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05/04/2015

La boulette de Napoléon

Napoléon a fait le Code civil, un monument, mais il a commis aussi de nombreuses erreurs : le népotisme, le placement de sa famille aux quatre coins de l’Europe, l’invasion de la Russie, Waterloo, les cents jours…

Moins coûteuse en vies humaines mais catastrophique au point de vue stratégique a été la vente, à vil prix, de la Louisiane, petit joyau tropical sur le golfe du Mexique, qui avait été dédié au roi Louis.

Pourquoi catastrophique ? mais parce que ce foyer de francophonie a été étouffé dans l’œuf, écrasé par le rouleau compresseur culturel de l’anglo-américain.

 

Le Figaro du 20 mars 2015 nous rappelle l’histoire de ce territoire, en nous renvoyant au XVIIè siècle ; en 1764, c’est le « grand dérangement », à savoir l’arrivée par la mer de milliers d’Acadiens chassés du Canada, qui s’installent à la campagne, dans les « bayous » ; ce seront les Cadiens ou Cajuns, aux riches traditions ancestrales. (NDLR : rappelons-nous la chanson de Zacharie Richard).

 

D’autres immigrations francophones viendront peupler ce territoire, mais plutôt dans les villes : Français de France, Haïtiens, originaires des Caraïbes… qui se mélangeront aux Noirs et aux Hispaniques. Cela donnera la culture créole, dont la Nouvelle-Orléans porte le flambeau.

 

cajun.jpgTout va bien jusqu’en 1916, les cajuns défendent leur culture et de nombreux journaux à la Nouvelle-Orléans paraissent en français. Puis tout bascule : le français est interdit, et c’est l’anglicisation forcée, avec des sanctions dans les écoles pour les petits francophones ! Une génération est sacrifiée.

 

Les guerres ont du bon ! Les troupes américaines ont besoin de francophones pour préparer le débarquement et, du coup, le français paraît moins « ringard »… Mais l’ostracisme des années 20 a laissé des traces.

 

Ce n’est que dans les années 60 que ce produit un « réveil identitaire », avec la musique cajun ; en 1968, les autorités de Luisiane créent le Conseil pour le développement du français en Louisiane (CODOFIL), qui déclare l’État officiellement bilingue ! Incroyable, non ? La France détache alors des dizaines de professeurs de l’Éducation nationale dans les lycées locaux. On estime que 160000 personnes parlent français aujourd’hui en Louisiane et que 4500 élèves y sont scolarisés en français.

 

« Beaucoup de jeunes Louisianais reviennent vers leurs racines, ils veulent faire vivre la francophonie » constate le Consul général de France, Grégor Trumel, et les autorités tentent « de profiter de l’atout politique et économique que représente cette identité au niveau international »

 

Là-bas, les villes s’appellent Bâton rouge, Arnaudville, Lafayette, Pont Breaux… mais il est vrai qu’avec l’accent américain, on ne s’en aperçoit pas toujours.

 

Langue, culture, histoire, tout est lié ; au moment où se créent, dans la mondialisation triomphante, des « blocs » économiques énormes, des peuples  se refragmentent, s’individualisent, s’autonomisent (voir l’Écosse, la Catalogne, les nouveaux États en Afrique…).

 

Le pire n’est jamais sûr ! Résistons.

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