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26/10/2017

Katsimbalis n'est plus

De mai à août 1982, j’ai lu « Le Colosse de Maroussi » de Henry Miller (1941). J’avoue que le livre ne m’avait pas plu car je n’y avais pas vu ce que je cherchais : une peinture de la Grèce, un récit de voyage ou de séjour, par un ami de Laurence Durrell. Seules avaient trouvé grâce à mes yeux l’introduction dans laquelle Miller disait sa passion pour le Périgord (qui pour lui survivrait à la France !) et la magnifique fin qui rendait immortel un Grec de légende, Katsimbalis, le colosse de Maroussi, qui avait littéralement subjugué l’Américain revenu de tout. 

« C’était une sorte de processus dévorant ; quand il décrivait un endroit, il y mordait à pleines dents comme une chèvre qui s’en prend à un tapis. S’il dépeignait quelqu’un, il le mangeait tout cru, de pied en cap. Un événement – il le dévorait en détail, comme une armée de fourmis blanches qui se lance à l’assaut d’une forêt. Il était partout à la fois, en parole. Il attaquait d’en haut, d’en bas, de front, par-derrière, sur les flancs. S’il lui manquait une expression, une image pour en finir aussitôt avec un détail, il le clouait d’un coup de lance, momentanément, et continuait, quitte à revenir plus tard le déchiqueter pièce à pièce. Ou alors, tel un jongleur, il le faisait sauter en l’air, et juste quand on croyait que, l’ayant oublié, il allait le laisser retomber et se briser, il passait adroitement le bras derrière le dos et le rattrapait sur la paume, sans même se donner la peine de regarder ». 

Katsimbalis.jpg

J’avais surnommé Katsimbalis, pour son anticonformisme, sa faconde, son soupçon de misanthropie, son côté artiste autodidacte et son parcours original et solitaire, un Auvergnat authentique, J.H., à mille lieues et même à mille kilomètres de l’Acropole. 

Lors de chaque séjour en Auvergne, je passais un moment avec lui, il me donnait des nouvelles et nous commentions l’actualité, devant un café ou un apéritif. Il nous a rendu d’innombrables services, c’était notre vigie et notre point d’entrée dans le pays.

En mai 2017, il s’est plaint d’une fatigue persistante et a progressivement cessé toutes ses activités. Lors de mes appels téléphoniques il a avoué des douleurs de plus en plus insupportables et s’est mis à fréquenter médecins et hôpitaux mais a obstinément refusé qu’on vienne le voir.

Notre Katsimbalis est mort en octobre 2017 à 74 ans. 

« Et ce n’était pas simple bavardage, c’était du langage qu’il vous servait – un langage du ventre, langage de bête féroce » (citations extraites du site Babelio).

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