même motif que l'inénarrable Didier Michaud-Daniel (Bureau Véritas) (voir mon billet du 18 février 2015). Parce que ça faisait chic, sans doute".

Désolé, ce n'était pas plus "rusé" que cela...

15:15 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0)

La nouvelle tour de Babel selon Julien Green

Un peu par hasard, en butinant, j’ai trouvé cette citation de Julien Green (1900-1998) dans le blogue de Juan Asensio :

Julien Green.jpg« Simplifier la langue appauvrit la pensée. La langue qu’on essaie d’instaurer par ordinateur pour faciliter les échanges devient un magma universel, sans la fantaisie du volapük ou de l’espéranto et conduit à la pensée unique. De nouveau on construit Babel avec le même orgueil, mais de nos jours c’est une Babel horizontale, on commence par la confusion, on l’étend. Le plus terrible châtiment est là : la confusion par la simplification »…

« De la confusion. Ce serait le traité qu’il faudrait écrire. Je n’ai plus l’âge de m’adonner à ce genre d’exercice, mais il est vrai que la confusion a remplacé la déesse Raison. Pour se borner au langage, nous en arrivons à une nouvelle Babel, cette fois en creux, car sans orgueil, sans espérances, sans dangers ».

Quelques mots en passant sur Juan Asensio : il a ouvert son blogue consacré à la littérature en 2004 ; spécialiste de Georges Bernanos, il a écrit également un essai sur Georges Steiner et collabore à diverses revues. Ses critiques, pour ce que j’en ai lu (une descente en flamme de Philippe Sollers – qui ne l’a pas volée – , une longue analyse du « Livre de ma mère » d’Albert Cohen), sont fouillées, documentées et très « bavardes ». Ce spécialiste, qui a failli faire une thèse de doctorat sur « la figuration du diable dans les romans de Bernanos, Green et Mauriac » parle à des spécialistes… béotiens s’abstenir !