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04/02/2018

Elle me manquait trop, me revoici !

Elle me manquait trop, depuis cet adieu de décembre 2017...

Tant de semaines de silence, tant de belles choses lues sans pouvoir en parler...

Et ces fidèles - oh, peu nombreux... et surtout d'Amérique du Nord - qui bon an mal an faisaient que la fréquentation du blogue n'était jamais nulle...

Elle m'a tellement manqué qu'aujourd'hui, je reprends mon stylo et mes imagettes pour prolonger l'échange.

Je serai peut-être plus bref, j'écrirai peut-être moins régulièrement et moins fréquemment mais... me revoici !

Elle m'a tellement manqué que je replonge avec délice ; qui est-elle ?

18/12/2017

Retour à Mabanckou

Mon commentaire de l’article de MM. Mbembé et Sarr m’a donné l’occasion de revenir à Alain Mabanckou, qui s’est exprimé souvent sur cette question des relations entre l’Afrique et le monde occidental, et aussi sur la place de la littérature africaine francophone, qu’il fait connaître inlassablement, lui qui, né au Congo-Brazzaville, a étudié en France et a obtenu un poste de professeur en Californie, à Los Angeles. 

Je dispose pour cela de deux articles parus dans Marianne les 7 octobre 2016 et 3 mars 2017, et tous les deux signés de Frédérique Briard.

Le premier commente son livre « Le monde est mon langage » (Grasset, 2016), nouvel essai – dans lequel il excelle – après la parution en 2015 de son onzième roman « Petit piment ».

Cet essai est un hymne à la langue française et à son rayonnement dans le monde. Alain Mabanckou y parle de ces rencontres avec dix-neuf écrivains qu’il apprécie, dans dix-neuf villes autour de la planète : Dany Laferrière, Sony Labou Tansi, JMG Le Clézio, Aminata Sow Fall et bien d’autres.

Le second est carrément un éloge dithyrambique du professeur au Collège de France qui a donné des conférences au premier semestre de 2016 dans l’amphithéâtre Marguerite de Navarre plein comme un œuf (j’y étais et j’en ai parlé dans ce blogue), ainsi qu’un colloque « Penser et écrire l’Afrique aujourd’hui » le 2 mai 2016, qui a rassemblé dix-neuf écrivains, historiens, philosophes, afin de réhabiliter les études littéraires africaines (décidément, dix-neuf serait-il un nombre magique ?) et de ne plus cantonner les productions africaines « dans un département exotique de la littérature française ». Il paraît que c’est ce que savent faire les Américains, en particulier en nommant dans d’illustres facultés des écrivains-professeurs comme Maryse Condé, Édouard Glissant, Emmanuel Dongala et donc Alain Mabanckou.

Et c’est qu’au détour d’un paragraphe on retrouve Achille Mbembé, philosophe qui réclame pour l’Afrique « un nouvel âge de dispersion et de circulation » ! 

Alain-Mabanckou-Silence-on-fraude!.jpg

Alain Mabanckou n’est pas un pleurnichard ni un revanchard ; il avance et il veut que l’Afrique fasse de même.

11/12/2017

Afrique et France : enfermée dans le giron linguistique francophone... vraiment ?

Après tous ces éléments à charge, MM. Mbembé et Sarr abordent un autre thème, dans leur article du Monde du 27 novembre 2017, sous le titre « Enfermés dans le giron linguistique francophone ».

Ce chapitre commence par reconnaître qu’il ne faut pas « faire de la France le bouc émissaire de tant de malheurs que nous (les Africains) aurions pu éviter » ni « lui octroyer davantage de pouvoir qu’elle n’en a véritablement dans nos affaires » car « elle ne dispose guère de la capacité de nous faire faire n’importe quoi, et surtout contre notre gré ». Et c’est là la faiblesse de la diatribe : la France est-elle un monstre en Afrique, oui ou non ? 

« La majorité des Africains n’attend plus grand-chose de la France. Il reste à faire le pas suivant, c’est-à-dire comprendre qu’il n’y a rien à attendre du reste du monde que nous ne puissions nous offrir à nous-mêmes ». Même s’il semble aujourd’hui présomptueux, ce programme est sage et lucide. (Une fois de plus, déplorons ce travers journalistique qui consiste à extraire une phrase de son contexte – et même à en modifier le sens – dans le seul but d’en faire un titre accrocheur ou provocateur ! Même « Le Monde » fait cela, en l’occurrence il a titré : « Africains, il n’y a rien à attendre de la France que nous ne puissions nous offrir à nous-mêmes » ; ce n’est pas ce qu’ont écrit MM. Membé et Sarr !).

C’est le tournant de l’article pour nous car on en vient aux questions de langue, en l’occurrence au français, ce qui nous intéresse au premier chef.

« Une bifurcation culturelle s’esquisse parmi les élites. Elle oppose désormais ceux qui sont enfermés dans le giron linguistique francophone à ceux qui en sont sortis. Ces derniers parlent d’autres langues (l’anglais notamment) et s’inscrivent désormais dans d’autres faisceaux d’intérêt et de sens ». Bon vent à ceux-là qui ont choisi le giron anglo-saxon ! Ils verront bien à terme s’ils ont gagné au change. L’herbe est toujours plus verte ailleurs… 

« Les rapports franco-africains postcoloniaux reposent sur très peu de valeurs que la France et l’Afrique auraient en partage ». 

« Le processus de décolonisation de l’imaginaire africain est en phase d’accélération ». 

C’est clair, ces deux-là demandent le divorce, tout en déplorant que « la rente de circulation (visas, bourses, possibilités d’aller et de venir et autres facilités) » se tarisse ! Le beurre et l’argent du beurre ?

Toutes proportions gardées, cela me fait penser à l’ouverture du marché français de l’électricité au cours des années 2000 : les plus vindicatifs à se plaindre du monopole de l’opérateur historique ont été aussi les plus plaintifs de ce que ce dernier, tout à coup, ne donnait plus rien gratuitement et ne fonctionnait plus à livres ouverts…

Et nos auteurs de proclamer, exactement comme en Occident, « le désir irrépressible de mobilité, le refus des frontières et la revendication, y compris transgressive, d’un droit inaliénable à la circulation ». Ben voyons, « le bonheur si je veux ! ». 

Comme souvent, c’est la conclusion qui pèche… trop courte, subitement trop bienveillante (après trois pages de récriminations) et béatement optimiste. On nous parle tout à coup de « la densité des rapports humains, de la somme des vies communes, des visages d’hommes et de femmes, tissées au long de quelques cycles de cohabitation ». Et tout à coup, la langue, « ce bien commun et en supplément » redevient aimable, à condition d’être « dénationalisée et dé-francophonisée afin d’en faire une langue-monde », tandis que « la réinvention des rapports entre la France et l’Afrique n’a de sens que si ces rapports contribuent à une nouvelle imagination du monde et de la planète » ; rien que cela ! On a envie de dire : pourquoi nous ? 

En passant, on découvre une affirmation péremptoire : « Les arts du XXIème siècle seront africains »… Ah bon ? Je croyais qu’ils émanaient plutôt de New-York, de Berlin ou de San Francisco… 

Et pour conclure moi-même, je dirai ceci :

Nos auteurs parlent de l’Afrique, comme si elle n’avait qu’une seule voix… Mais c’est un continent ! Y a-t-il vraiment une Afrique ?

Et un continent qui se déchire et doit surmonter des guerres intestines ! Est-ce vraiment le combat prioritaire que de s’attaquer à la France et d’en rester au colonialisme et au post-colonialisme ?

Enfin l’Afrique a besoin (comme tout le monde) d’alliés ; est-ce le moment de se fâcher avec ses proches ?