04/07/2014
La Défense (92) du franglais
J'ai beaucoup de choses à dire et donc à écrire sur cette maladie qu'est la franglophonie...
Mais avant de commencer quelques billets salés (que je pourrais appeler billés pour "faire blog"…), je voudrais vous mettre l'eau à la bouche en images.
Cela faisait longtemps que j'avais promis à quelques-uns des futurs lecteurs de ce blogue, de faire mon petit tour d'enquêteur dans ce haut lieu de la consommation et des sièges sociaux réunis qu'est le quartier de la Défense, à côté de Paris.
La Défense, vous connaissez… c'est ça :
Mais quand on se tourne sur sa droite, on voit ceci :
et aussi ceci :
et on se dit : "pourquoi pas Pacifique, pourquoi pas Grill mexicain, pourquoi pas Accessoires" ?
Maintenant, vous entrez dans le Centre commercial "les Quatre Temps"… sur la porte, vous voyez que c'est un anglophone que l'on attend...
et dès la première galerie marchande, le ton est donné :
ah… on croyait que vous compreniez l'anglais des publicitaires… non ? alors penchez-vous bien bas ; au ras du sol, vous pourrez lire ceci :
Plus subtile, cette transformation de la syntaxe du français :
alors que cette boutique propose un service et non des montres (et devrait donc s'appeler "Service Montres").
Allez, on avance :
là, c'est pas inutile… ça apprend aux bœufs que nous sommes censés être, comment on prononce MISTER MINUTE dans la langue de la Défense.
et aussi :
et pour terminer, car les meilleures horreurs ont une fin :
Un bon dessin valant plus qu'un long discours, le mien s'arrêtera donc ici.
[Ajout du 19 juillet 2014]
Pas tout à fait car il me revient en mémoire quelques autres exactions linguistiques des publicitaires, toujours dans ce haut lieu de la consommation qu'est La Défense. Jugez-en.
Deux (immenses) panneaux publicitaires - de la communication écrite, donc - ont attiré mon attention à quelques jours d'intervalle.
Le premier a trôné sur les Quatre Temps et prétendait célébrer la jouissance qui serait attachée à l'appareil à la mode de l'époque, la Mûre (certains disent le Blackberry). Au centre de ce panneau figure une sorte de règle de vie, formulée en anglais, qui nous incite, pour ceux qui comprennent cette langue, à aimer ce que nous faisons et à faire ce que nous aimons. Personnellement, je n'ai pas vu le rapport avec l'objet, bien que j'aime les mûres par ailleurs... Comme il est interdit, en France, d'afficher des publicités en langue étrangère, le publicitaire a écrit la traduction, en petits caractères, dans un coin du panneau. Mais, pourquoi donc écrire ce message en anglais ? Est-ce le meilleur moyen de toucher les innombrables passants pressés, qui vont défiler devant ? Sauf à penser que ce ne sont tous que des snobs, acquis à la mondialisation heureuse à la mode anglo-saxonne ?
La fois d'avant, c'était pire... Asics accompagnait son logo du leit-motiv censé déterminer notre achat, à savoir : "sound body, sound mind". Cela fait chic, moderne et dans le vent (à supposer que les passants le décodent du premier coup...). Quelle illusion, quelle dérision ! Ce slogan existe en français, il n'est l'apanage des anglo-saxons ni sur le fond ni sur la forme. Nous avons en effet notre "un esprit sain dans un corps sain", tout aussi tonique et percutant. Mais surtout, nous avons le fabuleux "mens sana in corpore sano", autrement mieux balancé et vieux, lui, comme le monde (latin ou peut-être grec !).
Que veut-on nous faire croire ?
Que nous comprenons l'anglais ?
Que notre français est dépassé, incapable de formuler le monde d'aujourd'hui ?
Qu'il est plus simple, moins coûteux, et donc plus rentable, d'afficher les mêmes panneaux dans le monde entier, dans la même langue, pour les mêmes consommateurs interchangeables ?
Il faut donc résister : défendre et illustrer notre lingua franca (ce qui n'empêche pas de savourer les richesses de l'anglais mais aussi de l'allemand, de l'espagnol, de l'italien, du portugais...), protester en tous lieux contre l'envahissement injustifié des termes anglais, utiliser les nouveaux mots des commissions de terminologie, innover en créant de nouveaux termes.
15:25 | Lien permanent | Commentaires (0)
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