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24/06/2017

Devinette XX : Anne, Bernard, Guillaume et les autres

Dans mon billet du 19 juin 2017, je parle de « la ministre de l’Éducation que l’on ne regrettera pas », de Alan, de « notre amie Anne », de « Bernard aux cinq couronnes », de « Guillaume »…

Qui sont ces personnes ?

Saurez-vous retrouver leur patronyme ?

07:30 Publié dans Blog | Lien permanent | Commentaires (0)

22/06/2017

"Pourquoi je préfère rester chez moi" (Benoît Duteurtre) : critique IV (Barry White et Olivier Messiaen)

Retour à « Pourquoi je préfère rester chez moi », recueil des humeurs et des enthousiasmes du critique Benoît Duteurtre.

À partir du chapitre 7, « Musiques de bordel », il argumente, avec un certain brio, sur ses préférences artistiques ; ainsi adore-t-il le chanteur populaire américain Barry White et révère-t-il le compositeur et organiste français Olivier Messien… Très bien, rien à y redire ; on partage ses goûts ou non mais comme sa culture et ses exigences sont élevées, il n’y a pas matière à polémiquer. À se passionner non plus… !

Il parle d’abord de sa découverte de la soul music américaine  : « Dignes descendants des maîtres du swing, ils creusaient le filon inépuisable de la danse sous le regard condescendant des spécialistes de pop music – prompts à ranger tout cela sous le terme infâmant de disco », puis déclare sa passion pour Barry White, à partir de la fin des années 70, qui « avait alors apporté un complément nécessaire à mes délices : le slow, la musique lente, domaines d’excellence où se distinguait son propre talent ». Il disserte longuement sur ce qu’il considère comme son chef d’œuvre : « Sheet music ». J’ai moi-même une compilation des succès de Barry White, «  The ultimate collection » (je l’écoute en écrivant ces lignes…), ce titre n’en fait pas partie (peut-être parce qu’il est trop long). « Même quand les noms des arrangeurs changent, la musique reste la même, et Barry White apparaît comme le principal auteur de ce produit musical sophistiqué qui sublime les recettes sucrées de la variété. Jamais dans la musique soul, l’orchestre à cordes n’a été autant sollicité ni travaillé pour envelopper chaque mélodie » (page 95). Peut-être mais cela reste de la variété – c’est-à-dire de la mélodie bien faite et bien orchestrée, surtout bien orchestrée – prête à consommer et qui ne prétend à aucune pérennité. Quand on voit le mépris dans lequel est tenue la « variété française » (en dépit des goûts du grand public), la modération s’impose dans l’enthousiasme vis-à-vis de Barry White et compères, sachant que, bien entendu, les goûts et les couleurs ne se discutent pas.

Barry White.jpgBenoît Duteurtre, critique musical lucide, n’ignore pas ces considérations. Alors, dans une deuxième partie, il en rajoute : « Les chansons de Barry White soulèvent des questions sérieuses (sic !). Elles nous invitent à réfléchir à ce contraste paradoxal entre un langage simple, voire pauvre (c’est ainsi qu’un musicologue le qualifierait) et une musique personnelle autant que singulière. Car le musicologue en question soulignerait que tout se résume ici à deux ou trois accords, inlassablement alternés ; que la mélodie et l’harmonie n’échappent jamais aux enchaînements convenus d’une musique tonale matinée de blues ; que la rythmique, pas davantage, ne s’affranchit du cadre d’une invariable mesure à quatre temps, à l’intérieur de laquelle tout se passe : c’est-à-dire rien ! » (page 96). Et d’accuser « une certaine vision européenne de l’histoire musicale », qui aurait opposé les tenants de la musique italienne (simple…) à ceux de la musique allemande (complexe…) ; et, à la fin, comme disait Gary Lineker, c’est toujours l’Allemagne qui gagne…

Plus intéressant, Benoît Duteurtre, page 99, rend hommage à l'arrangeur qui souvent « fin musicien, souvent passé par les études classiques, et qui a pour tâche d’habiller un bout de mélodie et de la transformer en création musicale ». Il cite à juste titre Jean-Michel Defaye, François Rauber, Alain Goraguer, Klaus Ogermann, sans qui les chefs d’œuvre de Léo Ferré, Jacques Brel, Serge Gainsbourg, Joaõ Gilberto n’auraient pas été ce qu’ils furent, et bizarrement il oublie George Martin et Quincy Jones. Pour lui, c’est dans cet ensemble abouti – mélodie entrainante, voix langoureuse et riches arrangements – que réside la magie des chansons de Barry White.

Olivier Messiaen.jpgLa suite de l’article est plus complexe mais bien plus enrichissante : elle parle de l’organiste et compositeur Olivier Messiaen, « formé au conservatoire de Paris, inspiré par les grands compositeurs du début du XXème siècle – Debussy, Ravel, Stravinski – (…) et dont la rythmique extraordinairement complexe s’inspirait des échelles de la musique indienne » (page 101). Il paraît que Pierre Boulez qualifiait ses créations de « musique de bordel »… alors qu’il avait été son élève, comme Stockhausen et Xenakis ! Pendant dix ans, Olivier Messiaen, touché par ces critiques, avait adopté « une seconde manière » de composer et recherché la complexité, avant de revenir à son style propre.

Pour Benoît Duteurtre, « Messiaen apparaît toujours davantage comme le plus grand compositeur français depuis Debussy et Ravel, célébré à ce titre par tous les musiciens et les orchestres du monde » (page 103). Et il faut lire les deux dernières pages qu’il lui consacre, à la fois réalistes sur l’homme et enthousiastes sur le musicien, magnifiques.

19/06/2017

Irritations linguistiques L : franglais un jour, franglais toujours

La houle atlantique continue à faire échouer sans relâche sur nos côtes ses épaves de mots américains représentatifs de l’actualité et de l’évolution des idées chez l’Oncle Sam et à ce titre immédiatement adoptés avec gourmandise par nos concitoyens de tous âges.

La chose est ancienne, c’est vrai, et imprègne toutes les catégories de Français. Le mois dernier, par exemple, c’était un étudiant en licence qui me demandait si les « réunions » dont je parlais étaient bien des meetings… Prudemment, je me suis d’abord assuré que sa langue maternelle était bien le français ; puis je me suis étonné (avec une certaine virulence, il est vrai) que l’on me demande de traduire en franglais un mot que tout un chacun comprend sans difficulté. Ainsi va le tsunami linguistique, qui bien sûr ne fait pas de victime physique et qui, sans doute, est moins grave que d’autres lames de fond qui secouent, événement « non mixte » après événement « non mixte », prise de position démagogique après prise de position démagogique, la société française d’aujourd’hui… mais tout de même ! 

Récemment la ministre de l’Éducation nationale que l’on ne regrettera pas, réagissait à la télévision à une accusation d’avoir entrepris une réforme de l’orthographe, en déclarant que cette affirmation était « une fake new » (rapporté dans le Marianne du 26 mai 2017)… Elle pouvait tout aussi bien dire que c’était une rumeur infondée, un faux, une allégation mensongère, etc. Mais non, elle avait sans doute peur de n’être pas comprise. Comme disait Alan : « si vous m’avez compris, c’est que je me suis mal exprimé ! ». Soit dit en passant, si elle n’avait effectivement pas mené la réforme de l’orthographe (et pour cause, celle-ci date de 1990 !), elle l’avait quand même remis à l’ordre du jour en décidant de la faire appliquer dans les établissements d’enseignement (alors que cette réforme était d’application facultative).

Dans le même magazine, une semaine plus tôt, on lisait que, en « parler Macron », un bénévole qui donnait un coup de main s’appelait un helper. Et que, quand la Ville de Paris, la Ville-lumière éclairant le monde chère à notre amie Anne, « se mobilise en faveur du deux-roues, elle lance le Paris Bike Festival ». Et son journaliste ajoutait : « Pourquoi rouler français dès lors qu’on peut faire la promotion du globish ? ». C’est notre Bernard aux cinq couronnes qui doit être content…

Dans le même magazine, mais le 28 avril 2017, Renaud Dély, dissertant sur l’urgence républicaine, écrivait : « Dans ce monde de buzz, de tweets et de fake news, où l’image fait office de sens et où l’indécence n’a plus de limites, son incompétence est devenue un atout ».

Guillaume, lui, pourtant très fier de la notoriété de la marque « TGV », n’a pas craint de la remplacer (d’essayer en tous cas de la remplacer) par « inOUI ». Que de temps et d’argent gaspillé ! La seule chose intéressante dans l’affaire est la graphie du mot lui-même, qui aurait enchanté Georges Pérec et peut-être Apollinaire (l’autre Guillaume) : il se lit de la même façon de gauche à droite et de droite à gauche (c’est cela la macronie) ; en fait il présente une double symétrie : par rapport au centre O et par rapport à une droite (horizontale) qui passe en son milieu (vérifiez-le donc en retournant de bas en haut votre téléphone ou votre tablette (à condition que ces engins ultramodernes n’anticipent pas votre mouvement).

Ne restons pas moroses ! Et apprécions ce que Clara Dupont-Monod, écrivain et journaliste, disait dans le Marianne du 26 mai 2017 : « Nous nous appelons galimatias, larcin, pique-bœuf, perlinpinpin. Nous sommes les mots oubliés de la langue française. Nous voulions vous remercier (NDLR : Emmanuel Macron). Grâce à vous, nous existons à nouveau car vous nous employez à tire-larigot (…). Nous vous suggérons d’émailler vos discours de mots qui ne demandent qu’à renaître. Imaginez : Mes chers compatriotes, je vous l’affirme sans barguigner… Ou : Moi, diantrebleu, je fais fi des hésitations. Je le dis tout net : sus. Sus à la tiédeur (...). Et vous verrez, bientôt tout le monde désignera un pull par les mots cardigan ou chandail ! (…). Nous comptons sur vous, Monsieur le Président. Il en va de notre survie. Haro sur le baudet ! ».

Voilà, c’est bien cela la meilleure façon de résumer et d’illustrer ce qui est le fond de ce billet : la langue française compte des dizaines de milliers de mots, avec leur histoire, leur beauté, leur étymologie, leur bizarrerie parfois… Utilisons-les !