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28/04/2015

Écrivains contemporains de langue française : Pascal Quignard (XIV)

J'avais adoré "Tous les matins du monde" que j'avais lu après avoir vu le film avec Jean-Pierre Marielle et que j'avais trouvé trop court.

Tous les matins du monde.jpg

En 2009, j'avais lu "Terrasse à Rome", paru en 2000. Un curieux livre, qui fait penser au "Parfum" et aussi à "L'amour au temps du choléra". C'est l'histoire du graveur sur cuivre Meaume, qui ne se remettra jamais de son amour impossible pour la fille d'un notable et terminera sa vie à Rome. L'écriture et la construction du roman aux allures historiques est sophistiquée. La lecture en est du coup un peu laborieuse et en tous cas, cela reste mystérieux. Le livre est aussi un hommage à l'Art et à l'artisanat, et à l'époque classique (1650). En définitive, un livre original qui vaut la peine.

J'en avais déduit que Pascal Quignard était un écrivain exigeant, d'abord un peu difficile mais de grande qualité : original, concis, avec un style.

Et tout d'un coup, il y a une semaine, je lis ceci :

"La source de la musique n'est pas dans la production sonore. Elle est dans cet Entendre absolu qui la précède dans la création, que composer entend, avec quoi composer compose, que l'interprétation doit faire surgir non pas comme entendu mais comme entendre.

Ce n'est pas un vouloir dire ; ce n'est pas un se montrer. C'est un Entendre pur"...

Moi, la musique, ça me passionne, l'harmonie surtout, et aussi l'improvisation. Mais alors là, c'est plus fort que Berg et Boulez réunis ! C'est aussi plus fort que "Femmes", ce qui n'est pas peu dire.

C'était la page 59 ; j'avais déjà enduré quelques dizaines de courts paragraphes abscons, de phrases tarabiscotées, de pensées sans queue ni tête. Je me dis que c'est le début, que, comme dans La Recherche, il faut prendre son rythme, que tout va s'éclairer progressivement.

Puis, distraitement, j'ouvre le livre (Vie secrète) au hasard. C'est la page 361 :

"En lisant les vieux livres, ayant accru ce que j'ai éprouvé de l'éloignement de ceux qui furent, ayant augmenté mon expérience de la prétérition de ce qui a été, l'ayant minée de préemption de ce qui est mortel, je plonge le tout dans l'abîme du silence qui précéda et qui suivra".

Et effectivement, je plonge ! Je me dis que Pascal Quignard se paye de mots et que, corrélativement, il se paye ma tête.

Je comprends que la lecture de ce livre soit recommandée pour surmonter une rupture difficile ; si l'on triomphe de lui et que l'on va au bout, on peut être abandonné par n'importe qui et s'en remettre facilement.

Et puis, à bien y réfléchir, c'est encore mieux que du Modiano. On n'y comprend rien mais c'est mieux.

 

 

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