14/12/2014
En passant par la Lorraine (I)
La Lorraine a longtemps été coincée entre la France et l’Allemagne actuelles ; c’est un territoire de passage, donc ravagé par les envahisseurs tout au long de son histoire. Avant (la préhistoire), on n’a guère d’information ; tout commence donc avec les Celtes, venus de l’Est, que les Romains appelleront les Gaulois ; les Celtes, bousculés par les Alamans dans les années 50 (avant Jésus-Christ), les appellent au secours, justement, ces Romains ; ce sera la Pax romana jusqu’en 250. Mais après les invasions recommencent et s’enchaînent : Alamans, Francs et même les Huns… La Lorraine, en ce temps-là, est partagée en trois peuplades, dont les Leuques au sud (vers la Bourgogne). Un roi franc, Clovis, met tout le monde d’accord, le temps d’un règne ; ensuite, ce sont les successions, les coups bas et l’impuissance des Mérovingiens, jusqu’à ce que le (premier) grand Charles (Charlemagne) unifie l’Europe : la Lorraine est centrale et balance entre attirance romane et attirance germanique, y compris quant à sa langue. Au cours de siècles, Metz et Nancy, après Verdun, Bar et Toul, se disputent la préséance ; ce n’est donc pas qu’une histoire d’autoroute courbe et de ligne de TGV mi-chèvre mi-chou… De même, le caractère germanique du dialecte de Moselle, au Nord, n’est pas une conséquence de la défaite de 1870 mais remonte bien plus loin.
La Renaissance, l’époque classique et le siècle des Lumières voient une longue rivalité entre la Lorraine et la France des monarques absolus, qui alterne ruses diplomatiques et coups de force : René d’Anjou, placé par la France à la tête du Duché, affirme son indépendance en battant Charles le Téméraire (Duc de Bourgogne), Charles III embellit Nancy, il y a une université à Pont-à-Mousson, Charles IV essaie de résister à Louis XIV qui s’installe à Nancy, la guerre de Trente ans ravage la Lorraine. Enfin l’apothéose avec le Duc Léopold, qui fait construire un château à Lunéville, réplique de Versailles et de Trianon, avec des bassins, des kiosques, des cascades, des automates. La Lorraine confirme sa place de haut lieu culturel, où règne la liberté et la créativité.
C’est le dernier Duc de la dynastie… car survient un coup diplomatique inimaginable : Stanislas Leckzinsky, chassé deux fois du trône de Pologne et qui erre en Europe, a le bon goût de devenir le beau-père de Louis XV ; pour le recaser, à la façon d’un quelconque ministre des temps modernes, on persuade le Duc de Lorraine François III qu’il serait mieux en Toscane ; il y va donc sous le nom de François II ; en fait, fils de l’Empereur d’Autriche-Hongrie, il lorgne surtout sur l’Empire, qu’il finit par obtenir sous le nom de François Ier (c’est la compatibilité descendante chère à Apple…). La place est donc libre pour Stanislas qui devient Duc de Lorraine, à la condition que celle-ci soit rattachée au royaume de France à sa mort ; je ne suis donc français que depuis 1766, bien après les Alsaciens…
La Révolution partage la Lorraine en quatre départements, dont les Vosges et, malheureusement, comme partout, détruit et disperse nombre de monuments et de chefs d’œuvre.
Dans les premières années du XXè siècle, la Lorraine brille encore en devenant un des foyers majeurs de l’Art nouveau grâce à Louis Majorelle et les artistes et artisans qui l’entourent : ce sera l’École de Nancy.
08:00 Publié dans Histoire et langue française | Lien permanent | Commentaires (0)
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