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04/10/2018

Irritations linguistiques (nouvelle série) : franglais à tous les coins de rue

Le font-ils exprès ? Sont-ils inconscients ?

Ça faisait longtemps que je ne m’étais pas insurgé contre la logorrhée franglaise (longtemps aussi, il est vrai, que je n’avais pas lu un hebdomadaire, concentré que j’étais sur les romans de mon été).

Mais alors là, la fureur, le dépit et l’abattement me reprennent de plus belle ; c’est l’article de Manuelle Calmat dans le Marianne du 24 août 2018 qui a déclenché pareille urticaire. Sagement (ou prudemment ?) intitulé « Le sport de rue envahit la ville », il veut nous convaincre que cette activité nouvelle – évidemment importée des États-Unis, sinon ce ne serait pas drôle – est « plus qu’un simple sport, une discipline qui apaise, structure et rassemble ». Je ne sais pas dans quelle ville habite cette journaliste (Paris évidemment) mais dans la mienne, à part les parcours Vita et les coureurs à pied, jamais entendu parler de ça. Mes amis du Loir-et-Cher doivent bien rigoler s’ils ont lu l’article, notre gymnaste prétend pourtant que Clermont-Ferrand est aussi entrée dans la danse... 

Le problème, c’est que le deuxième mot après ce titre BCBG est street workout… Après un début aussi prometteur, pourquoi s’arrêter : « no pain no gain », « un shotde motivation », « la grande tribu des workers et workeuses », « ce spotparisien », « calisthénics », « à l’instar du skate », « la pratique underground », « empowerment », « le crossfit », « marketiséà outrance », « la teammythique des bar tenders », « coachsportive et street workeuse », « fitnessen salle », « sa teamtrès masculine », « le story telling », « les bad boys », « leur petit deal », « la mythique Punishment team », « reps and set », « free style », et street workoutqui doit bien revenir vingt fois dans l’article… 

Sur le fond, l’euphorie affichée par la rédactrice fait sourire… Voici ce qu’elle écrit : les adeptes retrouvent « le goût de l’effort perdu », « l’humain ouvert sur le monde est au cœur du sport de rue »,  « il repose sur l’autogestion des installations (NDLR. Voir le sort réservé aux Vlib et aux Autolib’…) et l’entraide spontanée », « il bénéficie d’une belle image de liberté et de pratique underground », « c’est à la fois un ancrage dans la réalité et il prend appui sur une communauté virtuelle », « cette pratique repose sur la reprise de soi par soi-même, par la récupération de ses capacité d’agir ; cela correspond bien à l’état d’esprit de nos sociétés désenchantées » (NDLR. Ah bon ?), « l’idée de se réapproprier la ville renforce la notion de débrouille, ainsi que la volonté de résister à la consommation de masse », « il reste authentique ; hors temps, hors engouements » ( !), cette activité permet aux femmes de prendre conscience qu’elles pouvaient occuper une autre place et de repérer une puissance d’agir, entretient une forme de mythologie autour de la résistance afro-américaine, « la solution vient de soi, un nouveau départ est possible, on peut effacer tout pour tout recommencer, retrouver un cadre de vie, une régularité, une discipline, une page blanche sur laquelle écrire à nouveau, etc. Bref ça combat la neurasthénie, l’oisiveté, la drogue, les préjugés, … Et tout cela pour pas cher ! Ouah !

Ah, j’oubliais : il y a déjà une Fédération nationale, qui revendique 20000 pratiquants et un chercheur suisse lui aurait consacré une thèse…

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