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25/04/2015

Et ça continue encore et encore ! (II)

Le syndicat FO a déclaré : "C'est la réforme du renoncement à l'instruction, à la transmission des connaissances, à la culture, à l'égalité".

Il est vrai que réformer est très difficile, surtout dans le domaine de l'éducation et des programmes scolaires. Chacun croit savoir ce qu'il faut faire et a ses idées bien arrêtées sur ce qu'est "le socle commun des connaissances indispensables" et sur ce qu'est la culture. Quant à l'égalité… laisser certains élèves étudier le latin, est-ce sacrifier l'égalité ?

L'arrivée des EPI "Enseignements pratiques interdisciplinaires", avec lesquels la ministre veut remédier à l'ennui des élèves (sic), avec des thèmes comme le développement durable et la citoyenneté, a fait réagir les professionnels de l'éducation.

Le Figaro du 17 avril 2015 cite quelques-unes des perles de la novlangue pédagogiste :

  • "Se déplacer… dans un milieu aquatique profond standardisé" pour parler d'une piscine.
  • "Créer de la vitesse" et "traverser l'eau en équilibre horizontal par immersion prolongée de la tête" pour dire "courir" et "nager".
  • "Produire des messages à l'oral et à l'écrit" pour "répondre à son professeur d'histoire-géographique".
  • "Aller de soi et de l'ici vers l'autre et l'ailleurs", objectif du programme "Langues étrangères et régionales".
  • "L'étayage entre pairs" pour qualifier le débat.
  • "L'oral scriptural" pour désigner un oral formel.
  • "L'éducation aux médias est mise en œuvre, et organisée de façon spiralaire"… No comment.

Sont-ils fous ?

Ici on parle français.jpgCombattre le jargon amputé et prétentieux des pédagogistes, c'est une tâche que je n'avais pas assignée à ce blogue, tout obnubilé que j'étais par l'invasion du franglais. Mais le jeu en vaut la chandelle. D'autant que les pédagogistes ne sont pas les seuls à jargonner. On trouve sans nul doute cette même dérive dans tous les métiers et tous les domaines d'activité. C'est aussi ce que dit Michel Lussault, président du Conseil supérieur des programmes (CSP).

Tout n'est pas perdu puisqu'on a échappé à certains délires du CSP qui avait suggéré le thème "La France, terre d'immigration depuis la nuit des temps" en histoire, pour que les élèves étudient les phénomènes migratoires ; et également d'avoir recours à la "langue première" à l'école élémentaire pour représenter la diversité de la société française...

Pierre Jacolino, professeur de français, déclare : "On assiste au retour d'une grammaire moderniste… Elle est très jargonnante, techniciste et plus complexe que la grammaire traditionnelle… On réintroduit des notions inutiles comme la situation d'énonciation". Il parle de "nettoyage par le vide" à propos de l'introduction au forceps des "projets" à la place des disciplines.

 

 

 

24/04/2015

Et ça continue encore et encore ! (I)

Le projet de réforme de Mme Belkacem ne passe décidément pas.

J'ai parlé hier de l'inquiétude sur la disparition programmée de l'enseignement de l'allemand. Je voudrais aujourd'hui revenir sur les langues anciennes, qui pourraient être victimes de la même charrette.

Le 26 mars 2015, Caroline Beyer et Marie-Estelle Pech écrivaient dans le Figaro "La réforme du collège ne convainc pas".

Le 27 mars, c'était Joseph Macé-Scaron dans Marianne :  "L'aversion latine" (voir mon billet http://lebienecrire.hautetfort.com/archive/2015/03/29/anatheme-latin-5592893.html)

Le 6 avril, dans le Figaro, Marie-Noëlle Tranchant signait une chronique intitulée "Le latin contre les nuls".

Et le 17 avril dernier, toujours dans le Figaro, c'était "Vent de colère contre la réforme du collège".

Najat Belkacem.jpgBien sûr, on peut soupçonner ce quotidien de ne pas laisser passer cette occasion rêvée de tacler le gouvernement et cette jeune ministre fringante qu'il ne porte pas dans son cœur. Et c'est vrai que c'est l'organe d'une certaine France bien pensante et conservatrice.

Mais voyons quand même les arguments avancés.

 

Premier élément : la ministre veut remplacer une partie des "disciplines" (français, mathématiques, etc.) par des "thèmes" ou des "projets" (l'Union européenne, etc.) qui incluront chacun des bribes de discipline. La réforme veut suivre l'exemple de la Finlande, qui est bien classée dans le classement PISA. Ainsi le thème "Union européenne" mêlerait des éléments d'économie, d'histoire, de langues étrangères et de géographie. C'est un peu l'application à l'Éducation nationale (mais du côté des élèves) de la gestion par projets, transversale, chère aux entreprises et orthogonale aux "Services" souvent considérés comme des "silos" qui ne décloisonnent pas assez.

Avis personnel : c'est un peu comme vouloir improviser sur un morceau de musique sans connaître les gammes ni les accords… mission impossible ! Ça me fait penser aussi aux "maths modernes" que l'on nous a balancées un jour (il y a longtemps) : quand cela venait après l'apprentissage des bases de mathématiques classiques, c'était un régal par la puissance de généralisation et d'abstraction que cela véhiculait ; mais quand cela s'abattait sur des enfants qui ne savaient pas calculer l'aire d'un rectangle, c'était désastreux. Ne fait-on pas le même genre d'erreur ?

Deuxième élément : la chasse à l'élitisme… La ministre veut fermer les filières spécifiques qui s'étaient installées dans les collèges, au risque, disent certains, de faire fuir les meilleurs élèves dans l'enseignement privé. On retrouve là notre allemand et aussi notre latin, qui serait intégré aux "enseignements pratiques interdisciplinaires", à savoir le thème "Langues et cultures de l'Antiquité".

Avis personnel : regardez le cursus de Mme Belkacem dans Wikipedia… on n'y voit ni grec ni latin ni allemand ni classes préparatoires. Ce n'est pas honteux mais ces disciplines ne doivent pas être sa préoccupation première.

 

 

 

23/04/2015

Personne ne comprendra plus "Das Auto"...

Les réformes se suivent et se ressemblent… par leur complexité. Et il est difficile à chaque fois de faire la part entre l'amélioration nécessaire, la simplification, le conservatisme, le corporatisme, les arrière-pensées politiques, idéologiques, démagogiques...

Ainsi de la réforme de Mme Belkacem qui concerne, entre autres, les langues vivantes et particulièrement l'enseignement de l'allemand.

Passons sur le fait que tout le monde considère comme acquis que l'anglais-première langue vivante soit incontournable. Il est clair que l'envahissement du monde par le modèle américain a abouti à cela. Et par ailleurs, nous n'avons probablement plus les moyens de proposer le choix de la première langue aux élèves en 6ème.

Bon, le débat se porte donc sur la deuxième : laquelle ? en quelle classe ? à quel volume horaire ?

En résumant (peut-être abusivement) la réforme qui doit entrer en vigueur, pour l'allemand, en septembre 2016, on peut dire que l'on balaye tout ce qui était en place avant la 5ème (section allemand, classes bilingues…) et qu'en échange on avance l'apprentissage de la seconde langue en 5ème (au lieu de la 4ème) POUR TOUS.

Sans être excessivement partisan, on peut penser que l'obsession qui est derrière cette n-ième réforme, est justement dans ce "POUR TOUS" et haro sur l'élitisme qui fait que certains élèves (les plus brillants ? les plus travailleurs ? les plus favorisés ?) pourraient commencer l'allemand dès la 6ème et prendre ainsi une avance scandaleuse sur leurs petits camarades.

Résultat : les professeurs et inspecteurs d'allemand sont vent debout, rejoints par un ancien premier ministre, et les pétitions se multiplient (par exemple celle-ci : http://adeaf.net ou celle-là http://www.petitions24.net/non_a_la_mort_programmee_des_langues_vivantes).

Il y a essentiellement deux arguments :

  • étudier l'allemand (comme d'ailleurs le latin) est très formateur ; prétexter sa difficulté est stupide : est-ce que le chinois, les mathématiques, la musique et l'athlétisme ne sont pas difficiles ?
  • maîtriser l'allemand est, à l'heure actuelle, l'assurance de trouver facilement un emploi ; l'Allemagne, mais aussi la Belgique et le Luxembourg, s'arrachent les bilingues français-allemand.

Wer reitet so spät durch Nacht und Wind ?

Es ist der Vater mit seinem Kind.

"Goethe, Général !".