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02/05/2015

C'était Alexandrie...

"Le Club grec est un bâtiment bas qui a connu des jours plus glorieux. Même en cette journée dominicale, il ne rassemble plus que quelques tablées d'habitués, des joueurs de jacquet égrotants, de vieilles femmes qui échangent des commérages en grec, et quelques autres plus jeunes, qui sont venues accompagnées de leur mari égyptien et parlent arabe avec eux.

À l'entrée, la liste affichée des membres du club, classés par ancienneté sur une feuille Excel, voit les noms grecs se raréfier au profit des patronymes égyptiens typiques, coptes mais aussi musulmans. Elle est désormais rédigée en anglais".

"Sans doute Cavafy et Tsirkas ont-ils hanté ces lieux, mais rien ne marque, dans cette salle où seule demeure la mémoire hiérarchisée de la richesse, la trace du passage des meilleurs auteurs de l'hellénisme moderne, désargentés. La communauté, autrefois florissante, ne compte plus que quelques centaines d'âmes et beaucoup de trépassés, dont les cimetières occupent de vastes espaces mitoyens".

"Il est la quintessence du Franco-Levantin... Cette espèce menacée, en voie de disparition, désignait la sub-culture de l'Alexandrie cosmopolite et de la vallée du Nil. Ses différentes composantes, minoritaires d'origine sud-européenne, arménienne, chaldéenne, maltaise, libano-syrienne...ainsi qu'Égyptiens cultivés, communiquaient en ce français nilotique, à la mélodie italienne. Il était faufilé d'expressions particulières démarquées de l'arabe, comme "bonne arrivée" et l'on y comptait en piastres - un étudiant désargenté n'avait pas la piastre -".

(Extraits de "Passion arabe" de Gilles Kepel, Gallimard, 2013, chapitre "Égypte").

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