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06/04/2015

Irritations XI : au sens propre comme au Figaro

J’ai beaucoup cité le Figaro ces derniers temps, vous l’avez remarqué. Du coup, certains se sont dit que j’en parlais comme un nouveau converti d’une foi toute neuve ou bien comme un amoureux d’une idylle balbutiante…

Il n’en est rien ! Il se trouve que, chauvinisme, conservatisme ou opportunisme aidant, le Figaro a consacré beaucoup d’articles à la langue française et à ses langues-mères, entrant ainsi en plein dans l’objet et les préoccupations de ce blogue.

 

Mais de passion aveugle, point !

Il y a même matière à irritation, bien sûr, à la lecture de ce quotidien si bien pensant et pourtant parfois si relâché. Que l’on en juge !

 

Saumon.jpgJ’ouvre le cahier « économie » du 25 mars 2015, souvent appelé « les feuilles saumon ». Page 24, un grand article est consacré à « SNCF Logistics », qui n’est autre que le nouveau nom de « SNCF Géodis ». Pourquoi donc « Logistics », même si l’on apprend que la SNCF mise tout sur l’international, l’Hexagone étant condamné à la réduction inexorable de la part du fret au profit de la route ? Est-ce pour faire oublier dans les pays étrangers que dans SNCF il y a « français » et que ce serait une marque infâmante ? Est-ce que « SNCF Logistique » n’était pas tout aussi porteur dans les pays européens et ailleurs, et tout aussi compréhensible ? Il est vrai que, sur ce coup-là, le Figaro ne peut pas grand-chose. Dont acte.

 

Tournons la page. Sous le titre « Les télécoms bichonnent les familles », on a droit au délire franglophone des opérateurs bien de chez nous qui s’adressent à leur clientèle (tout ce qu’il y a de plus français) : forfaits Silver ou Gold, souscription à une box, clients Red, Bon Plan Open… Et ça les flatte, les habitants de Auch d’être démarchés comme cela, à votre avis ? Bon, le Figaro n’est pas responsable du jargon des mercateurs post-modernes du fil de cuivre voix-données mais il pourrait atténuer les coups, nous enrober ça d’italiques et de paraphrases, non ?

 

Juste en dessous, « EDF subventionne un million d’ampoules LED », et on nous dit que ces produits seront « co-brandés », de telle manière que le consommateur saura qu’EDF est associé à cette initiative. Là, personne n’a obligé Frédéric de Monicault à étaler son snobisme au milieu de la page 25 ! C’est sans doute qu’il rêve d’exercer ses talents dans Challenge ou Vogue…

 

En dernière page, le cahier saumon se lâche : « Ses jeux simplistes figurent systématiquement dans le top des téléchargements ». Allez savoir pourquoi Benjamin Ferran n’a pas écrit « le top des downloadings », ça aurait été plus cohérent…

Et à côté : « Carat prévoit que le digital pèsera un quart du marché publicitaire en 2015 ». Ce qui est drôle, c’est que dans l’article qui suit ce titre, on lit « Pour la première fois, le numérique devrait représenter plus d’un quart des dépenses des annonceurs » ! À cela deux raisons : d’une part les journalistes sont convaincus que les mots à consonance anglaise « communiquent mieux » que leurs équivalents français (et alors là, c’est de notre faute à nous, les veaux, qui les avons laissé penser cela) et d’autre part parce que, depuis l’école primaire (du moins celle de mon enfance, qui est bien loin), on nous serine que les répétitions dans un texte, c’est pas bien. Alors le journaliste du Figaro se dit : un mot franglais, un mot français, pour exprimer la même chose, et le tour est joué.

 

L’hebdomadaire « Le Revenu », qui nous a habitués à mieux, fait de même : sous le titre « Crowdfunding », il écrit dans son numéro du 3 avril 2015 « Ce sera une première dans le financement participatif en France ». J’ai même lu quelque part, plus pervers : « Le financement participatif, plus connu sous le nom de crowdfunding… ». Mettez-vous à la place de celui qui a de l’argent à placer ; allez-vous faire du crowdfunding ou du financement participatif ?

 

Je prends les paris.

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